14 mars 1844

Premières escarmouches des Trois Mousquetaires

Il était une fois trois soldats – pardon, quatre ! – qui vivaient des aventures trépidantes… Rien d’original, direz-vous… Et pourtant, ces personnages sont passés à la postérité au point de devenir emblématiques de notre pays, au même titre qu’Arsène Lupin et Le Petit Prince. Il n’est pas sûr que les créateurs de ces fringants mousquetaires, Alexandre Dumas et Auguste Maquet, n’aient jamais imaginé un tel destin pour leurs héros. La recette du succès vient peut-être d’un subtil équilibre entre connaissance des attentes du public et part de hasard...

Isabelle Grégor

Au pied de la cathédrale de Condom (Gers, berceau de d'Artagnan), les quatre statues en pied représentant les Mousquetaires est l'?uvre du sculpteur georgien Zourab Tsereteli.

Une débâcle pour un succès

En cette année 1843, toute une bande d'anciens chevelus commence à s'inquiéter : la pièce Les Burgraves, écrite par leur chef de file Victor Hugo, n'a pas rencontré le succès escompté. Le théâtre romantique serait-il passé de mode ? Pour Alexandre Dumas, dont les dernières œuvres n'ont pas déchaîné les passions, il est temps de passer à autre chose.

Alexandre Dumas, William Henry Powell, 1855, Washington, Smithsonian American Art Museum. Agrandissement : Atelier Nadar, Portrait d'Auguste Maquet, 1900.Quelques impressions de voyage plus tard, celui qui se voulait dramaturge avant tout se laisse convaincre de délaisser le théâtre pour se tourner vers le roman, ce genre quelque peu méprisé mais riche en promesses financières. Pourquoi ne pas suivre le chemin qu'a ouvert le succès immense des Mystères de Paris (1843) d'Eugène Sue ? La presse a le vent en poupe, le roman-feuilleton est à la mode, il faut nourrir les lecteurs !

Après avoir hésité entre histoire sentimentale (La Robe de noces, 1843) et roman historique (Le Chevalier d'Harmental, 1841), il décide de privilégier ce dernier genre qui a fait la gloire de l'Écossais Walter Scott. Il faut dire que le romantisme (dico) n'aime rien moins que de se plonger dans le passé pour y trouver anecdotes et personnages qui permettront de créer un « récit national », une culture commune à laquelle se rattacher. Ce n'est pas Hugo et son Notre-Dame de Paris (1831) qui diront le contraire ! Il ne reste plus qu'à trouver un sujet...

Ce petit quelque chose en plus

Dumas a un sérieux atout dans sa poche : cette bonne fée s'appelle Auguste Maquet, a une trentaine d'années et un objectif : « Je vais demander à la littérature ce que l’Université me refuse : gloire et profit ». Mais la gloire, pour le moment, c'est Dumas qui l'a, et Maquet doit vite se contenter de lui fournir les manuscrits qui vont permettre au grand homme de nourrir sa propre renommée.

Mémoires de M. d'Artagnan de Gatien de Courtilz de Sandras,1700. Agrandissement : Portrait de Milady, Les Trois Mousquetaires, édition de 1849, Paris, BnF, Gallica.Début 1843, les deux hommes s'intéressent aux Mémoires (apocryphes) de d'Artagnan (1700) que Dumas a empruntées à la bibliothèque de Marseille, et qu'il ne rendra d'ailleurs jamais... « Je l'ai lu, sans rien y remarquer d'autre que les noms d'Athos, Porthos et Aramis. […] Un seul épisode me frappa : celui des amours de d'Artagnan avec une anglaise désignée sous le nom de Milady, laquelle essaie de la faire tuer par son amant, nommé de Wardes. […] Maquet, sans être amoureux du sujet […] se mit à la besogne. Je repris le livre de ses mains et parvins à lui rendre un certain enthousiasme pour l'ouvrage ». La machine est lancée !

