Le centre Simon Wiesenthal de Los Angeles vient d'annoncer l'acquisition du plus ancien document historique attestant de l'antisémitisme d'Adolf Hitler. Il s’agit d’une lettre dactylographiée qui sera exposée dans le musée de la Tolérance de Los Angeles.
En 1919, Adolf Hitler est employé par l'armée bavaroise dans un service chargé de lutter contre la propagande communiste.
Son supérieur, Karl Mayr – qui a rejoint plus tard l'opposition et péri dans un camp de concentration – remarque ses talents rhétoriques.
Il le charge de répondre à un soldat chargé d'une mission semblable dans une autre unité, Adolf Gemlich, qui désire en savoir plus sur l'attitude à adopter face aux juifs.
Hitler le fait en quatre pages dactylographiées.
Six ans avant la rédaction de Mein Kampf, il y souligne en particulier les limites de l'antisémitisme sentimental, qui ne se traduit « que » par des pogroms, et souhaite un « antisémitisme de la raison » en vue de « la lutte planifiée et légale contre les avantages des juifs et la suppression de ces avantages ».
Il laisse libre cours à sa haine de la « race juive » qui détruit la nation allemande, et réclame « sa mise à l'écart », Beseitigung, terme polysémique qui renvoie à la distance, à l'écartement, mais aussi à l'élimination physique. Les historiens ne pensent pas que Hitler ait dès l'époque conçu la « Solution finale » telle qu'elle fut ensuite mise en place, mais ce document montre que la « question juive » était déjà l'une de ses obsessions.
La lettre aurait été découverte par un soldat américain, William F. Ziegler, après la Seconde Guerre Mondiale, dans les restes d'archives du parti nazi, à proximité de Nuremberg. Il l'aurait ensuite vendue à un marchand du Kansas qui la proposa au centre Simon Wiesenthal de Los Angeles en 1988.
Des doutes sur l'authenticité du document conduisirent ce dernier à un premier refus : comment un simple soldat aurait-il eu accès à une machine à écrire, un instrument extrêmement coûteux à l'époque ? Toutefois, on s'est depuis avisé que, si Hitler rédigeait des textes pour l'armée, il était normal qu'il en ait une à disposition.
En conséquence, la grande majorité des historiens conviennent aujourd'hui que la lettre est bien de Hitler. Les archives de Munich en possèdent d’ailleurs depuis longtemps une copie non signée.
Pour le centre Simon Wiesenthal et son directeur, le rabbin Marvin Hier, son acquisition, utile pour le souvenir et la mémoire de la Shoah, a été le prétexte à une opération de communication d'ampleur mondiale, avec des articles dans le New York Times et la plupart des journaux allemands.
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