Transition écologique

Il y a mieux que la Convention citoyenne pour le climat

22 juin 2020. La Convention citoyenne pour le climat, qui a réuni à Paris 150 citoyens, avance 150 propositions dont une révision de la Constitution ! Avec beaucoup de contraintes et un résultat rien moins que garanti... Nous vous proposons de réfléchir à une alternative pragmatique et libérale, l'allocation climat. Ou comment réduire sans douleur nos consommations d’énergie, remédier au dérèglement climatique et ouvrir la voie à une société plus humaine...

Parole de président : « le monde d’après sera résolument écologique. Je m’y engage ». Las, ce tweet vibrant du président Macron du 5 juin 2020 a été aussitôt contredit par le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020. Ce document qui brasse les milliards par centaines prévoit tout juste un petit milliard supplémentaire « afin d’accélérer la transition écologique dans les territoires ».

Dans le même temps, l’État surendetté s’est privé de deux ou trois milliards de recettes parfaitement indolores en renonçant à relever la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour compenser l’effondrement du prix du pétrole brut. Pendant le confinement, personne n’aurait songé à lui reprocher une augmentation de la TICPE dès lors que le prix des carburants et du fioul seraient restés à leur niveau antérieur (sur le même principe que la « TIPP flottante » du gouvernement Jospin en 2000).

Au lieu de cela, dans l’indifférence générale, les carburants et le fioul ont vu leur prix chuter de plusieurs dizaines de centimes, avec des conséquences négatives pour :
• L’environnement (la baisse de prix a encouragé  la surconsommation de produits pétroliers et donc les émissions de CO2 et de polluants),
• La balance commerciale (plus le prix à la pompe est bas, plus on va importer de produits pétroliers),
• L’épargne des particuliers (les économies inattendues sur les carburants et le fioul ont accru encore davantage l’épargne accumulée pendant le confinement, au détriment de l’activité et de l’emploi). Plus gravement, cette chute va rendre d’autant moins acceptable la remontée du prix des produits pétroliers et plus généralement des produits énergétiques.

Il faut dire qu'entretemps s'est réunie la Convention citoyenne pour le climat, avec 150 citoyens tirés au sort. Elle a planché pendant sept weeks-ends, écouté des experts du climat et ébauché son catalogue de propositions mais s'est gardée d'aborder deux enjeux essentiels  : quid des énergies renouvelables et du nucléaire ? quid de la taxe carbone et du prix de l'énergie ?

Les 150 propositions de la Convention se réduisent à une litanie de recommandations très en-deça de l'enjeu planétaire (note). Elles sont d'ordre incantatoire (changer la Constitution ou l'idéologie libre-échangiste européenne, rendre les centres ville plus attractifs, etc.) ou d'ordre punitif avec maintes fois les verbes : interdire, contraindre, sanctionner, obliger, etc.

Une mesure populaire : l'allocation climat !

Dans une optique libérale, à la différence des « conventionnels » et surtout des dirigeants et des écologistes européens, les économistes américains font confiance à l'intérêt bien senti de chacun d'entre nous, qui nous pousse vers les alternatives les moins chères. Ils préconisent une taxe carbone qui serait - c'est capital - toute entière redistribuée aux citoyens sous la forme d’une allocation forfaitaire mensuelle.

Le 17 janvier 2019, le Wall Street Journal a publié une tribune qui exprimait leur analyse, signée de plusieurs lauréats du prix Nobel d'économie. Voici ci-après le texte de cette tribune (traduction française) :

