La dynastie Ming (1368-1644)

Un chef de bande redonne sa splendeur à la Chine

Dans la nuit du 10 septembre 1368, l'empereur Shun-ti est averti de l'arrivée d'une troupe d'insurgés. Il quitte en hâte son palais de Pékin et se réfugie en Mongolie avec ses mignons et ses trésors. Cette fuite piteuse met fin à la dynastie mongole des Yuan, fondée un siècle plus tôt par Kubilai Khan, un petit-fils de Gengis Khan. Elle inaugure une nouvelle dynastie, proprement chinoise, la dynastie Ming...

Hongwu (21 octobre 1328 ; 24 juin 1398), fondateur de la dynastie Ming, peinture anonyme.

La fin des Yuan

La dynastie mongole des Yuan a été emportée en une quinzaine d'années suite à l'action souterraine d'une secte bouddhiste, le Lotus blanc, dans la région méridionale de Canton. Cette secte millénariste annonce la venue du Messie bouddhiste, le Meitreya, qui délivrerait la Chine des Mongols.

Li Xian ou Li Tieguai, l'un des huit Immortels, dynastie Yuan, Ya Hui (ou Yan Hui rouleau mural), Taipei, musée national du Palais. Agrandissement : la Cité pourpre interdite, époque Ming, XVe siècle.Parmi les chefs de bande qui se sont soulevés à son appel, le plus habile est Zhu Yuanzhang. Cet ancien bonze, fils de laboureur, l'emporte sur ses rivaux et soumet la Chine centrale. Il installe sa capitale à Nankin. Enfin, il monte sur Pékin à la tête de ses troupes et en chasse les Yuan.

 Zhu Yuanzhang prend le nom de règne Hongwu et fonde la prestigieuse dynastie des Ming (ce nom veut dire « Lumière » en chinois mandarin ; c'est une référence à l'origine mystico-religieuse de la rébellion). Cette dynastie se veut proprement chinoise et non d'origine étrangère comme la précédente.

Pendant les trente années qui lui restent à vivre, Hongwu s'applique à restaurer les valeurs de la Chine traditionnelle et faire oublier l'intermède mongol. Il s'entoure de conseillers bouddhistes mais flatte les lettrés confucéens qui prônent une morale de la tempérance. Comme sa propre tempérance a des limites, il lui arrive à l'occasion de faire exécuter quelques-uns de ces conseillers ou lettrés.

Après l'éphémère règne de son fils aîné, c'est à son cadet, Zhu Di, qu'il revient de porter à son apogée la dynastie Ming et l'empire chinois sous le nom de règne Yongle.

Grandeur des Ming

Né en 1360, Yongle accède au trône en 1403 aux dépens de son neveu. En vingt-et-un ans de règne, il porte la Chine à une dimension qu'elle avait rarement atteinte auparavant. C'est ainsi que le nouveau « Fils du Ciel » rétablit pour quelques années l'hégémonie de la Chine sur l'Annam (Viêt-nam actuel). Il prélève même un tribut sur le Japon.

L'empereur Ming Yongle (Zhu Di de son vrai nom) (2 mai 1360, Nankin ; 12 août 1424, Hailar, Hulunbuir)Dans son souci de mieux surveiller les frontières septentrionales et la Mongolie, il transfère sa capitale, en 1421, de Nankin à Pékin (la « capitale du Nord » en chinois). Cette grande ville proche de la frontière septentrionale était au siècle précédent la résidence des empereurs mongols.

Dans sa nouvelle capitale, Yongle entreprend de grands travaux. Il embellit l'ancienne résidence impériale, concevant une succession de palais et de jardins somptueux. Cet ensemble monumental prend le nom de « Cité violet-pourpre interdite » (en chinois Tseu-kin-tcheng). Son nom fait allusion à la couleur théorique de l'étoile polaire qui est au centre du monde céleste comme la Cité interdite est au centre du monde terrestre (d'après l'historien René Grousset, Histoire de la Chine).

En matière culturelle, l'empereur, bouddhiste lui-même, ordonne de compiler tous les textes de l'école néo-confucéenne. En 1416, il décide que ceux-ci constitueraient désormais la base de l'enseignement.

Yongle ne s'en tient pas là. Pour consolider son empire, développer le commerce avec les autres pays et faire reconnaître sa dynastie par un maximum de souverains étrangers, il organise d'extraordinaires expéditions maritimes qui, malheureusement, resteront sans lendemain.

Faiblesse des Ming

Le conservatisme néoconfucéen reprend le dessus dans l'administration chinoise cependant qu'à la cour de Pékin, les successeurs de Yongle s'amollissent et se laissent chambrer par la camarilla des eunuques.

Cavalier mongol, miniature du XVe-XVIe siècle, dynastie Ming, Londres, Victoria and Albert Museum.En Mongolie, le khan Yésen se montre de plus en plus revendicatif et réclame la main d'une infante chinoise. Ne l'obtenant pas, il commence à ravager les régions frontalières. L'empereur Yingson marche à sa rencontre avec son armée.