Maurice Leloir, Alexandre Dumas rédigeant Les Trois Mousquetaires, 1894. Agrandissement : Les Trois mousquetaires en feuilleton, début de la publication le 14 mars 1844 dans le journal Le Siècle .Ce type de collaboration n'avait alors rien d'exceptionnel, Dumas ayant déjà fait appel à de belles plumes comme celles de Gérard de Nerval ou Théophile Gautier pour répondre à la demande. Mais Maquet est plus que cela : il est l'érudit qui a le temps de se plonger dans les archives pour livrer une première version que le maître n'aura plus qu'à améliorer à coup d'innombrables ajouts.

Pour un seul paragraphe de Maquet, ce sont six qui sortent de sa plume ! Notre dramaturge travaille notamment les dialogues qu'il enrichit au maximum : le feuilleton n'est-il pas payé à la ligne ? Le 14 mars 1844, les premiers paragraphes du roman paraissent dans le journal Le Siècle. Très vite, traductions, adaptations, contrefaçons et suites (Vingt Ans après en 1845 et Le Vicomte de Bragelonne en 1847) s'enchaînent. Un succès qui va mener en 2002 Alexandre Dumas au Panthéon !

Un titre absurde

Directeur du Siècle et fondateur de la Société des Gens de Lettres, Louis Desnoyers a été gêné par un détail lorsqu'il a publié dans son journal le roman de Dumas alors intitulé Athos, Porthos et Aramis. Voici ce qu'il écrivit :

Jules Cheret, couverture des Trois mousquetaires d'Alexandre Dumas, 1887, Paris, BnF.« Mon cher Dumas,
Beaucoup de nos abonnés sont effrayés de ce titre : Athos, Porthos et Aramis. Quelques-uns croient que c'est l'histoire des trois Parques que vous avez entrepris d'écrire, et comme, à moins de nouveaux renseignements sur ces trois déesses, leur histoire ne promet pas d'être folâtre, je vous proposerai le titre moins ambitieux, mais beaucoup plus populaire, des Trois Mousquetaires. Réponse, s'il vous plaît »
.

Ce à quoi Dumas répondit :

« Mon cher ami,
Je suis d'autant plus de votre avis d'appeler le roman : Les Trois mousquetaires, que comme ils sont quatre, le titre sera absurde, ce qui promet au roman le plus grand succès »
(Alexandre Dumas, article du journal Dartagnan, 29 février 1868).

Remarquons que Desnoyers n'avait pas proposé Les Quatre mousquetaires, peut-être simplement parce que ce titre, s'il est plus exact, est moins fidèle à l'original, et surtout moins agréable à l'oreille...

« Je ne demande à l'Histoire que le clou pour accrocher mon tableau »

Dumas ne se contente pas de piller le passé, il s’interroge : « La grande difficulté est de se garder de ces deux fautes dont la première […] fut de maigrir le passé, comme le fait l'Histoire, et la seconde de défigurer l'Histoire comme l'a fait le roman » (Alexandre Dumas, Avant-propos de Gaule & France, 1833).

Alexandre Dumas publiant derechef son journal Le Mousquetaire, caricature d'André Gill dans le journal La Lune, 2 décembre 1866.Comment en effet trouver le bon équilibre entre petite et grande Histoire ? C'est toute la difficulté des romans historiques, et tout l'art de Dumas (et de Maquet) d'avoir réussi ce grand écart sans trébucher. Certes, on peut lui reprocher des dates inexactes, des chronologies trop condensées, des événements déplacés.

A-t-il besoin d'une guerre contre l'Espagne ? Il la fait commencer 10 ans plus tôt ! Veut-il conduire ses mousquetaires à une adresse précise ? Il leur indique un numéro de rue, alors que la numérotation ne sera imposée qu’au milieu du XVIIIe siècle. Qu’importe ! Dumas ne se veut pas spécialiste, il a juste besoin d'une toile de fond pour faire vivre ses personnages, comme dans ses pièces historiques, d'Henri III et sa cour (1829) à La Tour de Nesle (1832). Et tant mieux si les siècles passés font rêver le public !

