12 septembre 1642

Conspiration et mort de Cinq-Mars

Le 12 septembre 1642, place des Terreaux à Lyon, Henri de Cinq-Mars, à peine âgé de 22 ans, périt sur l'échafaud ainsi que son ami François de Thou. Ces deux exécutions mettent un terme à la dernière conspiration ourdie contre Richelieu.

Jean Brillet
Petites intrigues de Cour

En cette fin d'année 1639, le roi Louis XIII (38 ans) faisait une cour assidue et platonique à Marie de Hautefort, demoiselle d'honneur de la reine Anne d'Autriche, et se liait en même temps d'une amitié passionnée et exclusive pour le jeune Henri Coiffier de Ruzé d'Effiat, marquis de Cinq-Mars (prononcer Sainmar).

Le puissant cardinal Richelieu, qui avait gagné depuis longtemps la confiance du roi, prit le jeune marquis sous son aile pour s'assurer des fréquentations du monarque.

Mais non content d'avoir obtenu la charge de Grand Écuyer (ce qui, suivant une coutume de la cour, lui valut le surnom de « Monsieur le Grand »), Cinq-Mars voulait maintenant épouser la princesse de Mantoue Marie de Gonzague, une des plus riches fortunes du royaume. Elle avait huit ans de plus que son prétendant.

Certes, le bel Henri de Cinq-Mars était le fils du maréchal d'Effiat, mais la distance nobiliaire avec sa prétendante était astronomique et Monsieur le Grand demanda naïvement l'appui de son protecteur pour la diminuer en tentant d'obtenir un duché-pairie.

Richelieu s'y opposa et Henri de Cinq-Mars, de dépit, bascula dès lors dans le camp de ses ennemis. 

Or, le Cardinal vivait dans l'angoisse d'une sédition des Grands. Sa crainte n'avait rien d'un fantasme. La dernière révolte en date était celle du duc de Bouillon, du duc de Guise et de Louis de Bourbon, financée par l'Espagne, en 1641.

Conspiration en marche

Devenu l'ennemi du Cardinal, Cinq-Mars, par sa position de favori, ne devait pas tarder à être contacté par les opposants au ministre.

Parmi les principaux conjurés, on devait trouver l'inévitable duc d'Orléans, Gaston, frère du roi, surnommé Monsieur. Mais aussi Louis d'Astarac, marquis de Fontrailles, Anne d'Autriche et François-Auguste de Thou, jeune conseiller au Parlement et tout dévoué à la reine. Et encore le duc de Bouillon.

François de Thou prit contact avec le duc de Bouillon, alors en Limousin. À peine « accommodé » avec le roi pour l'épisode de la Marfée, le duc hésita.

Mais une lettre de Richelieu l'informa qu'il était chargé d'aller commander les armées d'Italie.

Ceci le décida à revenir à la Cour où Cinq-Mars l'informa des avancées du complot. Jugeant que la place de Sedan ne pouvait soutenir le siège des armées royales, il estima que l'appui d'une armée étrangère était nécessaire.

Gaston et Bouillon rédigèrent un projet de traité avec l'ennemi, le roi d'Espagne Philippe IV, en guerre avec la France depuis le 19 mai 1635.

Il prévoyait que Philippe IV fournirait 12 000 fantassins, 6 000 cavaliers, 400 000 écus pour payer la solde d'une armée levée en France et une garnison pour Sedan. Gaston, de son côté, signerait la paix au nom de la France et chacun restituerait toutes les villes conquises. La France renoncerait à ses alliances avec la Suède et les princes de l'empire allemand. Autant dire que l'on offrait la victoire à l'Espagne. 

On mesure ici la gravité de la trahison dans laquelle s'était engagée la tête folle d'Henri d'Effiat pour l'amour de sa princesse. Le texte néanmoins précisait : « On déclare unanimement qu'on ne prend en ceci aucune chose contre le Roi Très Chrétien et au préjudice de ses États, ni contre les droits et autorités de la reine Très Chrétienne régnante, mais au contraire on aura soin de les maintenir en tout ce qui lui appartient ». La conspiration était bien dirigée contre Richelieu.

Alors qu'il se trouvait à Arles, Richelieu reçut, le 11 juin 1642, un message de la plus haute importance. C'était une copie du traité félon. Enfin la preuve salvatrice était entre ses mains !

On ne sait, au juste, qui informa le Cardinal. Il semble bien cependant que ce fut Anne d'Autriche qui porta ce coup mortel à la conjuration. On peut tenter de comprendre son geste. L'état de santé du roi (bien qu'âgé seulement de 41 ans) et l'âge du petit dauphin, Louis-Dieudonné, né le 5 septembre 1638, permettaient de penser que l'on s'acheminait avec une quasi-certitude vers une période de régence.

Louis XIII se laissa convaincre de signer l'arrestation de MM. de Cinq-Mars, de Thou et Bouillon. On imagine l'incrédulité du souverain qui demandera plus tard si l'on n'avait pas mis un nom pour un autre en voyant celui de son favori.

Le 7 juillet, Gaston, le frère cadet du roi, avoua par lettre à Richelieu une extrême douleur pour avoir pris des liaisons et correspondances avec ses ennemis... à son frère, il révéla toutes choses dont il était coupable tout en accusant Cinq-Mars de l'avoir trompé. Il plaida cependant la cause de François de Thou, mais se garda de parler de la reine.​

Le procès des conjurés

En raison de la présence du duc de Bouillon à Pierre-Scize et de Gaston réfugié chez sa sœur Chrétienne, à Annecy, Richelieu choisit Lyon pour le déroulement du procès.

Il s'y rendit par bateau, sur le Rhône, menant sous bonne garde François de Thou. Après une tentative d'évasion manquée, Cinq-Mars fut transféré en carrosse, entouré de six cents gardes, de Montpellier à Pierre-Scize.

Le duc de Bouillon, confronté à Cinq-Mars, déclara ne rien savoir du traité et expliqua qu'il n'aurait livré Sedan « qu'en cas de la mort du roi ». Tout le reste n'aurait été que de la responsabilité de Cinq-Mars.

Le sort de Cinq-Mars était désormais joué, mais les charges manquaient contre François de Thou. Richelieu poursuivait ce dernier d'une haine que les historiens ont du mal à comprendre. Faisant preuve d'un acharnement indigne d'un ministre qui faisait trembler l'Europe, il usa d'un méprisable artifice.

Le 10 septembre, par l'intermédiaire de Laubardemont, homme de Richelieu et membre de la commission, le Cardinal fit croire à Cinq-Mars que de Thou avait avoué sa totale implication. S'il voulait éviter la torture et sauver sa tête, il n'avait qu'à signer un document confirmant les dires de son ami. C'était évidemment un mensonge et Henri tomba dans le piège.

Le jour même, en fin d'après-midi, les condamnés furent menés du Palais vers le lieu du supplice, place des Terreaux. Contrairement à l'usage, ce ne fut pas en charrette mais en carrosse !

Mort à son tour le 4 décembre 1642, Richelieu suivit son ancien protégé de quatre mois. Louis XIII mourut l'année suivante, le 14 mai 1643.

Publié ou mis à jour le : 2021-08-15 19:59:53

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