Incapable d’extraire la Turquie de la récession survenue en 2018, le président turc Erdoğan a décidé de rétablir le culte musulman à Sainte-Sophie (Istanbul). Une décision qui heurte le monde orthodoxe mais aussi ravive la crainte de voir la Turquie reprendre à son compte l’héritage ottoman et d’aggraver le chaos moyen-oriental.
Trait d’union entre toutes les confessions et civilisations d’Occident, la basilique de la Sainte Sagesse (Hagia Sophia) a été pendant près de mille ans la plus grande église du monde. C’est dans son chœur qu’ont été sacrés les empereurs byzantins. C’est aussi vers elle que se sont tournés les Russes et autres Slaves orientaux quand ils ont demandé le baptême. C’est encore elle qui a servi de modèle aux mosquées-cathédrales des Turcs ottomans...
Sainte-Sophie dans les tempêtes du dernier siècle
Aujourd’hui, après avoir échappé au dynamitage envisagé par le régime des Jeune-Turcs et une fois déçu l’espoir de voir la basilique rendue au culte chrétien lors de la défaite ottomane de 1918, Sainte-Sophie n’est pas seulement un monument exceptionnel, appartenant au patrimoine de l’humanité avant d’appartenir à l’État turc, elle reste pour les orthodoxes du monde entier un symbole majeur de leur existence, et pas seulement de leur foi – face à l’islam comme face au catholicisme romain –, un lieu unique chargé de spiritualité, de mémoire, d’affectivité, de tristesse – voire pour certains d’espoir de reconquête –, dont un Occidental de culture catholico-protestante a bien du mal à saisir l’importance.