Un bal à la cour. Louis XIII et Anne d'Autriche sont assis sous le dais royal fleurdelisé. Le cardinal de Richelieu se tient debout à la droite du souverain, Maurice Leloir, 1901.La France romantique qui dévore les écrits de Jules Michelet ou François Guizot ne demande que cela. Dumas a choisi son camp : il préfère voyager dans le temps plutôt que de présenter à ses lecteurs un miroir pour contempler leur époque, comme le fait si bien le réaliste Honoré de Balzac avec sa Condition humaine.

Ce sera donc la France de la Fronde qui accueillera les aventures de nos mousquetaires pour leur faire croiser les célébrités de l'époque comme Richelieu ou Anne d'Autriche, mais aussi des anonymes de plus ou moins haute condition, tout droits sortis du cerveau du romancier. Évènements réels et imaginaires s'entremêlent pour le plus grand plaisir du lecteur qui, par un jeu d'identification, se retrouve dans les salons du Louvre en attente d'une audience, sur les routes d'Angleterre à la recherche des ferrets de la reine ou au cœur du siège de La Rochelle.

Si le romancier s'appuie sur les détails pour créer un effet de réel, comme par exemple les éléments des uniformes des mousquetaires, il ne lui est nullement besoin de longues descriptions pour nous faire remonter les siècles : « Louis XIII, ouvrant la porte de communication, s'engagea dans le corridor de chez lui chez Anne d'Autriche. La reine était au milieu de ses femmes »... et la magie opère !

Le cardinal de Richelieu au siège de La Rochelle,Henri-Paul Motte, 1881, musée des Beaux-Arts de La Rochelle.

Hommage au maître

Mort en 1832, Walter Scott n'aura pu se réjouir longtemps de l'influence qu'il a exercée sur les Romantiques français qui ont multiplié les hommages au créateur d'Ivanhoé (1819) : « Walter Scott allie à la minutieuse exactitude des chroniques la majestueuse grandeur de l’histoire et l’intérêt pressant du roman » (Victor Hugo, Sur Walter Scott, 1823).

Inventeur du roman historique en tant qu'alliance d'érudition et d'imagination, il a bousculé les écrivains de l'époque en leur ouvrant de nouvelles perspectives, comme le reconnaît volontiers Dumas :
Edwin Henry Landseer, Walter Scott dans le Rhymer's Glen, Londres, Dickinson Gallery. Agrandissement : Horace Vernet, Allan M'Aulay, 1823, Londres, Wallace Collection. Evocation du chapitre V du roman A Legend of Montrose (1819). Allan M'Aulay tient la tête coupée d'Hector, l'un d'un clan de bandits des Highlands.« […] notre étonnement fut grand en France lorsque, après avoir lu Ivanhoe, le Château de Kenilworth, Richard en Palestine, nous fûmes forcés de reconnaître la supériorité de ces romans sur les nôtres. C’est que Walter Scott aux qualités instinctives de ses prédécesseurs joignait les connaissances acquises, à l’étude du coeur des hommes la science de l’histoire des peuples ; c’est que, doué d’une curiosité archéologique, d’un coup d’œil exact, d’une puissance vivifiante, son génie résurrectionnel évoque toute une époque, avec ses moeurs, ses intérêts, ses passions [...] : c’est que sous sa plume enfin, hommes et choses reprennent vie et place à la date où ils ont existé, que le lecteur se trouve insensiblement transporté au milieu d’un monde complet, dans toutes les harmonies de son échelle sociale, et qu’il se demande s’il n’est pas descendu par quelque escalier magique dans un de ces univers souterrains comme on en trouve dans les Mille et une Nuits » (Avant-propos de Gaule & France, 1833).

D'Artagnan monte la garde en compagnie d'Athos, Porthos et Aramis, Jules Huyot d'après un dessin de Maurice Leloir pour une réédition du roman Les Trois Mousquetaires, 1894, Paris, BnF, Gallica.

