« Et je leur donnerai dans ma maison et dans mes murs un mémorial (Yad) et un nom (Shem) qui ne seront pas effacés » (Isaïe 56-5). Ainsi parla Dieu selon le prophète Isaïe après qu'une communauté hébraïque eut été exterminée sans laisser de descendance.
C'est en référence à ce souvenir biblique qu'en 1953, l'assemblée législative israélienne (la Knesset) a adopté une loi portant création à Jérusalem d'un mémorial consacré aux victimes de la Shoah : Yad Vashem (« Un mémorial et un nom »).
Pendant la discussion, un député suggéra de rajouter sur la liste des buts de Yad Vashem : « se souvenir et honorer les Justes des Nations qui ont mis leur vie en danger pour sauver des Juifs ».
Le mémorial de Yad Vashem couvre aujourd'hui plusieurs dizaines d'hectares sur la colline du Souvenir, un site propice au recueillement, à l'orée de l'agglomération.
Les identités des victimes de la Shoah sont exposées dans un monument voué à leur mémoire. L'un des lieux les plus émouvants est celui dédié aux enfants, avec autant de lucioles que de disparus...
D'austères allées de pierre rappellent les ghettos détruits pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est la « vallée des communautés disparues ».
Dans « l'allée des Justes » ont été plantés des milliers d'arbres, chacun ayant à son pied une plaque portant le nom du Juste à qui l'arbre est dédié.
Depuis quelques années, par manque de place, un Jardin des Justes a été créé sur le site, avec la liste de tous ceux qui ont été reconnus mais pour lesquels il n'est plus possible de planter d'arbres.
Notons un wagon des « convois de la mort » qui rappelle le déroulement de la tragédie.
Le lieu central de Yad Vashem est le musée ; une aile de béton sous laquelle les visiteurs parcourent plusieurs kilomètres dans une pénombre remplie de souvenirs de la Shoah et des années qui l'ont précédée. À l'évocation presque joyeuse des communautés juives d'avant la tourmente succède la descente aux enfers.
Le parcours se termine sur une note d'espoir avec la sortie sur une terrasse baignée de soleil et de lumière, d'où l'on embrasse les monts de Judée...
Yad Vashem, c'est aussi une école internationale qui accueille des gens de tous âges, de tous pays et de toutes conditions pour des stages d'information et de sensibilisation sur la Shoah, d'où nul ne sort indemne...
À proximité de Yad Vashem, on peut arpenter le mont Herzl, ainsi nommé en l'honneur du fondateur du sionisme, Theodor Herzl. Il abrite sa tombe ainsi que celles de la plupart des personnalités israéliennes défuntes, comme le Premier ministre Isaac Rabin, assassiné par un extrémiste juif (exception majeure : David Ben Gourion a choisi de reposer dans son kibboutz).
Dans le musée de Yad Vashem, dans la partie consacrée aux « Silences du monde », se trouve une photographie du pape Pie XII accompagnée de deux textes qui ont suscité une protestation du Vatican du fait de leur condamnation sans nuances de l'action du pape à l'époque du nazisme (lire à ce propos la biographie du pape Pie XII).
Le premier est un poème écrit pendant la guerre, en 1942, par le grand poète israélien Nathan Alterman (1910-1970), né à Varsovie et installé à Tel-Aviv depuis 1925 :
« Et le couperet tombait jour et nuit
Tandis que le Saint Père à Rome
Ne sortait pas de la basilique avec l'image du Sauveur
Pour assister à au moins un jour de pogrome.
Participer à une journée, à une seule et unique journée,
À l'endroit où se tient depuis des années, comme un agneau,
Un petit enfant, anonyme, un enfant juif. » (traduction : Alain Michel).
Le deuxième texte est un commentaire historique réalisé par le musée :
« Le pape Pie XII :
Les réactions de Pie XII au meurtre des Juifs pendant la Shoah sont sujettes à controverse. En 1933, quand il était Secrétaire du Vatican, il fut actif pour obtenir un Concordat avec le pouvoir allemand afin de protéger le droits de l'Église en Allemagne, même si cela signifiait la reconnaissance du régime nazi raciste. Quand il fut élu pape en 1939, il « enterra » une lettre contre le racisme et l'antisémitisme qu'avait préparée son prédécesseur. Même lorsque les rapports sur le massacre des Juifs s'accumulèrent au Vatican, le pape ne protesta jamais par oral ou par écrit. En décembre 1942, il s'abstint de signer la déclaration des Alliés condamnant l'extermination des Juifs. Lorsque les Juifs furent déportés de Rome à Auschwitz, le Pape n'intervint pas. Le Pape maintint sa position de neutralité pendant toute la guerre, à l'exception d'un appel aux dirigeants de Hongrie et de Slovaquie vers la fin. Son silence et l'absence de directives obligea les hommes d'Église, à travers l'Europe, à déterminer par eux-mêmes quelles devaient être leurs réactions. » (traduction : Alain Michel).
Quelques mètres plus loin, dans la section consacrée aux justes des nations, un hommage appuyé est donné aux hommes d'Églises qui ont contribué à sauver des Juifs.
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