Erwin Rommel

Benoît Lemay (Perrin, 518 pages,  2009 )

Erwin Rommel

Benoît Lemay démystifie l'aura entourant le général, engagé dans les plus brillantes campagnes allemandes de la Seconde Guerre mondiale.

L'auteur écorne la légende dorée qui a fait de Rommel un héros anti-nazi et un membre actif de l'attentat contre Hitler de juillet 1944.

C'est lors de la Première Guerre mondiale que Rommel montre pour la première fois ses talents de meneur d'hommes. Sur le front italien, à la tête de sa compagnie de chasseurs alpins, il remporte de nombreuses batailles par son impétuosité et son courage. Il est adulé par ses hommes et certains disent de lui : «Le front se trouve là où est Rommel » !

Le futur maréchal révèle durant ce conflit son sens du commandement, mais également une certaine égocentricité, reflétée par la correspondance très fournie qu'il entretient avec sa femme. Cette correspondance, abondamment citée par Benoît Lemay, représente une source de premier ordre dans la compréhension de sa personnalité.

Pendant l'entre deux guerres, il devient directeur d'une école militaire. À ce poste, il se montre compétent et pédagogue auprès des futurs jeunes officiers de la Wehrmacht. Lorsque la dictature hitlérienne se met en place en 1933, Rommel se montre particulièrement enthousiaste.

Une admiration réciproque entre Rommel et le Führer naît au cours de la campagne de France, en 1940, lorsque Rommel, à la tête de sa division de Panzers, perce les lignes françaises et contribue à la victoire finale. La rapidité de ses manœuvres et la vitesse de ses blindés amènent les Français à surnommer sa division : « La division fantôme ». Par ces actions d'éclats, il devient l'officier favori de Hitler.

Goebbels met alors sa machine de propagande en action afin d'en faire une idole populaire et l'incarnation même du soldat idéal du IIIe Reich. Cette notoriété, Rommel l'entretient et y prend goût. Benoît Lemay nous dépeint ainsi le portrait peu flatteur d'un homme au caractère narcissique et obsédé par son avancement dans la hiérarchie militaire.

La gloire dans le désert

En février 1941, Hitler confie à Rommel un commandement en Afrique du Nord afin de soutenir les Italiens aux prises avec les Britanniques en Lybie. C'est à la tête de l'Afrikakorps que va se créer sa légende et cette formidable popularité auprès du peuple allemand. D'une mission d'assistance militaire, Rommel va donner à cette campagne peu ordinaire une dimension glorieuse et épique, marquée par la grande victoire de Tobrouk (Libye).

Les combats se déroulent dans le désert, soldat contre soldat, sans la présence de civils, limitant ainsi les bavures et les exactions habituelles dans les territoires occupés par les armées allemandes. La guerre retrouve sur ce champ de bataille les valeurs chevaleresques où des guerriers se respectent et s'affrontent dans les règles.

Churchill lui même reconnaît les qualités du chef de l'Afrikakorps : «Nous avons contre nous un adversaire très audacieux et très habile, et, puis-je ajouter en dépit des horreurs de la guerre, un très grand général». Ses talents militaires ne peuvent pas tout. Le corps expéditionnaire allemand est submergé par la supériorité numérique des Alliés : la victoire britannique d'El-Alamein et le débarquement américain en novembre 1942 au Maroc marquent le début de la fin de la présence germano-italienne en Afrique.

Bien qu'inéluctable, la retraite de Rommel et des armées allemandes vers la Tunisie est intolérable pour Hitler qui souhaite contenir en Afrique les armées alliées le plus longtemps possible, afin de retarder tout débarquement en Europe. Le chef de l'Afrikakorps passe alors aux yeux du Führer et de l'état-major général comme un défaitiste.

Afin de maintenir son aura et sa popularité, bénéfiques au moral des Allemands, Hitler décide de lui retirer son commandement.
Le chef du IIIe Reich se détourne alors de son général favori, refusant même pendant un moment de lui attribuer une nouvelle affectation. Il le désigne finalement comme organisateur des défenses du mur de l'Atlantique.

Rommel et Walkyrie

Chargé de mettre en place la défense du Reich face à un débarquement allié, Rommel fait preuve dans cette tâche de beaucoup de zèle mais s'oppose sur des questions stratégiques avec son supérieur direct, le maréchal Von Rundstedt, commandant en chef des forces à l'ouest. Son action n'empêche pas les Alliés de réussir le débarquement de Normandie.

Le 17 juillet 1944, le feld-maréchal est grièvement blessé sur une petite route normande par une attaque aérienne. Il est en convalescence en Allemagne lors de l'attentat manqué contre Hitler, acte déclencheur de l'opération Walkyrie, trois jours plus tard.

L'enquête menée par Benoît Lemay sur l'engagement de Rommel aboutit à un jugement sans équivoque : Rommel n'a pas été partie prenante du complot ! Il ne fut jamais, de près ou de loin, membre de cette conjuration. Il garda jusqu'au bout un grand respect pour le Führer, même s'il reconnaissait la nature criminelle du régime et n'adhérait pas à l'ensemble des décisions stratégiques prises par le haut commandement. Mais certains conjurés s'appuyèrent sur cette attitude ambigüe pour l'impliquer et tenter de minimiser leurs actions afin d'éviter la pendaison.

Convaincu de son implication, Hitler donna alors le choix au feld-maréchal : un procès, la condamnation à mort et la déportation de sa famille, ou un suicide et des obsèques nationales. Rommel choisit de se donner la mort et de préserver son honneur. Plus d'un demi-siècle après sa mort, un mystère entoure encore de nos jours les actions du plus célèbre des généraux allemands de la Seconde Guerre Mondiale. Benoît Lemay lève le voile, et le spectacle est convaincant.

Benjamin Fayet

Publié ou mis à jour le : 10/06/2016 09:42:47

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