Le choeur et l'avant-nef de la prestigieuse abbatiale de Saint-Denis, dédiée au premier évêque de Paris, sont solennellement consacrés le dimanche 11 juin 1144.
L'énergique abbé Suger, a entrepris quinze ans plus tôt de reconstruire son église abbatiale qui menaçait ruine. Construite quatre siècles plus tôt en style pré-roman, elle avait été dédicacée le 24 février 775 en présence du futur Charlemagne.
À vrai dire, il s'en est tenu à la construction d'un nouveau choeur dans le prolongement de l'abbatiale existante. Pour les fidèles qui entrent dans l'église par sa partie romane, sombre et deux fois moins haute, quel n'est pas alors leur éblouissement quand ils se rapprochent du choeur, inondé de lumière divine et qui semble s'élever vers le ciel !
Pour la consécration de son oeuvre, Suger a invité le roi de France, Louis VII le Jeune, et sa femme, la duchesse Aliénor d'Aquitaine, ainsi que tous les grands personnages du royaume, y compris vingt-quatre évêques et archevêques, sans compter aussi l'archevêque anglais de Cantorbéry.
Tous ces prélats, émerveillés par la lumière des vitraux et l'élancement de la structure, vont regagner leur diocèse avec le désir de reconstruire leur propre cathédrale dans le style particulier de Saint-Denis.
C'est ainsi que ce style architectural, dont les prémices sont apparues en Normandie et à Sens, en Bourgogne, va se diffuser dans le royaume et bien au-delà dans toute l'Europe jusqu'au début de la Renaissance, quatre siècles plus tard.
Il sera joliment qualifié par ses contemporains « architecture de lumière » mais aussi « art ogival » par référence à l'ogive ou à l'arc brisé, ou encore « art français » car il est né au XIIe siècle dans le Bassin parisien, à Sens, Saint-Denis, Laon, Noyon, Paris. Comme tout l'art médiéval, il sera sous la Renaissance baptisé par dérision « art gothique » (c'est-à-dire « à peine digne des Goths »). Au XIXe siècle seulement, on en viendra à distinguer l'art gothique de l'art roman qui l'a précédé.
De l'église de Suger subsistent aujourd'hui d'une part le déambulatoire autour du choeur, avec ses chapelles absidiales, d'autre part la façade occidentale, qui donne sur le parvis, ainsi que les deux travées de la nef attenantes à cette façade.
C'est qu'en effet, la reconstruction de l'église devait se faire sans jamais interrompre les offices quotidiens. Il fallait donc procéder par tranches et toujours ménager un espace libre pour la messe.
Le reste de l'abbatiale romane a été reconstruit bien après la mort de Suger, par les architectes Pierre et Eudes de Montreuil qui ont réalisé de 1231 à 1265 les autres travées de la nef, le transept et le centre du choeur.
Les successeurs de Suger firent ériger aussi les tours de la basilique. Ils veillèrent à ce que l'une d'elles, la tour nord (86 mètres), soit plus haute que les tours de Notre-Dame de Paris (69 mètres) ! Elle fut longtemps en effet l'édifice le plus haut de France et d'Europe, avant d'être démontée au milieu du XIXe siècle pour cause de fragilité.
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Aucune réaction disponible