Le palais du Louvre, au coeur de Paris, aujourd'hui plus grand musée du monde, est aussi l'un des trois ou quatre plus grands palais du monde.
Sa construction, comme celle de la Nation française elle-même, s'est étalée sur huit siècles et sans doute n'est-elle pas terminée.
La première référence au Louvre remonte à Philippe Auguste. Vers 1200, le roi fait ériger une enceinte fortifiée autour de Paris, avec une « grosse tour » à l'endroit où celle-ci rencontre la Seine, à l'ouest, face aux domaines normands des Plantagenêts. Le nom de la tour, Louvre, dériverait d'un mot latin désignant les loups (preuve de ce que le lieu était rien moins que sûr). Les fondations de la tour de Philippe Auguste ont été retrouvées dans la Cour carrée, dans les années 1980, lors des travaux du Grand Louvre. Elles sont visibles en souterrain.
Près de deux siècles plus tard, Charles V le Sage fait déplacer l'enceinte fortifiée à quelques centaines de mètres au-delà de la précédente (au niveau de l'actuelle place du Carrousel). Dans la foulée, il demande à son architecte Raymond du Temple d'aménager une résidence confortable en lieu et place de l'ancienne forteresse. Les Très Riches Heures du duc de Berry nous en ont conservé le souvenir, sans doute embelli.
François Ier, un siècle et demi plus tard, fait démolir le donjon et demande à l'architecte Pierre Lescot et au sculpteur Jean Goujon de construire à sa place un hôtel dans le style italien. Les travaux ne s'achèveront que sous le règne de son fils Henri II.
Entre-temps, la reine Catherine de Médicis, épouse de ce dernier, se fait construire un palais à l'écart de Paris par son architecte Philibert de l'Orme (ou Delorme). Situé à l'ouest de l'ancienne enceinte de Charles V, il occupe d'anciennes tuileries. D'où son nom de palais des Tuileries, et celui du vaste parc qui est encore aujourd'hui le poumon du centre de Paris.
Sous le règne d'Henri III, fils de Catherine de Médicis, une petite galerie à un seul niveau, le long de la Seine, relie le Louvre aux Tuileries.
Après les troubles des guerres de religion, Henri IV prend possession de sa capitale et découvre les Tuileries et le Louvre encore en travaux. Il projette alors un « grand dessein » : réunir les deux palais par des galeries parallèles orientées est-ouest. Les architectes Pierre Lescot et Jacques Androuet du Cerceau commencent par construire une Grande Galerie de 460 mètres le long de la Seine entre les deux palais. Là trône aujourdhui la plus grande partie des collections de peintures.
Mais le « grand dessein » ne sera achevé que deux siècles et demi plus tard, sous le règne de Napoléon III, quand l'empereur fera aménager une galerie le long de la rue de Rivoli pour accueillir le ministère des Finances.
Las, il n'aura qu'un temps : pendant la Semaine sanglante de la Commune, les révolutionnaires entassent des bottes de paille dans les sous-sols des Tuileries et y mettent le feu... Les ruines du palais de Catherine de Médicis seront abattues douze ans plus tard.
Il est juste de déplorer les violences quelles qu'elles soient mais devons-nous pour autant regretter l'incendie des Tuileries ? La disparition du palais a eu l'heureux effet d'ouvrir le Louvre vers les Champs-Élysées et le soleil couchant. Quel urbaniste aurait imaginé plus belle et plus grandiose perspective, qui va de la Cour carrée et de la pyramide de Pei à l'Arche de la Défense ?...
Aussi incroyable que cela paraisse, il s'est trouvé des groupes de pression (promoteurs et financiers ?) pour souhaiter la reconstruction des Tuileries et, donc, fermer à nouveau cet ensemble urbain sans équivalent ! La Tribune de l'Art a lancé une pétition en 2008 pour couper court à cette initiative d'autant plus saugrenue qu'elle survient à un moment où la protection du patrimoine existant souffre d'une grave pénurie de moyens financiers.