Comme les doigts de la main

« Un pour tous ! Tous pour un ! » On connaît par coeur la formule, mais il est généralement plus difficile de donner quelques détails sur ces gentilshommes bretteurs à la solidarité affichée.

Mousquetaire de Louis XIII, estampe du XIXe siècle, Marseille, Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée. Agrandissement : D'Artagnan et Athos, Les Trois Mousquetaires, 1849.Commençons par d'Artagnan, le seul qui soit très clairement inspiré d'un personnage ayant existé. Bien connu pour son rôle dans l'arrestation de Fouquet en 1661, Charles de Batz de Castelmore devient sous la plume de Dumas un jeune Tarbais plein de fougue, « une des meilleures lames de son temps : jarret de fer, poignet d’acier, coup d’œil sûr et regard brûlant » (Vingt ans après).

Ses qualités lui permettent en 1657 d'intégrer le corps d'élite des mousquetaires gris créé par Louis XIII en 1622 pour maintenir l'ordre à une époque où n'existait pas de force de police, et protéger le roi lors des batailles.

Armés de mousquets et revêtus d'une casaque bleue fleurdelisée, ces cavaliers vont incarner ces idéaux de la noblesse que sont courage et loyauté, quitte à mettre au-dessus de tout la beauté du fait d'armes. C'est cet esprit bravache qui, à la fin du XIXe siècle, a rendu inoubliable cet autre personnage de mousquetaire gascon beau parleur créé par Edmond Rostand : Cyrano de Bergerac.

Aramis arborant sa casaque de mousquetaire. Derrière, Bazin, son laquais, confit en dévotion, Henry Jules de Faxardo, Les Trois Mousquetaires, 1846. Agrandissement : Athos, Porthos, Aramis et d'Artagnan joyeux après avoir croisé le fer avec les gardes du cardinal au couvent des Carmes déchaux, Jules Huyot d'après Maurice Leloir, 1894.Aux côtés de d'Artagnan, Dumas met en scène « les trois inséparables » dont il aurait trouvé les noms, nous affirme-t-il, dans le Mémoire de M. le comte de la Fère. Sauf que ce comte n'a jamais existé... Dans notre roman, Olivier de la Fère apparaît d'abord sous le nom d'Athos, personnage inspiré d'un seigneur du Béarn. Incarnation de la sagesse, il est secondé par Aramis dont l'attirance pour la religion caractérisait déjà son modèle, un abbé laïc. N'oublions pas le géant du groupe, le sympathique Porthos qui, s'il tient son nom d'un cadet des Gardes françaises dénommé Portau, doit certainement sa carrure et son esprit de bon-vivant à Dumas lui-même.

Avec cette joyeuse troupe qui n'hésite pas à fanfaronner comme une bande de gamins insolents, le roman devient une belle histoire d'amitié, au risque de dissimuler la violence de ce corps militaire. Mais le mythe est lancé, et ce mélange de bravoure et de panache ne sera pas oublié lorsque, pendant la Seconde Guerre mondiale, des résistants décideront de piocher dans les Trois mousquetaires leurs noms de guerre.

Une rencontre explosive

Le tout jeune d'Artagnan, éternel pressé, n'a pas l'habitude de faire des détours... Cet extrait digne d'une farce montre toute l'habileté de Dumas pour mettre en scène ses personnages grâce à quelques gestes et paroles bien choisis.