L'affrontement, le 8 septembre 1449, se solde par une lourde défaite. Cent mille cadavres chinois, dit-on, pourrissent dans les gorges de Tumu et l'empereur lui-même est capturé. Le khan assiège Pékin mais, ne parvenant pas à prendre la ville, se résout à traiter avec les Chinois. Il libère l'empereur et fait la paix en 1453...

Le long règne de l’empereur Jiajing (1522-1567), qui ne réside pas à la Cité interdite, est parmi les plus despotiques. Un nouveau chef mongol, Altan, arrive aux portes de Pékin. Dans le même temps, les Ming voient émerger un nouveau péril avec l'irruption sur leurs côtes des pirates japonais ! Certains remontent même le Yangzi Jiang jusqu'à Nankin en pillant les alentours.

Portrait de l'empereur Manli, dynastie Ming.L'empereur Wanli, au pouvoir de 1572 à 1620, est qualifié d’« empereur fainéant ». Il se désintéresse des devoirs de sa charge et n'a d'intérêt que pour la construction de son tombeau.

Il doit avec ça faire face à une tentative d'invasion par le Japon lui-même, alors dirigé par l'énergique Hideyoshi. Ce dernier, informé de l'état de déliquescence de la Chine, débarque avec une armée de 200 000 hommes en Corée, entre à Séoul le 12 juin 1592 et se dirige vers la Mandchourie. Mais la résistance coréenne laisse aux Chinois le temps de se ressaisir et les Japonais finissent par rembarquer... Ils patienteront trois siècles avant de renouveler la tentative, avec plus de succès !

Survient enfin une nouvelle menace avec l'irruption des Portugais. En 1511, l'amiral Albuquerque s'était emparé de Malacca, porte d'entrée sur l'Extrême-Orient. Les commerçants portugais, en quête d'épices, obtiennent en 1557 de s'installer à Macao, à l'entrée de la rivière de Canton, la rivière des Perles (Yue Jiang). Dans leur foulée arrivent les missionnaires jésuites.

L'armée de Guyuan (région du Níngxià), vers 1575.

Le 4 janvier 1601, le jésuite italien Matteo Ricci est autorisé à entrer à Pékin et il écrit à l'empereur Wanli en faisant valoir son expertise, car d'ores et déjà, l'Europe a pris le dessus sur la Chine et le reste du monde en matière scientifique : « Votre humble sujet connaît parfaitement la sphère céleste, la géographie, la géométrie et le calcul. À l'aide d'instruments, il observe les astres et sait faire usage du gnomon ». 

La Chine des Ming, 1368-1644 (carte: Alain Houot ; cliquez pour voir la carte agrandie)La Chine prend alors conscience qu'elle n'est plus isolée au centre du monde. Mais rien n'y fait. Incapable de se réformer, la société Ming reste attachée à ses traditions et à son académisme, brillant il est vrai. 

Tianqi (1621-1627) a la particularité d’être un empereur illettré, ce qui le rend inapte aux affaires de l‘État. Installé derrière son établi, il n'a goût que pour la menuiserie et laisse le gouvernement à Wei Zhongxian, un eunuque crédité de la pire réputation de l’histoire chinoise. Le règne de Tianqi s'achève dans la terreur. Pour les Chinois, il ne fait plus de doute que la dynastie a perdu le « mandat du Ciel »...

L’empereur Chongzhen (1628-1644) est le dernier empereur des Ming. Il hérite d’une situation catastrophique, sur tous les plans (famine, vagues de froid, invasions de criquets, épidémie de variole). La menace mandchoue se fait plus précise dans le Nord-Est tandis qu’un chef rebelle Li Zicheng, un ancien berger qui s’est imposé à la tête d’une horde de bandits et de paysans révoltés, fonce sur Pékin. Le 3 avril 1644, il entre dans la ville.

Le 25 avril 1644 est le dernier jour des Ming. Le drame final a tout d’une tragédie grecque. Le matin, l’empereur réunit à la Cité interdite un ultime Conseil avec ses derniers fidèles, silencieux ou en pleurs. Quelques eunuques ont déjà rejoint les rebelles. D’autres décident de se rendre à l’ennemi en ouvrant les portes de la Cité. Les troupes impériales ont fui ou se sont rendues. L’empereur réalise qu’il est seul.

Désespéré, il retourne dans son palais. Il vide plusieurs verres de vin. L’impératrice rejoint en silence ses appartements où elle se pend. L’empereur quitte sa robe impériale à cinq griffes et revêt un manteau rouge et jaune. Seulement suivi par un eunuque, il franchit la porte du Génie militaire, au nord de la Cité interdite. Il se dirige vers la colline du Charbon et se pend à un acacia.

Les farouches Mandchous du nord arrivent sur ces entrefaites sous le prétexte de secourir les armées impériales. Ils en profitent pour fonder leur propre dynastie sous le nom de Qing. Elle durera jusqu'à la fondation de la République chinoise

Publié ou mis à jour le : 2025-04-22 22:06:02
Roland Berger (10-09-2023 14:14:12)

Tout comme le chef de bande appelé David a créé le mythe du peuple juif, puis le peuple juif.

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