Le 7 juin 1832, le roi Guillaume IV approuve la réforme qui met fin à certaines aberrations du système électoral anglais et notamment aux « bourgs pourris ». C'est une avancée importante dans l'approfondissement de la démocratie anglaise.
Sur cette peinture, la deuxième d'une série de quatre consacrée à l'élection à Oxford, en 1754, le peintre William Hogarth montre au premier plan un candidat tory achetant des voix alors qu'à l'arrière-plan ses partisans attaquent le siège local des whigs.
Au cours du XVIIIe siècle, le Parlement britannique a progressivement acquis des droits contre le monarque. Cependant, ses prétentions de représenter le peuple sont de plus en plus contestées, tant le mode d'élection de la Chambre des Communes est archaïque.
Le découpage électoral, avec ses « comtés » ruraux et ses « bourgs » urbains reflète la situation du XVIIe siècle et remonte partiellement aux derniers siècles du Moyen Âge.
Certains « bourgs pourris » comme Old Sarum ou Gatton ont moins de 10 électeurs en 1831. On les possède « dans sa poche », d'où l'autre surnom de « bourg de poche ». Ils font l'objet d'achats et de ventes au vu et au su de tout le monde !
À l'inverse, les villes industrielles en plein développement sont très mal représentées, voire pas du tout. Les conditions pour être électeur sont les mêmes que durant les années 1430 : il faut avoir des revenus de quarante shillings annuels, soit deux livres, dans les comtés. Dans les bourgs, les exigences varient d'un lieu à l'autre.
Cette situation avantage les élites terriennes traditionnelles puisqu'en 1831 le nombre d'électeurs est inférieur à 500 000.
Ces élites conservatrices ont donc tout à craindre d'une réforme, réclamée depuis la fin du XVIIIe siècle par les nouvelles couches bourgeoises : elle leur paraît être le premier acte d'une répétition de la Révolution française, modèle honni entre tous. Ce n'est qu'après Waterloo que les demandes reprennent et se font plus pressantes et plus massives. Dorénavant, les bourgeois ne sont plus les seuls à vouloir cette réforme, ils sont soutenus par de nombreux ouvriers qui y voient un moyen d'améliorer leur condition.
La fin des guerres napoléoniennes entraîne une grave crise économique et plonge de nombreux travailleurs dans la pauvreté.
Le gouvernement s'inquiète et, lors d'un important meeting à Manchester, le 16 août 1819, la troupe charge. Onze morts et des centaines de blessés vaudront à cet événement le surnom de « massacre de Peterloo », contraction de « Saint-Peter's Field », lieu du drame, et de « Waterloo ». Le gouvernement prend des mesures répressives et refuse de céder. Il accepte pourtant en 1828 de lever l'interdiction d'exercer des fonctions publiques qui pesait sur les non-conformistes, et en 1829 celle sur les catholiques.
L'agitation se maintient pourtant et reprend de plus belle en 1830 lorsque des ouvriers agricoles appauvris se soulèvent contre la diffusion des batteuses, la dîme et les baisses de salaire : ce sont les swing riots.
La mort du roi George IV en 1830 écarte l'un des opposants résolus à la réforme. Il reste à convaincre la Chambre des Lords, qui rejette plusieurs projets. La pression populaire, qui s'accompagne parfois de violences contre les adversaires de la réforme, fait craindre une révolution. Poussé par le premier ministre whig Lord Grey, le nouveau roi Guillaume IV menace de nommer assez de partisans de la réforme à la Chambre des Lords pour faire basculer la majorité.
Les tories (conservateurs) cessent alors leur politique d'obstruction systématique, ce qui permet de faire accepter le texte.
Nombre de bourgs sont supprimés alors que des circonscriptions sont créées là où la population l'exige. Le suffrage demeure censitaire et la distinction entre bourgs et comtés persiste, mais les conditions pour être électeur sont unifiées dans les bourgs. On ne peut pour autant parler d'une démocratisation réelle : le nombre d'électeurs dépasse à peine les 800 000. La bourgeoisie commerçante est ainsi associée aux affaires, pas les travailleurs manuels. Toutefois, la comparaison avec la France et ses 167 000 électeurs en 1831 (246 000 en 1847), montre que ce chiffre n'est pas négligeable.
La loi ne s'applique toutefois qu'en Angleterre et au Pays de Galles et d'autres textes sont adoptés la même année pour l'Irlande et l'Écosse.
Si beaucoup se réjouissent de l'adoption du texte, les travailleurs réalisent que la réforme électorale ne suffit pas à combler leurs espoirs et demandent aussi des mesures sociales.
La « nouvelle loi sur les pauvres » de 1834 réforme l'assistance aux plus démunis en prévoyant leur enfermement dans des workhouses, ou ateliers, où les conditions de vie et la discipline doivent être suffisamment peu attractives pour détourner les pauvres de solliciter l'assistance publique !
On conçoit que ces dispositions soient contestées : les mécontents forment le mouvement chartiste, nom tiré de la « Charte du peuple » élaborée en 1838. Leurs exigences sont politiques, comme le suffrage universel et le secret du vote, mais aussi sociales. Les nombreuses pétitions portées au parlement n'aboutissent toutefois pas et le mouvement chartiste se divise entre défenseurs de la légalité et partisans de la violence. Il disparaît à partir de 1848, n'ayant pas reçu l'appui des classes moyennes.
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