Le 10 février 1842, sous le règne de Louis-Philippe 1er, le lieutenant de vaisseau Charles-Philippe de Kerhallet signe un traité avec Attékéblé, dit «Peter», un négociant africain qui se présente comme le souverain de Bassam. Cette modeste principauté du littoral africain englobe l'actuelle métropole de la Côte d'Ivoire, Abidjan.
Par ce traité, la France établit son protectorat sur la «rivière», ou lagune de Grand-Bassam, et, en échange de la location d'un fort sur la lagune, elle s'engage à payer au souverain et à ses héritiers une «coutume» de 4000 francs par an jusqu'en 1915.
Dans le même temps, le lieutenant de vaisseau Fleuriot de Langle conclut un traité similaire avec le neveu du roi du Sanwi, le futur souverain Amon Ndoufou II. Le Sanwi, qui s'étend le long de la lagune Aby, en bordure de l'actuel Ghana, a pour principale ville Assinie, aujourd'hui disparue.
Par le biais de ces deux traités, la France se réimplante en Côte d'Ivoire après une vaine tentative menée sous le règne de Louis XIV.
Les deux officiers de marine font partie d'une expédition organisée par l'amiral Louis Édouard Bouet-Willaumez. Gouverneur provisoire de la colonie du Sénégal, celui-ci veut établir des comptoirs tout au long du golfe de Guinée en vue de développer le commerce avec l'intérieur du continent africain.
Sur la lagune de Bassam, où se sont installés des négociants français et une communauté religieuse, les relations avec Attékéblé «Peter» ne tardent pas à se dégrader. Le 14 septembre 1853, un corps expéditionnaire français venu du Sénégal bat les insurgés ivoiriens à Éboué. Pour prévenir le retour des troubles, le capitaine de génie Louis Faidherbe construit un nouveau fort sur la lagune de Dabou (ce jeune officier sera appelé à un grand avenir).
À Assinie, où réside le représentant de la France, un négociant rochelais du nom d'Arthur Verdier crée en 1863 une première «factorerie» (ainsi appelle-t-on les établissements qui pratiquent le négoce avec les populations locales).
La colonisation prend un tour nouveau à partir de la fin des années 1870. Les républicains qui ont pris le pouvoir après la guerre franco-prussienne de 1870-1871 ne veulent plus se satisfaire de quelques comptoirs portuaires limités aux besoins commerciaux.
Les dirigeants laïcs Charles de Freycinet et Jules Ferry exaltent la «mission civilisatrice» de la France et développent de vastes projets de conquêtes, avec l'intention sous-jacente de damer le pion à l'ennemi héréditaire, la Grande-Bretagne, et de compenser la perte de l'Alsace et du nord de la Lorraine à la suite de la guerre franco-prussienne.
Arthur Verdier, qui s'entête à développer le pays, inaugure les premières plantations de café et entreprend l'exploitation forestière. Il est nommé «résident de France» à Assinie et représente la République auprès des chefs locaux.
Verdier envoie ses agents explorer l'intérieur du pays et conclure des traités avec les chefs indigènes. Il s'agit de prendre officiellement possession des territoires avant que d'autres pays européens ne s'en mêlent et de concrétiser au plus vite le partage de l'Afrique décidé au congrès de Berlin de 1885.
Le plus dynamique des agents de Verdier, qui lui succèdera à la «Résidence de France», s'appelle Treich-Laplène. Il laissera son nom au quartier populaire de Treichville, à Abidjan.
En 1890, la «Résidence de France» se transfère d'Assinie à Grand-Bassam, puis, dix ans plus tard, suite à une épidémie locale de fièvre jaune, à proximité d'une presqu'île anodine du nom d'Abidjan.
D'abord nommé «Dépendances des Rivières du sud», l'ensemble de la région acquiert son nom définitif : «Côte d'Ivoire» par le décret du 12 décembre 1891. La colonie du même nom est officiellement constituée par le décret du 10 mars 1893.
Ses frontières sont délimitées à l'ouest, du côté du Liberia et à l'est, du côté de la Gold Coast anglaise, par différentes missions d'exploration. L'Alsacien Louis Binger, officier d'ordonnance de Louis Faidherbe, effectue une vaste opération de reconnaissance de la boucle du Niger, au nord.
Au tournant du siècle, la Côte d'Ivoire commence à se doter d'une véritable administration... Mais l'on s'inquiète de l'irruption dans le Nord d'un guerrier soudanais, redoutable stratège et chef charismatique, du nom de Samory Touré.
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