1er décembre 1789

Les Français découvrent la guillotine

Le 1er décembre 1789, le député Joseph Guillotin, docteur de son état, suggère à la tribune de l'Assemblée constituante que soit introduite l'égalité de tous les citoyens devant le juge.

« Les délits du même genre seront punis par le même genre de peine, quels que soient le rang et l'état du coupable, écrit-il dans son projet de loi. Dans tous les cas où la loi prononcera la peine de mort, le supplice sera le même (décapitation), et l'exécution se fera par un simple mécanisme ».

Sa proposition va déboucher sur une machine qui connaîtra très vite une immense notoriété et portera, à son grand désappointement, son nom : la guillotine.

André Larané

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Égalité devant la mort

À la suite de cette séance et sur une proposition du député Le Peletier de Saint-Fargeau, l'Assemblée constituante édicte le 3 juin 1791 que « tout condamné à mort aura la tête tranchée » (article 3 du Code pénal). À noter que les députés repoussent une suggestion visant à abolir la peine de mort, émanant de... Maximilien de Robespierre.

Dans la foulée, l'Assemblée demande à Antoine Louis, secrétaire perpétuel de l'Académie de chirurgie et ami de Guillotin, de mettre au point la machine à exécuter.

Le chirurgien s'inspire de mécanismes déjà bien connus plusieurs siècles auparavant, comme l'attestent des gravures italiennes ou allemandes de la Renaissance. Il reprend une machine d'origine écossaise, surnommée the Maidden (« la Vierge »), avec un tranchoir qui tombe entre deux montants en bois, sur le cou du condamné.

Antoine Louis améliore son mécanisme avec le concours d'un mécanicien allemand, Tobias Schmidt. Il remplace en particulier le couperet en forme de croissant par un couperet en forme de trapèze. L'idée viendrait, dit-on, du roi Louis XVI, habile serrurier de son état.

La machine assure selon ses promoteurs une mort immédiate et sans souffrance, à la différence de la décapitation à la hache ou à l'épée (la « décollation », privilège des nobles) ; à la différence également de la pendaison, de la roue ou, pire, de l'écartèlement, supplices réservés aux roturiers.

Elle est essayée à Bicêtre sur des moutons et des cadavres. Nicolas-Jacques Pelletier, en fait les frais pour la première fois le 25 avril 1792. C'est un voleur de grand chemin qui a frappé un citoyen pour lui extorquer ses assignats.

La machine est d'abord appelée « louisette » ou « louison ». Puis, les journalistes parlementaires, mécontents du docteur Guillotin qui, à l'Assemblée, en sa qualité de questeur, leur demandait de bien se tenir, la baptisent « guillotine », non sans s'attirer les protestations de l'intéressé.

Dans l'argot des rues, la machine sera aussi surnommée le « rasoir national » ou la « Veuve », parfois «charlot» d'après le prénom de plusieurs bourreaux de la « dynastie » des Sanson. Les magistrats préfèrent quant à eux le délicat euphémisme : « bois de justice ».

Pendant la Grande Terreur, en 1793 et 1794, environ 17 000 condamnés auront à la connaître.

Elle recueillera en France un vif succès populaire jusqu'au 29 juin 1939, date à laquelle les exécutions cessent d'être publiques.

La guillotine au musée

La guillotine figure parmi les « cadeaux » des armées de la Révolution et de l'Empire aux pays conquis. C'est ainsi qu'elle sera utilisée jusqu'au milieu du XXe siècle comme instrument d'exécution dans certains cantons suisses, comme en Belgique et surtout en Allemagne. Le IIIe Reich hitlérien fera un usage intensif de cette machine rebaptisée Fallbeil et plusieurs milliers d'opposants auront à en connaître le tranchant. Parmi eux Sophie Scholl et ses amis de La Rose Blanche ou encore Franz Jägerstätter.

La dernière exécution remonte en France au 10 septembre 1977. Le 9 octobre 1981, le gouvernement français se met au diapason du reste de l'Europe démocratique en abolissant enfin la peine de mort. La guillotine devient un objet de musée.

