23 décembre 1588

Le duc de Guise est assassiné !

Le 23 décembre 1588, le duc de Guise Henri le Balafré est assassiné sur ordre du roi Henri III au château de Blois, où se tiennent les états généraux.

La mort du puissant chef du parti catholique amène le roi à se rapprocher de son cousin et successeur potentiel, le protestant Henri III de Navarre, futur Henri IV. Sans que les Français s'en doutent, les guerres de religion qui ont mis à mal le pays pendant deux décennies arrivent à leur terme.


L'assassinat du Duc de Guise,  source : INA
Avantage aux ligueurs

Quelques mois plus tôt, le 12 mai 1588, le roi a été chassé de sa capitale parce qu'à 37 ans, n'ayant pas d'enfant mâle pour lui succéder, il acceptait de laisser le trône, à sa mort, à Henri de Navarre, un protestant  !

Les bourgeois de Paris triomphent. Réunis dans une Ligue catholique, ils se disposent à donner la couronne au duc de Guise (38 ans) ou, à défaut, au cardinal Charles de Bourbon (65 ans), troisième dans l'ordre de succession.

Le 21 juillet, le roi Henri III, réfugié à Chartres, affecte de se soumettre à toutes les conditions de la Ligue et signe l'édit d'Union, en vertu duquel il promet de ne jamais conclure « aucune paix ou trêve avec les hérétiques ». Il feint aussi de se réconcilier avec Henri de Guise et, le 4 août, le nomme lieutenant général du royaume, titre que portait déjà son père.

Retournement de situation

La défaite complète de l'Armada espagnole, quelques jours plus tard, affaiblit brutalement le parti catholique. Le roi en profite pour reprendre la main. Il se rend à Blois, où doivent se réunir les états généraux du royaume, et demande à Henri de Guise de le rejoindre au motif d'assister à l'assemblée.

Mais le duc se montre arrogant et démissionne de sa charge de lieutenant général du royaume, comme s'il n'y attachait pas d'importance. Le roi ne dit mot. Il doit aussi supporter les députés du tiers état, dominés par les fanatiques catholiques. Venus à Blois pour voter des subsides, ceux-là prétendent édicter leurs conditions à leur souverain.

Henri III décide enfin d'agir. Le vendredi 23 décembre 1588, au petit matin, une douzaine de fidèles le rejoignent dans son antichambre. Ils font partie de la garde royale, dite les Quarante-Cinq. Le roi lui-même leur distribue des poignards. Leur chef, Loignac, se cache dans la chambre du roi avec huit complices. Les autres attendent à côté. Le roi se retire.

Bien qu'averti du guet-apens qui le menace, Henri de Guise pénètre dans la chambre où le roi l'a convoqué sous prétexte d'en terminer avec les affaires courantes avant Noël. Le duc est aussitôt percé de coups de poignard. Il résiste tant et plus en criant  : « Eh ! mes amis, à l'aide !... Ah ! messieurs, quelle trahison... Miserere mei, Deus ». Enfin il consent à mourir.

Quand le roi rentre dans la chambre et voit ce colosse de près de deux mètres étalé de tout son long au pied de son lit, la chronique lui prête cette réflexion  : « Mon Dieu, qu'il est grand  ! Il paraît même plus grand mort que vivant  ! » Là-dessus, il se précipite chez sa mère, lui déclarant : « Madame, je suis roi de France : j'ai tué le roi de Paris ».

Ce à quoi Catherine de Médicis, en bonne politique, aurait répondu : « C'est bien taillé, mon fils, maintenant il faut recoudre ».

Le lendemain, c'est au tour du cardinal Louis de Lorraine, le frère du Balafré, d'être à son tour assassiné. Son corps est brûlé et jeté dans la Loire (ce refus de sépulture témoigne de la haine qui agite les esprits). Les chefs de la Ligue sont arrêtés. Parmi eux le vieux cardinal Charles de Bourbon, le prince de Joinville, la duchesse de Nemours, le duc d'Elbeuf, le comte de Brissac...

Le camp catholique, sonné, ne désarme pas. Paris, aux mains des ligueurs, s'insurge et proclame la déchéance d'Henri III et bien sûr de son héritier légitime le plus proche, le protestant Henri de Navarre.

Le Conseil des Seize (autant que de quartiers à Paris) donne au duc de Mayenne, frère du duc de Guise, le titre de lieutenant général du royaume. Il s'agit ni plus ni moins d'un renversement de la dynastie des Valois avec en ligne de mire l'accession au trône d'un Guise.

Les troupes espagnoles d'Alexandre Farnèse campent à Paris et Rouen, en soutien des insurgés catholiques.

Victoire de la raison d'État

Sans tarder, le roi s'allie à son successeur potentiel, le protestant Henri de Navarre. Les deux cousins se rencontrent à Plessis-lès-Tours le 30 avril 1589 et entreprennent ensemble le siège de Paris.