« Entre les deux causeurs il y avait juste l'espace d'un homme. D'Artagnan crut que cet espace lui suffirait, et il s'élança pour passer comme une flèche entre eux deux. Mais d'Artagnan avait compté sans le vent. Comme il allait passer, le vent s'engouffra dans le long manteau de Porthos, et d'Artagnan vint donner droit dans le manteau. Sans doute Porthos avait des raisons de ne pas abandonner cette partie essentielle de son vêtement, car, au lieu de laisser aller le pan qu'il tenait, il tira à lui, de sorte que d'Artagnan s'enroula dans le velours par un mouvement de rotation qu'explique la résistance de l'obstiné Porthos. […]
Porthos accompagné de son serviteur Mousqueton, Alphonse Vien, Les Trois Mousquetaires, 1846. Agrandissement : Porthos devant les plans de fortification de la citadelle de Belle-Île-en-Mer, d'après une composition de Philippoteaux pour une édition du Vicomte de Bragelonne, 1852.- Vertubleu ! cria Porthos faisant tous ses efforts pour se débarrasser de d'Artagnan qui lui grouillait dans le dos, vous êtes donc enragé de vous jeter comme cela sur les gens.
- Excusez-moi, dit d'Artagnan reparaissant sous l'épaule du géant, mais je suis très pressé, je cours après quelqu'un et... […].
- Monsieur, dit-il, vous vous ferez étriller, je vous en préviens, si vous vous frottez ainsi aux mousquetaires.
- Étriller, monsieur ! dit d'Artagnan, le mot est dur.
- C'est celui qui convient à un homme habitué à regarder en face ses ennemis.
- Ah ! pardieu ! je sais bien que vous ne tournez pas le dos aux vôtres, vous.
Et le jeune homme, enchanté de son espièglerie, s'éloigna en riant à gorge déployée.
Porthos écuma de rage et fit un mouvement pour se précipiter sur d'Artagnan.
- Plus tard, plus tard, lui cria celui-ci, quand vous n'aurez plus votre manteau.
- À une heure donc, derrière le Luxembourg.
- Très bien, à une heure, répondit d'Artagnan en tournant l'angle de la rue »
( Alexandre Dumas, Les Trois mousquetaires, 1844).

La Reddition de Breda, Velázquez, 1634-35, Madrid, musée du Prado. Ce tableau a servi d'inspiration au troisième volume de la série Les Aventures du capitaine Alatriste (1990-2010) d'Arturo Pérez-Reverte.

Il suffit d'une cape et d’une épée

C'est d'Espagne que nous sont parvenues au XVIIe siècle les comedias de capa y espada qui allaient être une source d'inspiration capitale pour nos écrivains.

A la façon de Calderon ou Tirso de Molina, auteur d'un premier Don Juan, les dramaturges français Paul Scarron ou Thomas Corneille s'approprient ces histoires de rivalités malheureuses réglées à coups de duels dans des décors très couleur locale. La mode sera cependant brève et ce n'est qu'au XIXe siècle que les épées ressortent de leur fourreau, par exemple avec le Hernani de Victor Hugo, toujours à la mode espagnole mais avec moins d'humour.

Affiche du film Fanfan la Tulipe, 1952.On retrouve heureusement cette légèreté de ton dans les romans de cape et d'épée dont les héros, au service d'une noble cause, se doivent d'affronter ennemis impitoyables et épreuves angoissantes avant de parvenir à leurs fins. L’action est reine avec des scènes qui s’enchaînent, abandonnant le lecteur à chaque fin de chapitre sur un suspense insoutenable...

Courage, loyauté, altruisme... ces qualités sont bien sûr celles des personnages de Dumas, reconnu comme maître en la matière, mais aussi de ceux de Paul Féval (Le Bossu, 1858), de Michel Zévaco (série des Pardaillan, 1907) ou plus récemment de l'espagnol Arturo Pérez-Reverte (Le Capitaine Altatriste, 1996).

Avec ses atouts pour faire vivre au plus près les combats et chevauchées indispensables, le cinéma a bien sûr rendu encore plus populaire un genre qui l'était déjà, avec les personnages de Scaramouche (1952), Fanfan la Tulipe (1952) ou encore Cartouche (1962).

En quelques mots

Voici un roman original : on connaît mieux ses personnages que son intrigue ! Il est vrai que celle-ci est assez alambiquée. Essayons d'y voir plus clair.

