15 août 2021 : l’entrée des talibans à Kaboul éclaire un troublant paradoxe relatif aux États-Unis. En deux siècles d'existence, ce pays n'a jamais remporté une vraie grande bataille ! Il n'empêche qu'il domine le monde depuis plus d'un siècle par son économie, sa science et sa culture. C'est comme si chaque échec le revigorait...
On peut voir dans ce paradoxe l'illustration d'une réalité prégnante : les États-Unis pratiquent depuis deux siècles la politique de leur géographie. N'ayant pas grand-chose à craindre de leurs voisins, le Canada et le Mexique, et protégés du reste du monde par deux océans, ils peuvent intervenir partout sur la planète sans grand risque pour eux-mêmes (les attentats du 11 septembre 2001 relèvent de l'exception).
Plus fort encore, leurs insuccès sur les champs de bataille éloignés (Afghanistan, Irak, Liban, Syrie, Libye, Somalie, Donbass, Kossovo, Arménie, etc.) servent leurs intérêts de long terme en affaiblissant le Vieux Monde et en ramenant à eux non pas « les pauvres, les exténués, les déshérités » (Emma Lazarus) mais au contraire les élites de ce Vieux Monde chassées par le désordre ambiant (scientifiques et intellectuels chinois, indiens, arabes, français, etc.).
Poussant plus loin l'erreur (ou le cynisme selon le degré d'estime que l'on a de leurs dirigeants), les États-Unis imposent à leurs protégés une politique en exacte opposition à leur géographie, avec un échec assuré. C'est ainsi qu'ils ont voulu couper l'Afghanistan, l'Irak, l'Ukraine ou encore la Géorgie de leur environnement et de leurs pesanteurs anthropologiques et prétendu les convertir d'un coup de baguette magique en des démocraties scandinaves...