Mais le 1er août 1589, alors qu'il se tient sur sa chaise percée, à Saint-Cloud, le roi est assassiné par un moine dominicain de 22 ans, Jacques Clément, fanatique aux ordres de la Ligue catholique. Il a la force de retirer le couteau de sa plaie et de blesser son assassin, lequel est tué sur place par les gardes de service.

Sur son lit de mort, Henri III convoque en urgence son cousin Henri de Navarre. Le lendemain, il ordonne aux nobles de son entourage de prêter serment de fidélité à son successeur légitime, le futur Henri IV, présent à ses côtés. Henri III (38 ans) expire enfin, laissant la couronne à son cousin, de deux ans plus jeune.

De leur côté, les conjurés catholiques, avec l'accord secret du pape, proclament l'avènement du cardinal Charles de Bourbon, oncle d'Henri IV, sous le nom de Charles X. La tentative reste sans lendemain, le vieux cardinal préférant reconnaître Henri IV. C'est à ce dernier que reviendra la gloire de mettre fin aux guerres de religion...

 
Publié ou mis à jour le : 2023-12-26 23:30:36
Michael (26-12-2023 23:43:02)

Je regrette que l'article ne cite pas la réaction de Catherine de Médicis de la Tour d'Auvergne : "C'est bien taillé mon fils, maintenant il faut recoudre". Une réaction de grande souveraine, à l'image de ce pont-galerie qu'elle fit bâtir à Chenonceaux d'une rive à l'autre du Cher, et qui cinq siècles plus tard, "cousu" la résistance de la France occupée à celle de la France libre. Il faut bien de l'humilité et de l'espérance, un caractère vraiment chrétien, pour accepter d'avaler d'amères couleuvres, mais rétablir du lien et détourner la confrontation de forces antagonistes vers la réalisation d'un but commun. Grazie Regina, Lei é un esempio per tutti noi, perche il Suo mondo di ieri non é diverso del mondo di oggi.

Marc-aurel (06-01-2017 01:42:04)

Non Monsieur LECOCQ, c'était bien sous le n° III qu'Henri était roi de Navarre!... Et ensuite roi de France sous le n° IV.

André Lecocq (26-02-2015 12:48:23)

"...son héritier légitime le plus proche, le protestant Henri III de Navarre." Je suppose qu'il s'agit d'Henri IV de Navarre!

l'homme dans la lune (16-12-2007 21:38:25)

Il me semble que cette présentation sous-estime les questions posées par ceux qui se sont opposés à Henri III. Des travaux historiques tels que ceux de Jean-Marie Constant ont montré que les Français souhaitaient majoritairement une réduction des pouvoirs du roi et un contrôle de celui-ci par les états généraux. C'est aussi cela qui est mort avec le Duc de Guise en 1588.

Voir ce dossier sur le sujet : http://www.lesbonsdocs.com/docs/ligueetetatsgeneraux.htm.
On y trouve cette synthèse des cahiers de doléances de 1588

"Dans l'ensemble, les cahiers ligueurs souhaitaient donc enlever un certain nombre de pouvoirs au souverain pour les rendre à la société civile.
C'est d'ailleurs ce thème si français de la limitation de l'emprise de l'État qui domine à travers tous les cahiers. En effet, tous demandèrent la suppression de quantité d'offices, certains voulant annuler les créations en remontant jusqu'à Louis XII (1498-1515), d'autres à François Ier (1515-1547), Henri II (1547-1559) et Charles IX (1559-1574), mais le rêve politique des Français, exprimé à la veille des états généraux de 1588, résidait dans de vastes autonomies où la société civile prendrait une part importante à son propre gouvernement. Ainsi, plus de vénalité dés charges, peu d'officiers de judicature, pas du tout d'officiers de finances ni de financiers, mais des tribunaux d'exception pour juger ceux qui s'enrichiraient au détriment des finances publiques, un clergé largement choisi par les paroissiens ou par leurs représentants, des gouverneurs et des chefs de guerre recrutés dans les provinces et qui mobiliseraient des soldats du cru, des nobles vivant selon les traditions chevaleresques, des villes s'administrant elles-mêmes suivant les traditions, le tout bien sûr et d'abord dans la plus totale adhésion à la religion catholique,
voilà les grandes lignes du programme révélé par les cahiers de doléances ligueurs des trois ordres."

Herodote.net vous répond :
La thèse ci-dessus reflète un aspect commun à toutes les frondes nobiliaires : le désir d'abaisser le pouvoir royal... au profit des nobles. Il est excessif d'y voir un combat pour la démocratie.

Respectez l'orthographe et la bienséance. Les commentaires sont affichés après validation mais n'engagent que leurs auteurs.

Actualités de l'Histoire
Revue de presse et anniversaires

Histoire & multimédia
vidéos, podcasts, animations

Galerie d'images
un régal pour les yeux

Rétrospectives
2005, 2008, 2011, 2015...

L'Antiquité classique
en 36 cartes animées

Frise des personnages
Une exclusivité Herodote.net