D'Artagnan sauve Constance Bonacieux des agents du cardinal de Richelieu,  Maurice Leloir, Les Trois Mousquetaires, 1894.L'histoire commence en 1625, sous le règne de Louis XIII. D'Artagnan, jeune et pauvre gentilhomme de province, se présente à Paris chez un ami de son père, M. de Tréville. Il y rencontre trois mousquetaires qu'il provoque tout à tour en duel : Athos, Porthos puis Aramis. Devenu finalement leur ami, il a la mauvaise idée de tomber amoureux de Constance, jolie lingère au service d'Anne d'Autriche et mariée à un M. Bonacieux aussi jaloux que chicaneur.

C'est Constance qui lui demande de voler au secours de la reine qui a imprudemment confié deux de ses ferrets à son prétendant le duc de Buckingham, que l'on dit être le « plus bel homme du monde ». Il faut vite les récupérer avant que Louis XIII n'ait preuve de la tromperie... Entre alors en jeu Milady de Winter, une aventurière que le cardinal de Richelieu a chargée de reprendre les bijoux au duc. Mais les quatre mousquetaires vont être plus efficaces et sauver l'honneur de la reine.

L'affaire ne s'arrête pas là ! Ce qui aurait dû être un dénouement n'est pour Dumas qu'une péripétie. La suite du roman offre à Richelieu, Constance ou encore Milady l'occasion de jouer avec les destins de nos héros pour le plus grand plaisir du lecteur qui, s'il s'y perd un peu, sait bien que tout cela n'est finalement que littérature...

Milady empoisonne Constance Bonacieux, Jules Huyot d'après un dessin de Maurice Leloir, Les Trois Mousquetaires, 1894.

Une mort inoubliable

Milady de Winter, espionne au service de Richelieu, doit être exécutée pour avoir fomenté ou réalisé plusieurs meurtres... Ce passage, d'une beauté inquiétante, nous rappelle qu'Alexandre Dumas n'avait pas oublié son amour pour le romantisme : on y retrouve le thème des personnages maudits, la fascination de la mort et ce type d'ambiance mystérieuse où la nature semble participer à la scène...

Exécution de Milady, illustration dans Les Trois mousquetaires, édition de 1849. Agrandissement : Exécution de Milady, Jules Huyot d'après un dessin de Maurice Leloir, Les Trois Mousquetaires, 1894.« Le bateau glissait lentement le long de la corde du bac, sous le reflet d'un nuage pâle qui surplombait l'eau en ce moment. On le vit aborder sur l'autre rive ; les personnages se dessinaient en noir sur l'horizon rougeâtre.
Milady, pendant le trajet, était parvenue à détacher la corde qui liait ses pieds : en arrivant sur le rivage, elle sauta légèrement à terre et prit la fuite.
Mais le sol était humide ; en arrivant au haut du talus, elle glissa et tomba sur ses genoux.
Une idée superstitieuse la frappa sans doute ; elle comprit que le Ciel lui refusait son secours et resta dans l'attitude où elle se trouvait, la tête inclinée et les mains jointes.
Alors on vit, de l'autre rive, le bourreau lever lentement ses deux bras, un rayon de la lune se refléta sur la lame de sa large épée, les deux bras retombèrent ; on entendit le sifflement du cimeterre et le cri de la victime puis une masse tronquée s'affaissa sous le coup.
Alors le bourreau détacha son manteau rouge, l'étendit à terre, y coucha le corps, y jeta la tête, le noua par les quatre coins, le rechargea sur son épaule et remonta dans le bateau.
Arrivé au milieu de la Lys, il arrêta la barque, et suspendant son fardeau au-dessus de la rivière :
- Laissez passer la justice de Dieu ! cria-t-il à haute voix.
Et il laissa tomber le cadavre au plus profond de l'eau, qui se referma sur lui »
(Alexandre Dumas, Les Trois mousquetaires, 1844).

Bibliographie

Mousquetaires ! éd. Gallimard – musée de l'Armée, 2014,
Simone Bertière, Dumas et les Mousquetaires : histoire d'un chef-d'oeuvre, éd. De Fallois, 2009.

Publié ou mis à jour le : 2023-04-05 09:21:16

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