Le 14 octobre 1806, les Prussiens sont battus à Iéna et Auerstaedt, en Saxe, par les armées napoléoniennes.
L'Empereur des Français fait une entrée triomphale à Berlin. Après l'élimination des Autrichiens, il ne lui reste plus qu'à soumettre les Russes pour en finir avec la quatrième coalition européenne contre la France de la Révolution et de l'Empire. Ce sera chose faite neuf mois plus tard...
La quatrième coalition
Après sa mémorable victoire à Austerlitz sur les armées austro-russes et l'élimination de l'Autriche, Napoléon Ier engage des négociations avec l'Angleterre et la Russie tout en caressant l'espoir de s'entendre avec la Prusse sur un partage d'influence en Allemagne. Le 15 décembre 1805, par un traité signé au palais de Schonbrünn, près de Vienne, avec le chef du gouvernement prussien, Haugwitz, il permet à celui-ci d'annexer le Hanovre, possession anglaise, mais lui impose de céder Neuchâtel et le duché de Clèves à la France ainsi qu'Ansbach à la Bavière.
Comme les « philosophes » français du siècle précédent, l'empereur croit aux vertus de la monarchie prussienne. Il feint d'ignorer les diatribes antifrançaises répandues par la reine Louise, épouse du pâlichon Frédéric-Guillaume III de Hohenzollern. Sur les marches de l'ambassade de France à Berlin, les officiers prussiens se plaisent à aiguiser leur sabre en guise de provocation.
L'opinon prussienne s'indigne qui plus est de l'exécution à Nuremberg, le 25 août 1806, du libraire Palm, coupable d'avoir fait circuler des brochures antifrançaises..
Ainsi que les Français pouvaient s'y attendre, le gouvernement de Berlin forme contre eux une quatrième coalition avec la Russie et l'Angleterre. Le 26 août 1806, il lance un ultimatum à Napoléon en exigeant un retour de ses troupes au-delà du Rhin. L'ultimatum expire le 8 octobre suivant. Aussitôt débutent les opérations militaires...
Brève campagne
De Bayreuth, l'empereur s'engage sans attendre en Saxe avec 135 000 hommes répartis en trois colonnes. Il descend à vive allure la vallée de la Saale et, le 13 octobre 1806, atteint Iéna (une ville universitaire aujourd'hui en Thuringe).
Les Prussiens et leurs alliés ont trois armées à opposer à Napoléon : 60 000 hommes sous le commandement de Frédéric-Guillaume III et du vieux duc de Brunswick (71 ans), 50 000 sous le commandement du prince de Hohenlohe (des Saxons et des Prussiens), enfin 30 000 sous celui du général Erns von Rüchel.
Brunswick et le prince de Hohenlohe ont regroupé leurs deux armées à Weimar en vue d'attaquer les Français sur le flanc. Mais ils prennent peur et se séparent. Le prince de Hohenlohe reste à Weimar tandis que le roi et le duc de Brunswick tentent de gagner Leipzig par le nord.
Napoléon, qui pense avoir le gros des troupes ennemies en face de lui, occupe dans la nuit du 13 au 14 octobre le plateau de Landgrafenberg et se prépare à la bataille. Il dépêche par ailleurs ses maréchaux Ney vers le sud et Davout vers le nord.
Près d'Iéna, Napoléon écrase sans coup férir l'armée du prince de Hohenlohe. Le général von Rüchel arrive trop tard pour lui éviter la retraite.
Mais c'est le maréchal Davout qui va remporter la bataille décisive à Auerstaedt, à vingt kilomètres plus au nord. Là, il affronte avec 28.000 hommes seulement l'armée du roi de Prusse et du duc de Brunswick, au total près de 60.000 hommes. Le duc est mortellement blessé d'un coup de fusil aux yeux et, découragé, le roi Frédéric-Guillaume III ordonne peu après la retraite.
Le total des pertes est de 7 000 tués et blessés pour la Grande Armée et environ 15 000 tués et blessés côté prussien.
La campagne de Saxe s'est ainsi conclue en une journée sur un nouveau succès français. Dans les deux jours qui suivent, la cavalerie, et notamment la brigade du général Lasalle, taille en pièces les restes de l'armée ennemie près de Weimar.
« Un sentiment indéfinissable, mélange de douleur, d’admiration, de curiosité, agitait la foule qui se pressait sur son passage » (21e Bulletin de la Grande Armée).
Dans la ville d'Iéna, le philosophe Friedrich Hegel, qui a vu passer l'Empereur à la tête de son armée, en a été très impressionné. Il a cru discerner dans son épopée « la fin de l'Histoire » (il aura le temps de s'apercevoir de son erreur) : « J'ai vu l'Empereur, cette âme du monde, sortir de la ville pour aller en reconnaissance », écrit-il.
Napoléon Ier entre à Berlin en triomphateur le 27 octobre 1806, cependant que le roi et la reine se réfugient en Prusse orientale. C'en est apparemment fini de la résistance prussienne. Seule la Russie lui résiste encore sur le continent.
Dans les faits, les leçons de la déroute militaire seront tirées par le général Gerhard von Scharnhorst, assisté du général August von Gneisenau, ainsi que par leur élève Karl von Clausewitz.
Nommé président de la Commission de réorganisation militaire l'année suivante puis ministre de la Guerre, Scharnhorst, qui est issu d'un milieu paysan très pauvre, renforce la discipline et l'impose aux plus hauts gradés. Il ouvre l'accès au corps des officiers à tous les citoyens par voie d'examen.
Il contourne la limitation d'effectifs à 42 000 hommes imposée par la convention d'évacuation de septembre 1808 en formant des réserves, les « Krümper », par un système de rotation rapide (un dispositif similaire sera repris par Hitler dans les années 1930).
Reprenant du service pendant la campagne d'Allemagne, il meurt de ses blessures le 28 juin 1813. Mais ses efforts seront couronnés de succès un demi-siècle plus tard avec la victoire de l’armée prussienne sur son homologue autrichienne à Sadowa, suivie de ses victoires sur l’armée française en 1870.
Les noms de Scharnhorst et Gneisenau restent connus pour avoir été donnés à deux croiseurs de la marine allemande qui s’illustrèrent pendant la Première Guerre mondiale à la bataille de Coronel.
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