13 septembre 1513

Les Suisses lèvent le siège de Dijon

Le 13 septembre 1513, au bout de cinq jours seulement, les Suisses lèvent le siège de Dijon, capitale de la Bourgogne. Le duc Louis II de La Trémoille, gouverneur de la ville, les convainc de se retirer en leur offrant l'assurance d'une rançon colossale.

Avec ce tardif épisode des guerres de Bourgogne, c'en est fini des menaces d'invasion qui pesaient sur la France et du conflit entre celle-ci et la Sainte Ligue fomentée par le pape Jules II. Les guerres d'Italie entamées près de vingt ans plus tôt connaissent une pause que le roi Louis XII va mettre à profit pour restaurer son royaume et ses affaires familiales.

Ysaline Homant
Tapisserie du siège de Dijon, 1513 (musée des Beaux-Arts, Dijon)

Une Sainte Ligue contre la France

Deux ou trois ans plus tôt, le pape, plus épris de conquêtes de que prières, s'est retourné contre les Français, qualifiés de « Barbares du Nord ». Décidé à les chasser d'Italie, il a noué contre eux une alliance avec la République de Venise, les cantons helvétiques, le roi de Naples Ferdinand II d'Aragon, l'empereur Maximilien 1er de Habsbourg et même le roi d'Angleterre Henri VIII.

À l'été 1512, les Français évacuent l'Italie. Jules II meurt peu après, mais la Sainte Ligue perdure : le roi d'Angleterre convainc le titulaire du Saint Empire d'envahir la France par le Nord et l'Est, avec le concours des Suisses, redoutables fantassins mercenaires.

Négligeant cette menace, le roi de France laisse 15 000 hommes sur la Somme pour protéger Paris d'une agression anglaise venue du Nord et tente une nouvelle fois d'occuper le Milanais. Mais le 6 juin 1513, à Novare, entre Turin et Milan, son armée forte de plus de dix mille hommes,  sous le commandement du vicomte Louis de La Trémoille (53 ans) et d'un condottiere italien, Jacques de Trivulce (73 ans), se fait étriller par les Suisses et les Milanais, commandés par le duc Maximilien Sforza (20 ans).

Pendant ce temps, en juillet 1513, Henri VIII débarque avec 35 000 hommes à Calais, possession anglaise. Il est rejoint par l'empereur et cinq ou six mille hommes supplémentaires. Les troupes se dirigent vers Thérouanne, un évêché sur la Lys (aujourd'hui une très modeste bourgade), enclave française en terre d'Empire. La ville se rend le 23 août 1513 après un mois de siège et est rasée.

Henri VIII, abandonné par son allié, poursuit sa marche vers une autre enclave française, Tournai, dont il s'empare le 23 septembre. Là-dessus, n'ayant nulle envie de s'éterniser sur le Continent pendant l'hiver, il s'en retourne en Angleterre. Paris peut respirer.

Dijon sauvée par l'or et Notre-Dame

Les Suisses, autre composante de la coalition anti-française, se rassemblent à Zurich. Au nombre de 30 000 environ, ils se dirigent vers Besançon et la Franche-Comté, un territoire qui est passé sous la tutelle de Maximilien de Habsbourg en 1483, à la suite de son mariage avec Marie de Bourgogne, fille unique et héritière du dernier duc de Bourgogne Charles le Téméraire

Ils sont rejoints par un contingent franc-comtois commandé par Guillaume de Vergy et le duc de Wurtemberg Ulrich VI puis se dirigent vers Dijon en pillant tout ce qu'ils trouvent sur leur passage.

Pendant ce temps, revenu de Novare, Louis de La Trémoille, que le roi a nommé gouverneur de Dijon en 1506, prépare la défense de la ville. Il confie la garde des fortifications à un contingent de mercenaires et fait raser et incendier les faubourgs afin que l'ennemi ne puisse s'y faufiler en cachette et rapprocher ses canons des fortifications.

Les ennemis se pointent enfin le 8 septembre. Ils installent leurs batteries à l'est de la ville, en un lieu appelé aujourd'hui « fontaine des Suisses », et également à l'ouest, dans la chartreuse de Champmol.

La Trémoille et ses troupes sont résolus à défendre la ville jusqu'au bout mais le gouverneur doute non sans raison de la fidélité des habitants à la dynastie des Valois et de leur détermination à résister. Sachant que l'assaut a été prévu le lundi 12 septembre, il entame des négociations et se rend le matin du jour fatidique dans le camp ennemi.

Habilement, il obtient des capitaines suisses un traité de paix par lequel il promet de leur verser 400 000 écus et s'engage au nom du roi Louis XII à renoncer à toute nouvelle intrusion dans les affaires italiennes. 

Les bourgeois de Dijon donnent un acompte de 8 000 écus et livrent cinq otages dont l'échevin Philibert Godran. Les Suisses, satisfaits de l'aubaine, s'en retournent dans leurs montagnes, non sans piller au passage les  vignobles de la région.

Mais le roi, qui n'entend pas renoncer à l'Italie, refuse de ratifier le traité et de verser le complément de la rançon, ce qui vaudra à son successeur François 1er d'affronter une nouvelle fois les Suisses deux ans plus tard, à Marignan. Précisons aussi qu'en dépit de la rupture du traité, les otages seront libérés grâce à l'intervention de La Trémoille et de leurs familles.

Négociation entre La Trémoille et les capitaines suisses, tapisserie du siège de Dijon, 1513 (musée des Beaux-Arts, Dijon)
Sainte protection

Les Dijonnais, voyant s'éloigner contre toute attente les redoutés montagnards suisses, vont rendre grâce de leur salut à Notre Dame de Bon-Espoir. Cette statue en bois de la Vierge, d'époque romane, orne l'église Notre-Dame et, pendant le siège, avait été transportée en procession à travers la ville.

Les bourgeois lancent une souscription, peut-être à l'initiative de l'échelin Philibert Godran rendu à la liberté, afin d'offrir à ladite église une monumentale tapisserie qui raconte le siège, la procession et la négociation finale. Cette œuvre remarquable est visible aujourd'hui au musée des Beaux-Arts.

Les Dijonnais n'ont pas tout à fait oublié de remercier leur gouverneur. Celui-ci a laissé son nom à une artère de la ville, le boulevard de La Trémouille.

Bibliographie

1513, l'année terrible : le siège de Dijon (éditions Faton, 2013,  250 pages, 45 euros) À l'occasion du 500e anniversaire du siège de Dijon, les éditions Faton, elles-mêmes installées dans la cité ducale, ont publié un beau livre consacré à l'événement : 1513, l'année terrible : le siège de Dijon, sous la direction de Laurent Vissière, Alain Marchandisse et Jonathan Dumont (250 pages, 45 euros).

Illustré de belles reproductions et de cartes détaillées, avec aussi des documents d'époques (lettres…), cet ouvrage présente l'Europe de la première Renaissance et revient sur la genèse du conflit, ce qui en fait aussi un ouvrage de référence pour les historiens et les amateurs éclairés... 

Publié ou mis à jour le : 2019-05-14 16:04:52

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