Dans une déclaration brève et solennelle publiée par le quotidien Libération (13 décembre 2005), 19 des plus grands historiens et intellectuels français dénoncent la réécriture de l'Histoire par le Parlement français, de la loi Gayssot à la loi Vannesse.
Libération, mardi 13 décembre 2005 :
Une pétition pour l'abrogation des articles de loi contraignant la recherche et l'enseignement de cette discipline.
Émus par les interventions politiques de plus en plus fréquentes dans l'appréciation des événements du passé et par les procédures judiciaires touchant des historiens et des penseurs, nous tenons à rappeler les principes suivants :
L'histoire n'est pas une religion. L'historien n'accepte aucun dogme, ne respecte aucun interdit, ne connaît pas de tabous. Il peut être dérangeant.
L'histoire n'est pas la morale. L'historien n'a pas pour rôle d'exalter ou de condamner, il explique.
L'histoire n'est pas l'esclave de l'actualité. L'historien ne plaque pas sur le passé des schémas idéologiques contemporains et n'introduit pas dans les événements d'autrefois la sensibilité d'aujourd'hui.
L'histoire n'est pas la mémoire. L'historien, dans une démarche scientifique, recueille les souvenirs des hommes, les compare entre eux, les confronte aux documents, aux objets, aux traces, et établit les faits. L'histoire tient compte de la mémoire, elle ne s'y réduit pas.
L'histoire n'est pas un objet juridique. Dans un État libre, il n'appartient ni au Parlement ni à l'autorité judiciaire de définir la vérité historique. La politique de l'État, même animée des meilleures intentions, n'est pas la politique de l'histoire.
C'est en violation de ces principes que des articles de lois successives notamment lois du 13 juillet 1990, du 29 janvier 2001, du 21 mai 2001, du 23 février 2005 ont restreint la liberté de l'historien, lui ont dit, sous peine de sanctions, ce qu'il doit chercher et ce qu'il doit trouver, lui ont prescrit des méthodes et posé des limites.
Nous demandons l'abrogation de ces dispositions législatives indignes d'un régime démocratique.
Les signataires :
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Pierre (27-11-2023 10:03:14)
L'historien doit être en mesure de publier des FAITS établis, démontrés et citer ses sources.
LIONEL H (15-12-2006 10:29:06)
Liberté (d'expression) Chérie, te voilà menacée en France...
Heureusement qu'il y a l'Iran où l'on peut discuter librement pendant de belles conférences où règne enfin la liberté d'expression... Heureusement, il y a la Turquie où les 2 derniers best-sellers sont Mein Kampf, et un livre SUR L'ASSASSINAT DU PAPE... Heureusement pour la liberté d expression, LES LOUPS GRIS ONT PU DEFILER DANS LYON LE JOUR MEME DE L'INAUGURATION DU MONUMENT DEDIé AUX GENOCIDES... Quant à l'indépendance des historiens, journalistes ou penseurs, combien se sont indignés pour dire qu'ils ne se reconnaissaient pas dans les dédommagements décrétés au sommet de l'Etat Français du fait de l'occupation de 1940? Combien de journalistes rapportent la destruction de cimetières arméniens en Azerbaidjan (dans le but avoué d'effacer toutes traces de présence arménienne)? Combien de journalistes pour parler de l exode forcé des arméniens de Géorgie?
Enfin, quelle peut être l indépendance des journalistes, historiens ou penseurs QUAND TOUTES LEURS RECHERCHES (ou investigations) ONT BESOIN DE FINANCEMENTS ???
Ma dernière pensée s'envole vers toutes ces victimes des génocides... excusez-nous de débattre encore de la qualification du martyr de vos vies... de l execution de 600 notables en préambule, des incendies d'églises avec des enfants à l'intérieur, des convois dans le désert... par pudeur, refermons le catalogue de ces atrocités...