Déclaration des économistes sur les dividendes carbone
DÉCLARATION DES ÉCONOMISTES SUR LES DIVIDENDES CARBONE
Le changement climatique mondial est un grave problème qui appelle une action nationale immédiate. Guidés par des principes économiques sains, nous sommes unis dans les recommandations politiques suivantes.
  1. Une taxe sur le carbone constitue le levier le plus rentable pour réduire les émissions de carbone à l’échelle et à la vitesse nécessaires. En corrigeant une défaillance bien connue du marché, une taxe sur le carbone enverra un puissant signal de prix qui exploite la main invisible du marché pour orienter les acteurs économiques vers un avenir faible en carbone.
  2. Une taxe sur le carbone devrait augmenter chaque année jusqu’à ce que les objectifs de réduction des émissions soient atteints et être neutre sur le plan des recettes pour éviter les débats sur la dimension de l’État. Une augmentation constante du prix du carbone encouragera l’innovation technologique et le développement d’infrastructures à grande échelle. Elle accélérera également la diffusion de biens et de services à faible intensité carbonique.
  3. Une taxe sur le carbone suffisamment robuste et progressivement croissante remplacera les diverses réglementations sur le carbone qui sont moins efficaces. La substitution d’un signal de prix aux règlements encombrants favorisera la croissance économique et fournira aux entreprises la certitude réglementaire dont elles ont besoin pour investir à long terme dans des solutions de rechange en matière d’énergie propre.
  4. Pour prévenir les fuites de carbone et protéger la compétitivité des États-Unis, un système d’ajustement frontalier du carbone devrait être établi. Ce système améliorerait la compétitivité des entreprises américaines qui sont plus écoénergétiques que leurs concurrents mondiaux. Cela inciterait également d’autres pays à adopter une tarification du carbone similaire.
  5. Pour maximiser l’équité et la viabilité politique d’une taxe croissante sur le carbone, toutes les recettes devraient être remises directement aux citoyens américains sous forme de remises forfaitaires égales. La majorité des familles américaines, y compris les plus vulnérables, bénéficieront financièrement en recevant plus en « dividendes carbone » qu’elles ne paient en augmentation des prix de l’énergie.

Sur Herodote.net, nous avons aussi envisagé semblable montage sous le nom d'« allocation climat redistribuée ». Il s'agit d'une contribution sur toutes les énergies primaires (et non pas les seules énergies fossiles), payée par les producteurs d’énergie (EDF, compagnies pétrolières, usines d’incinération etc.). Elle est donc toute entière redistribuée aux citoyens sous la forme d’une allocation forfaitaire mensuelle.

Nous avons pu calculer qu'avec 50 centimes par litre de carburant ou sur 10 kWh électriques, le fisc pourrait verser à chaque adulte 150 euros par mois (montant brut avant impôt). Pour tous les ménages à l'exception des plus riches, cette allocation au demeurant très sociale couvrirait le surcoût induit par la contribution payée par les fournisseurs d'énergies. Elle n'obligerait donc personne à renoncer à son mode de vie, à sa voiture, à ses voyages, etc. Simplement, elle offrirait à chacun une alternative d'un rapport satisfaction/coût équivalent ou plus avantageux.

Ainsi chacun pourrait-il arbitrer entre deux options sans altérer son bien-être :
• Ne rien changer à son mode de vie en finançant avec l’allocation forfaitaire les hausses de prix de l’énergie,
• Se réorienter vers des consommations moins énergivores et moins coûteuses, avec un reliquat de revenu qui lui permettra d’augmenter son niveau de vie !

Cette mesure fiscale se doit d’être complétée par des dispositions réglementaires pour ouvrir des alternatives aux déplacements motorisés ainsi qu’aux gaspillages (emballages jetables, produits trop vite obsolescents…). Les bénéfices de cette politique peuvent très vite avoir valeur d’exemple pour les autres pays européens et l’ensemble du monde développé.

Le dessinateur Dominique Rousseau a retranscrit notre propos sous forme de BD (cliquez sur l'image pour découvrir celle-ci) :

Tous ces aspects sont détaillés et précisés dans notre livre numérique : Le Climat et la Vie, manifeste pour une écologie de la liberté.

