1er février 1662

Le pirate Koxinga s'empare de Formose

Le 1er février 1662, le pirate chinois Koxinga s'empare de la citadelle hollandaise Zeelandia, au sud de l'île de Formose, après neuf mois de siège.

Les Portugais ont été au siècle précédent les premiers Européens à poser le pied sur cette grande île, à 150 km seulement des côtes chinoises mais encore presque exclusivement peuplée d'Aborigènes de type malais.

Séduits par son charme, ils lui ont donné le nom de « Formosa » (la Belle). Ce nom, Formose en français, lui est resté jusqu'au XXe siècle, époque à laquelle elle a pris le nom chinois de son ancienne capitale : Taïwan.

Carte ancienne de Taiwan (Formose)

La Chine se replie

À cette époque-là, les Portugais mais aussi les Espagnols, les Anglais, les Hollandais et les Français parcouraient les océans en quête d'épices et de métaux précieux.

Les Chinois, sous les empereurs Ming, ne les avaient pas attendus pour organiser eux-mêmes d'audacieuses expéditions maritimes dans l'Océan indien et jusqu'aux rives de l'Arabie. Ils disposaient pour cela de la boussole et de magnifiques jonques à voiles lattées, avec des gréements de haute mer, incapables toutefois de louvoyer contre le vent.

Mais au début du XVIIe siècle, lassés par les expéditions lointaines, les Ming se replient sur le continent et suppriment même leur police des côtes.

Pirate à l'honneur

Dans la mer de Chine, la piraterie en provenance du Japon s'en trouve encouragée. C'est l'heure de gloire pour un pirate chinois du nom de Tcheng Tche-long, originaire d'une humble famille de pêcheurs du Foukien. À partir de 1625, il pille allègrement les villes du littoral puis il séjourne à Macao, où il est baptisé par les Portugais, ce qui lui vaut d'être plus tard connu sous le nom de Nicholas Iquan. Il s'établit ensuite chez les Espagnols de Manille puis au Japon où il se marie.

De retour en Chine, Tcheng Tech-long se met au service de l'empereur Chongzhen qui le nomme... amiral de la flotte impériale. Mais le 3 avril 1644, l'empereur se suicide tandis que Pékin est investie par un chef de bande.

Les farouches Mandchous du nord arrivent à la rescousse des armées impériales. Ils en profitent pour éliminer les Ming et fonder leur propre dynastie. Elle durera jusqu'à la fondation de la République chinoise.

Une dynastie de pirates

Fidèle à l'ancienne dynastie, Tcheng Tech-long (alias Nicolas Iquan) entre en guerre contre les usurpateurs. Mais il est capturé par trahison, transféré à Pékin et meurt assassiné en 1646.

Le pirate laisse un fils qu'il a eu de son épouse japonaise. Ce fils, né le 28 août 1624 à Hirado, près de Nagasaki, porte le nom chinois Tcheng Tch'eng-kong (ou Chang Cheng-kung) mais il restera dans l'Histoire sous le nom que lui ont attribué les Européens : Koxinga.

Koxinga reprend le combat de son père contre les empereurs mandchous et la bureaucratie de Pékin. Comme beaucoup de riches Chinois du Sud, il fait partie d'une association secrète fidèle à l'ancienne dynastie, la « Triade ». De 1646 à 1658, il écume les côtes du Foukien et les îles d'Amoy (Hiamen) et Quemoy (Kinmen).

Koxinga remonte même le fleuve Yang-tseu kiang et tente sans succès d'enlever aux Mandchous la capitale de la Chine du Sud, Nankin.

Roi de Formose

Comme l'empire mandchou résiste à ses attaques, Koxinga tourne ses regards vers Formose où les Hollandais se sont établis une quarantaine d'années plus tôt en profitant des difficultés des Ming. L'île, très montagneuse et d'une surface de 36 000 km2 (l'équivalent de la Belgique ou des Pays-Bas) est surtout peuplée d'aborigènes. Elle compte aussi quelques poignées de colons chinois arrivés quelques siècles plus tôt et d'autres, du Fujian voisin, amenés par les Hollandais pour développer l'agriculture.

Koxinga apprend que la flotte hollandaise, sous le commandement de Jan van der Laan, a quitté l'île, ne laissant qu'une petite garnison dans la citadelle de Zeelandia. Le pirate veut profiter de l'aubaine. Il rallie Formose sans attendre avec 900 navires et 30 000 hommes et met le siège devant la citadelle.

Après la prise de celle-ci, il se proclame roi de l'île et entreprend sa soumission. Mais il meurt le 23 juin de la même année, à 38 ans, peut-être par suicide, après avoir essuyé de nombreux revers. Son fils lui succède à la tête du royaume insulaire jusqu'à sa propre mort, en 1681. Deux ans plus tard, le grand empereur Kangxi reprend le contrôle de l'île.

Koxinga est devenu un héros national à Taïwan car il symbolise la volonté d'indépendance de l'île, contrariée par l'arrivée de Chiang Kai-chek et des nationalistes chinois défaits par Mao, le 8 décembre 1949.

C'est à lui aussi que l'île doit d'avoir aujourd'hui une population très majoritairement chinoise. Dans son sillage, des millions d'émigrants pauvres appelés « Hakkas » ont quitté la Chine continentale, en quête d'un avenir meilleur. Disséminées dans le monde entier, leurs communautés actives et prospères forment aujourd'hui une véritable Chine de l'extérieur.

Une partie de ces « Hakkas » se sont installés à Formose qu'ils ont complètement sinisée. Les Aborigènes, massivement christianisés, sont aujourd'hui moins d'un demi-million sur 23 millions d'habitants (2015).

Fabienne Manière
Publié ou mis à jour le : 2022-08-23 15:56:29

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