Ayse M. (16-10-2006 21:58:08)
Merci aussi aux historiens de ne pas oublier les victimes des massacres commis par les milices arméniennes contre les paysans des villages de l'Est anatolien . L'armée ottomane se battait sur d'autres fronts, les villageois n'avaient aucune protection militaire et était à la merci des Arméniens. Les frères à ma grand mère maternelle ont été atrocément tué à la vue de tous les autres villageois (ligotés, attachés à des chevaux et trainés par ces derniers paradant dans le village ). Les femmes étaient violés, massacrés. Aucune différenciation entre hommes, vieillards, enfants. Je pense que les historiens sont au fait de ces massacres bien que quasiment aucun journaliste dans aucun article ces derniers temps ne fassent allusion à ces massacres. Nous aussi nous sommes les descendants de ces familles victimes de massacre, qui ont aussi droit à un devoir de mémoire.
Mémoire ne doit pas signifier la pérpétuation de la haine entre deux peuples d'autant plus que ces descendants sont français (les uns d'origine turque, les autres d'origine arménienne ) et que nous devons avant tout privilégier la cohésion au sein de la nation française. Laissons les historiens mener librement leur recherche et nous éclairer aussi objectivement et impartiallement que possible. Un fait historique mis en lumière par des connaisseurs, des chercheurs (que sont les historiens) est quand même plus acceptable même s'il peut être sujet à controverse qu'une vérité imposée par un groupe de pression et sanctionnée par les mendiants des votes.
baSMADJIAN (15-10-2006 22:47:46)
J'y souscrit également et en tant que Français d'origine arménienne, je ne crois pas que cela fasse progresser la question (arménienne).
Mais que les historiens fassent leur travail.
Je souhaite aussi vous informer que les zones historiques de l'Arménie se trouvant en Turquie ou en Azerbaidjan (république turcophone) sont laissées à l'abandon ou détruites. De magnifiques vestiges de l'histoire arménienne tels que monastères et nécropoles ont été utilisés pour le revêtement de routes. Et ça enlève pas mal de boulot aux historiens.
Pour exemple, je vous invite tous à vous informer sur la nécropole de Julfa au Nakhitchevan où 4000 tombeaux dont un grand nombre de l'époque médiévale ont été détruits en février 2006
Alexandre Faulx-Briole (12-10-2006 12:08:25)
Voilà, ça recommence ! Au nom de quoi le législateur, le pouvoir politique, décident-ils de ce qui est vrai dans l'Histoire ?
Au nom de cette mode française détestable qui consiste à avoir honte de notre passé ?
A quand une loi interdisant de discuter de la croisade des albigeois, de la guerre de cent ans, de la saint barthélémy, à quand la condamnation de l'Italie parce que Rome a détruit Carthage ?
Laissez aux historiens, aux chercheurs, et aussi aux polémistes, le soin de découvrir, de documenter, d'argumenter.
Arrêtez, bon sang !
Saidi hédi (03-09-2006 22:20:22)
Je souscris totalement à cette démarche. Ce n'est pas au législateur de dire à l'historien ce qu'il doit faire ou ne pas faire.L'histoire n'est pas la morale et l'historien n' a pas à juger. Il a des comptes à rendre par conséquent il n'est ni procureur du temps ni juge d'instructions des faits.Laissez-le travailler en paix.
Yvon Fraboul (21-05-2006 18:55:06)
Evidemment, j'y souscris aussi et même avec passion car sous peu nous ne pourrons plus nous exprimer sur quelque sujet que ce soit: ces repentances à outrance m'exaspèrent tant elles sont nombreuses, j'en veut surtout à ces médias qui les instillent quotidiennement, eux qui vous culpabilisent chaque jour: enfin, il est très sain que des universitaires relève un peu la tête, notre pays en a beaucoup besoin, de plus j'approuve sans réserve l'article d'André LARANE, un grand merçi à tous; ce soir je respire un peu mieux.
Selva Monique (18-05-2006 15:43:01)
Je viens de lire l'article de P. Nora dans Le journal "Le Monde" et je souscris à la pétition des historiens. Je suis effaré par la nouvelle pensée unique sur la relecture de l'HISTOIRE qui m'évoque des régimes totalitaires ou Big Brother.
MS