Marie de Médicis, épouse d'Henri IV, se détourne du Louvre et préfère se consacrer à la construction du palais du Luxembourg, sur l'autre rive de la Seine (il abrite aujourd'hui le Sénat), à l'emplacement d'un ancien hôtel particulier. Elle en confie la réalisation à l'architecte Salomon de Brosse et la décoration à Rubens qui réalise pour elle une série de peintures de grande dimension que l'on peut aujourd'hui retrouver au Louvre.
Après cet intermède, son fils Louis XIII, une fois majeur, reprend les travaux de son père au Louvre. L'architecte Pierre Lemercier quadruple la Cour carrée, chef d'oeuvre d'élégance classique, à l'emplacement de la forteresse médiévale.
Le cardinal de Richelieu, premier ministre du roi, se fait construire un palais à proximité de la résidence royale. C'est le Palais-Cardinal qu'il lèguera à sa mort au roi. On le connaît aujourd'hui sous le nom de Palais-Royal. Devenu la résidence des ducs d'Orléans, il deviendra un haut lieu de l'agitation révolutionnaire en 1789. Il abrite aujourd'hui le Conseil d'État, une institution qui n'a rien de révolutionnaire.
Louis XIV réside dans un premier temps au Louvre, avant de le quitter pour les Tuileries puis, en 1682, pour Versailles. Son ministre Colbert, surintendant des bâtiments en 1663, fait achever les Tuileries par Louis Le Vau et surtout commande la réfection de la façade orientale de la Cour carrée du Louvre. Il veut que cette façade tournée vers Paris signifie la grandeur de son hôte. Le grand architecte romain Le Bernin se voit commander un projet grandiose mais il n'aboutit pas pour des raisons futiles.
Finalement, le projet est confié aux architectes Claude Perrault (le frère de Charles, l'auteur des Contes) et Louis Le Vau, assistés de Charles Le Brun, peintre du roi. Il aboutit à l'actuelle colonnade, chef d'oeuvre classique, un tantinet abîmées par les fausses douves médiévales imaginées par André Malraux en 1968.
Les Tuileries retrouveront leur vocation de résidence royale ou impériale de 1789 à la chute de Napoléon III, en 1870, avant d'être incendiées. Quant au Louvre, définitivement voué aux muses, il sera agrandi par Napoléon III avant une cure de jouvence à la fin du XXe siècle.
Voici, avec le concours de Google Earth, une vue aérienne du palais du Louvre et de son quartier. Nous vous suggérons de reconnaître les différents sites indiqués par un numéro et si vous n'y arrivez pas, reportez-vous à la solution.
Descriptif de la vue aérienne ci-dessus :
1 - Cour Carrée et emplacement de la forteresse de Philippe Auguste,
2 - emplacement de l'ancien palais des Tuileries de Catherine de Médicis,
3 - colonnade de Claude Perrault,
4 - Grande Galerie du Louvre
5 - la Seine,
6 - passerelle des Arts,
7 - île de la Cité (à la pointe fut brûlé le grand-maître des Templiers en 1314),
8 - Institut de France (anciennement collège des Cinq-Nations),
9 - Palais-Royal (anciennement Palais-Cardinal) et Comédie-Française,
10 - marché Saint-Honoré, emplacement du Club des Jacobins (ex-couvent),
11 - place Vendôme, chancellerie, hôtel Ritz et colonne Napoléon,
12 - arc de triomphe du Carrousel et place du même nom,
13 - aile Napoléon III et musée des Arts décoratifs, sur la rue de Rivoli,
14 - place de la Concorde et obélisque (autrefois place Louis XV),
15 - musée de l'Orangerie, aménagé en 1927 pour les Nymphéas de Monet,
16 - musée d'Orsay (ancienne gare Paris-Orléans, pour l'Exposition de 1900),
17 - fausses douves aménagées par André Malraux (1968),
18 - pyramide de Pei et entrée actuelle du musée du Louvre (1993)
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