Le 28 juin 1833, au début du règne de Louis-Philippe Ier, le ministre de l'Instruction publique François Guizot fait voter une loi instaurant en France un enseignement primaire public et gratuit pour les enfants des familles pauvres. C'est la première étape de l'éducation pour tous en France.
Notons que la loi ne fait pas obligation aux parents d'envoyer leurs enfants à l'école. Elle ne fait pas non plus référence au sexe des élèves, ce qui sous-entend qu'il s'agit seulement de garçons et non de filles. C'est seulement sous Napoléon III avec Victor Duruy que l'instruction primaire deviendra obligatoire, y compris pour les filles...
Vers l'alphabétisation de masse
François Guizot, bourgeois sévère et conservateur, est aussi un pieux protestant épris des Lumières. Il exige dans la loi que chaque commune devienne, dans les six ans qui suivent, propriétaire d'un local d'école, loger et entretenir un ou plusieurs instituteurs et instruire tous les enfants en échange d'une rétribution mensuelle des familles : « Toute commune est tenue, soit par elle-même, soit en se réunissant à une ou plusieurs communes voisines, d'entretenir au moins une école primaire élémentaire » (article 9). Cette loi n'est pas sans rappeler l'ordonnance royale du 13 décembre 1698 qui avait demandé la création de « petites écoles » paroissiales de façon non contraignante (note ).
Pour la formation des instituteurs, le ministre accélère la création des Écoles normales. Les premières sont apparues sous la Révolution pour remplacer les curés dans leur fonction d'enseignement. L'article 11 de la loi stipule : « Tout département sera tenu d’entretenir une école normale primaire, soit par lui-même, soit en se réunissant à un ou plusieurs départements voisins » (article 11). Il ne s'agit encore que de former des instituteurs masculins. Les écoles normales de femmes seront créées à partir de 1844 selon le bon vouloir des élus locaux et les départements ne seront tenus d'en ouvrir qu'à partir de 1879.
La loi Guizot précise le contenu de l'enseignement : « L'instruction primaire élémentaire comprend nécessairement l'instruction morale et religieuse, la lecture, l’écriture, les éléments de la langue française et du calcul, le système légal des poids et mesures » (article 1)...
Non sans préciser : « Le vœu des pères de famille sera toujours consulté et suivi en ce qui concerne la participation de leurs enfants à l'instruction religieuse » (article 2) ! Autant dire que dès 1833, sous le règne du roi Louis-Philippe, on met des limites à l'influence de l'Église...
L'enseignement primaire élémentaire est gratuit pour les enfants des familles pauvres - un sur trois environ -. Pratiqué le plus souvent dans une classe unique, sans souci des niveaux, il permet aux enfants les plus faibles d'être soutenus par les autres. Notons que les châtiments corporels sont interdits par la loi dès 1834.
Dans un pays où un adulte sur deux est encore analphabète, la loi Guizot va contribuer de manière décisive à répandre l'instruction. Elle sera complétée sous le règne de Napoléon III, dans les années 1860, par l'action législative du ministre Victor Duruy et sous la IIIe République, dans les années 1880 par celle de Jules Ferry.
Vos réactions à cet article
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Loignon (25-04-2021 12:27:22)
La scolarisation est un long processus qui s'est étiré sur plusieurs siècles, comme le rappelle plaisamment la chanson "Qui a inventé l'école ?...". Chaque étape s'appuie sur les précédentes. ... Lire la suite
Francis Chouville (16-03-2020 15:59:39)
Je suis toujours étonné qu'on attribue, qui à Jules Ferry, qui encore comme ici à François Guizot l'institution de l'école gratuite. Et je suis d'autant plus triste de lire ceci dans les colonne... Lire la suite