30 août 2010

L'été des Roms

La question des Roms ou Tsiganes n'en finit pas d'agiter l'opinion en France et de susciter des réactions à l'étranger, à l'ONU et même au Vatican.

Tout a commencé en juillet 2010 près d'Orléans. Des Français de la communauté gitane ont saccagé une gendarmerie après qu'un des leurs eut été tué par les forces de l'ordre à l'issue d'une course-poursuite.

Le chef de l'État a répliqué en ordonnant le renvoi immédiat chez eux de quelques milliers de Roumains de la communauté rom. Ces derniers ont accepté assez facilement le voyage et le pécule qui leur étaient offerts, sachant qu'ils pourraient revenir dans quelques mois au plus tard, dès lors que l'espace Schengen de libre circulation aura accueilli la Roumanie.

Dans ce dernier pays, ainsi que nous le rappelons dans notre histoire des Tsiganes, les Roms sont traités comme l'étaient les Noirs aux États-Unis au début du XXe siècle, avec la misère en plus. C'est qu'ils ont eu le douloureux privilège d'être au Moyen Âge les seuls Européens proprement réduits en esclavage. Ils n'ont été émancipés qu'au XIXe siècle. Ceci peut expliquer cela.

Rien de nouveau...

L'embarras des autorités françaises face aux Tsiganes, Roms ou gitans ne date pas d'hier. Il n'est que de relire ce discours prononcé au Sénat le 10 juillet... 1911 : «Ces nomades vivent sur notre territoire comme en pays conquis, ne voilant connaître ni les régles de l'hygiène, ni les prescriptions de nos lois civiles, professant un égal mépris pour nos lois pénales et pour nos lois fiscales. Il semble qu'ils aient droit chez nous à tous les privilèges».

La rigueur affichée à l'égard des Roms roumains apparaît d'autant plus incongrue que le président de la République manifeste par ailleurs une relative bienveillance à l'égard de l'immigration dans son ensemble.

D'après les chiffres officiels de l'INSEE, les services d'immigration et les services sociaux accueillent et régularisent près de 200.000 personnes par an depuis 2002, soit autant sinon davantage que dans les décennies précédentes.

Bataille de chiffonniers

En attendant, cette affaire conduit à des dérapages verbaux hasardeux. Le dernier en date est celui d'Alain Minc, conseiller officieux du chef de l'État et du gratin de la finance.

Sur France Inter («L'été en pente douce», mercredi 25 août 2010), il s'en est pris au pape Benoît XVI, lui déniant le droit de sermonner la France du fait de son héritage allemand : «on peut discuter ce que l'on veut sur l'affaire des Roms, mais pas un pape allemand. Jean-Paul II peut-être, pas lui». Ces propos en rappellent d'autres sur la France «qui n'a pas inventé la Solution finale, elle !»

Ces propos seraient anecdotiques s'ils étaient isolés. Mais ils s'intègrent dans un ensemble de signaux troubles, comme les dissensions au sein de la Belgique ou encore la poussée nationaliste en Hongrie.

Ils nous renvoient à l'analyse de l'historien Emmanuel Todd sur la recherche d'un bouc émissaire et le renouveau des nationalismes dans une Europe à la dérive, sans projet fédérateur autre que le libre-échangisme, désarmée économiquement par ses élites tandis que ses rivaux, de la Chine aux États-Unis, pratiquent sans vergogne toutes les formes de protectionnisme à leur disposition.

André Larané
Publié ou mis à jour le : 2021-12-18 22:06:50

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