Le 1er octobre 1273, les princes-électeurs allemands élisent le comte Rodolphe Ier de Habsbourg à la tête du Saint Empire (plus tard appelé Saint Empire romain germanique).
Cette élection met un terme au Grand Interrègne, une période de 20 ans durant laquelle l'empire germanique est resté sans titulaire, livré aux troubles, aux convoitises et aux querelles.
Elle va permettre aux Habsbourg de poser les fondations de leur immense empire à venir, tout en conduisant les Suisses à prendre leur indépendance. Elle va consacrer surtout la division de l’Allemagne en principautés quasi-indépendantes, l'empereur n'ayant qu'une autorité symbolique.
Le Saint Empire fondé trois siècles plus tôt par Otton le Grand n'a jamais pu devenir un État centralisé mais est demeuré une coquille vide faute d’avoir pu résoudre le problème successoral. C’est ce qui fait sa différence avec le royaume de France dont tous les souverains, d’Hugues Capet à Philippe le Bel, ont eu un fils en mesure de leur succéder, ce qui leur a permis de substituer progressivement le principe héréditaire au principe électif.
Naissance d’un nom
Né le 1er mai 1218, Rodolphe est déjà au moment de son élection un homme mûr de 55 ans. C'est un seigneur doté de terres dans les Alpes, en Suisse alémanique et en haute-Alsace.
Il a été choisi par les membres de la diète en raison même de sa modestie, de préférence aux autres candidats, le roi de France Philippe III le Hardi et surtout l’ambitieux roi Ottokar II de Bohême, devenu par mariage et conquêtes l’un des plus puissants princes allemands.
Il a bénéficié aussi de l’appui de l’Église du fait de son engagement vingt ans plus tôt, en 1254, aux côtés des chevaliers Teutoniques, dans la croisade contre les païens lituaniens. C’est à lui que la place forte de Koenigsberg (la « montagne du roi » en allemand) doit son nom (aujourd’hui Kaliningrad).
Élu selon la tradition roi de Germanie et « roi des Romains » par ses pairs, Rodolphe se fait sacrer à Aix-la-Chapelle trois semaines plus tard mais néglige d'aller recevoir du pape, à Rome, le titre d'empereur. Il se préoccupe assez peu du rêve impérial de ses prédécesseurs, qui étaient plus soucieux d’installer leur autorité sur les riches cités italiennes que sur les princes allemands.
Lui-même se soucie bien davantage d'étendre ses possessions et assurer la grandeur de sa lignée. Il y réussira au-delà de toute espérance...
Mais pour commencer, le nouvel empereur doit combattre Ottokar II, qui ne reconnaît pas son élection. Le roi de Bohème est mis au ban de l’empire et Rodolphe en tire argument pour envahir ses terres. Ainsi acquiert-il la Carniole (l’actuelle Slovénie), la Carinthie, la Styrie et le duché d'Autriche (Österreich ou royaume de l'Est en allemand) dont la capitale, Vienne, connaîtra avec les Habsbourg le prodigieux destin que l'on sait.
Le « lion de Bohème » fait sa soumission et accepte de prêter l’hommage vassalique à l’empereur pour son royaume de Bohème. Mais il se rebelle deux ans plus tard et tente de reprendre l’Autriche.
Les deux rivaux s’affrontent à la bataille du Marchfeld, près de Dürnkrut, au nord-est de Vienne, le 26 août 1278. Ottokar II périt au combat, ce qui permet à Rodolphe de consolider ses conquêtes et d'étendre encore ses possessions vers le Danube.
Une succession difficile
Cette expansion coûte cher à l'empereur et plus encore à ses sujets. Pressurés d'impôts, les montagnards et les bourgeois du lac des Quatre-Cantons se soulèvent contre Rodolphe et ses successeurs. Ils vont se détacher du Saint Empire et de leur révolte va naître la Suisse indépendante.
D'autre part, malgré ses succès (ou à cause d'eux), Rodophe Ier n’arrive pas, comme les anciens empereurs ou les premiers rois capétiens, à faire élire de son vivant son fils aîné Albert, né en 1250 de sa première épouse. Quand il meurt le 15 juillet 1291 à Spire, où il est depuis lors inhumé, la diète élit à sa place Adolphe de Nassau.
Albert de Habsbourg ne se résigne pas. Il rassemble ses partisans et affronte son rival à Göllheim le 2 juillet 1298. Adolphe de Nassau est tué au cours de la bataille et la diète se résigne à remettre sa couronne à Albert, plus chanceux qu'Ottokar II.
Mais dix ans plus tard, le 1er mai 1308, l'empereur est à son tour tué par son neveu et rival Jean de Souabe. Il faudra attendre le XVe siècle et la fin du Moyen Âge pour que les Habsbourg retrouvent la couronne impériale, prestigieuse quoique dénuée de pouvoir.
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