Gagner plus et sauver le climat : une BD de Dominique Rousseau, texte : André Larané
 

André Larané
Trop chère, l'énergie ?

Si surprenant que cela paraisse, le prix des énergies est à la baisse depuis 50 ans ! Les énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) coûtent ainsi deux fois moins cher qu’en 1970 en proportion de nos revenus comme le montre le tableau ci-après.

 1 euro = 6,5596 francs
Prix en 1969 (francs)
Prix en 2020 (euros)
Évolution
(x par)
SMIC horaire
3,3
10
20
Baguette de pain (250g)
0,55
1
12
Carte de métro hebdomadaire
4,8
20
27
1 litre de super
1,1
1,5
9
10 thermies de gaz
1,1
0,9
5
 

Cette baisse relative du prix des énergies entraîne chaque année un peu plus les consommateurs vers les offres les plus gourmandes en énergies : croisières, SUV, home cinema, etc., etc. Il en va en effet des énergies comme de toutes les autres marchandises : moins elles sont coûteuses et plus on est porté à les consommer. C'est le « signal-prix » dont parlent les économistes. L'effet du prix sur la consommation énergétique et donc les émissions de CO2 se voit ci-dessous de façon éclatante dans la comparaison pays par pays des émissions de CO2 par habitant et du prix du litre de carburant. Dans cet échantillon de pays similaires par leur niveau de développement, il existe une forte corrélation (-0,79) entre le prix du litre d'essence et les émissions de CO2/hab. ; la corrélation est moyenne (0,60) en ce qui concerne le PIB/hab. 

Pays CO (mds t.) CO2/hab. (tonnes) essence (dollars 2023) PIB/hab.(dollars)
 États-Unis 4,76 14,61 1,099 59500
 Allemagne 0,72 8,7 2,028 50200
 Taïwan 0,27 11,38 1,027 49800
 Australie 0,38 15,63 1,213 49900
 Canada 0,55 14,99 1,432 48100
 RU 0,36 5,43 1,909 43600
 France 0,31 4,56 2,072 43600
 Japon 1,13 8,94 1,25 42700
 Corée 0,6 11,66 1,312 39400
 Espagne 0,25 5,45 1,865 38200
 Italie 0,32 5,31 2,137 38000
 Pologne 0,31 7,96 1,48 29300
   
Corrélations /CO2/hab :
-0,79 0,60
Publié ou mis à jour le : 2023-09-27 17:43:03
Erik (27-09-2023 15:45:32)

J'utilise cette voie pour corriger certains points ayant fait parti des 150.Premièrement, nous ne nous sommes pas portés candidats. Nous avons été tirés au sort à partir de nos numero de téleph... Lire la suite

Florence Mothe (27-09-2023 14:26:19)

Bravo pour cet article. J'ai été parmi les 150 de la Convention citoyenne. Nous avons été manipulés d'une manière honteuse. Pas un instant, nous n'avons été libres de nos décisions... Mais no... Lire la suite

Liger (06-03-2023 03:28:48)

Je suis souvent d'accord avec vous mais là, je ne vous suis pas du tout : l'État et l'administration sont déjà trop invasifs et ce système d'allocation énergético-fiscale servira essentielle... Lire la suite

flandin (21-06-2020 19:23:47)

Absolument génial....je me demandais justement pourquoi, voyant le prix du gazole à la pompe s'effondrer, la ticpp..n'augmentait pas!! je suis un peu vieux, mais c'est pas Louis XI, Colbert, ou Rocard qui auraient raté une occasion pareille ! Si nos gouvernants français ne savent plus trouver un moyen de financer leurs dépenses...alors où va t on!!... Et pourtant ils ne sont pas "libertariens" que je sache, au vu des innombrables règlements et lois qu' ils inventent..même quand il s'agit d'Histoire!
je découvre Hérodote....le site ... pas notre mentor , nous les profs d' hist géo...quoique Thucydide...aurait été bien aussi...
Cordialement

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