Notons aussi que la dernière exécution politique remonte en France au 11 mars 1963. La victime, Jean Bastien-Thiry, fut non pas guillotinée mais fusillée, comme pour mieux démontrer le caractère particulier de son acte.

Un philanthrope oublié

Né à Saintes en 1738, dans le ménage d'un magistrat, l'heureux docteur Joseph-Ignace Guillotin est un franc-maçon et un philanthrope bon teint.

En 1788, il rédige avec Sylvain Bailly les cahiers de doléances des 60 districts de Paris et s'expose à la reconnaissance de ses concitoyens en publiant aussi la « Pétition des six corps des marchands de Paris », où il demande le doublement du nombre de députés du tiers état et le vote par tête aux états généraux de 1789. 

Sa pétition est condamnée pour la forme par le Parlement mais elle lui vaut d'être élu haut la main comme député du tiers état de Paris aux états généraux de mai 1789.

À la Constituante, il siège au Comité de mendicité et tente, mais en vain, de réformer les hôpitaux. Incarcéré sous la Terreur, il est heureusement libéré à la chute de Robespierre. 

Sous l'Empire, il diffuse en France la vaccination de la variole et met en oeuvre le premier programme de Santé publique. Il fonde la Société des Premiers Médecins de Paris, à l'origine de l'Académie de Paris. 

Jusqu'à sa mort, en 1814, il regretta d'avoir laissé son nom à la fameuse machine, et, par dépit, n'a jamais voulu la voir en action.

Publié ou mis à jour le : 2022-12-05 10:56:26
Romain (04-12-2022 16:59:04)

Joseph-Ignace avait une bonne tete pour les bonnes recherches sur la variol et le reste car décédé a l'âge de 90 ans pas mal de bandits,violeurs,voleurs,ministres ont perdus la tete et les révolutionnaires étaient débout NON??? pas comme maintenant!!!!!!

Liger (15-03-2020 20:24:06)

Le phrase « Tout condamné à mort aura la tête tranchée » se trouvait non dans le code civil mais dans le code pénal (article 3 puis 12).
NB : cette phrase est un alexandrin en bonne et due forme (deux hémistiches) mais j'ignore si c'était voulu.

Remarque culturelle : c'est très probablement parce que la Révolution française, du moins la période de la Convention, ont toujours représenté un répulsif absolu pour les Anglo-Saxons que la guillotine ne fut jamais utilisée aux États-Unis alors que c'est probablement le moyen d'exécution qui présente le moins de risques de souffrances additionnelles qui surviennent lors de ratages. Beau sujet pour les historiens, sociologues et anthropologues.
NB : pour dissiper tout malentendu, je précise que je ne suis pas partisan de la peine de mort.

Mylène (28-11-2011 17:50:56)

C'est ainsi que la guillotine sera utilisée jusqu'au milieu du XXe siècle comme instrument d'exécution dans certains Länder allemands telle la Bavière : Hitler ne l'avait il pas utilisée a des fins de couper l'esprit des opposants ? Je pense notamment à ces jeunes étudiants de la résistance allemande qui furent accusés de trahisons puis guillotinés.. On a la même configuration sous Mitterand garde des sceaux à l'apoque coloniale qui usa du même procédé pour l'exécution de révutionnaire algériens, et français d'ailleurs lol

JPL (28-09-2008 12:21:17)

La décollation était un "privilège" dont la valeur dépendait de l'habileté de l'exécuteur. Il semble qu'il n'était pas rare qu'il dût s'y reprendre à plus d'une fois pour arriver à ses fins. Et pour les "Grands des Grands" on faisait venir, parfois de bien loin, un bourreau réputé pour son habileté.
En France à l'époque de Louis XIII, la décollation / décapitation était effectuée à Toulouse grâce à une machine ressemblant assez bien à la guillotine. Voir par exemple le site très bien documenté : http://pagesperso-orange.fr/compilhistoire/guillotine.htm .
HÉRODOTE (http://www.herodote.net/almanach/jour.php?ID=2034) mentionne l'éxécution du duc de Montmorency le 16 octobre 1632 à Toulouse. L'exécution a été réalisée par la "machine à décapiter".

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