Saint-Cyr

Le Grand Siècle en vrai

8 mai 2000 : le film de Patricia Mazuy nous plonge dans l'intimité du Grand Siècle à travers les destins croisés de deux jeunes filles de l'aristocratie.
Avec Isabelle Huppert dans le rôle de la Maintenon et Jean-Pierre Kalfon, plus vrai que nature en Louis XIV vieillissant.

Saint-Cyr (2000)Nous sommes au milieu du règne de Louis XIV et Madame de Maintenon, l'épouse secrète du roi, accueille ses premières élèves dans l'institution qu'elle destine aux jeunes filles de la noblesse pauvre du royaume.

Le ton est donné dès les premières images. La campagne respire la pauvreté et les austères bâtiments que l'architecte Mansard a édifiés au milieu des marais, à Saint-Cyr, à deux pas du château de Versailles, suintent l'humidité et la fièvre.

Les jeunes filles, à leur arrivée, parlent le patois de leur province et Madame de Maintenon (on dit simplement Madame) s'applique à leur faire apprendre la belle langue française que l'on parle à la Cour et qu'elle-même maîtrise à la perfection.

Ses méthodes pédagogiques débouchent sur un franc succès. C'est ainsi que les jeunes filles interprètent avec éclat et émotion une nouvelle pièce de Racine, Esther, devant le Roi et un cercle choisi de courtisans.

Un avenir brillant s'ouvre devant elles. Mais c'est sans compter avec la bigoterie dévorante de la marquise de Maintenon.

Nous n'en dirons pas plus pour laisser intacts le plaisir de la découverte et l'émotion devant les destins croisés de deux élèves liées par une profonde amitié et cruellement séparées par le destin...

Plongée dans l'Histoire

Saint-Cyr nous plonge sans tapage ni artifices dans l'intimité du Grand Siècle, évoquant par touches ses guerres et ses splendeurs, son art de vivre et ses misères. Tout sonne juste dans les paysages, les costumes, les personnages et les voix. ÀA cent lieues du film de cape et d'épée et des décors hollywoodiens à la Vatel.

L'Histoire sert de toile de fond au drame personnel de deux héroïnes étouffées par les sautes d'humeur de leur éducatrice. Les faits sont assez bien connus du public français depuis la parution des mémoires apocryphes de Madame de Maintenon, sous la plume de Françoise Chandernagor (L'Allée du roi).

Françoise d'Aubigné naît dans la prison de Niort le 27 novembre 1635, soit trois ans avant la naissance du futur Louis XIV. Misérable et réprouvée, elle est la petite-fille du poète et homme de guerre protestant Agrippa d'Aubigné.

Françoise devient l'épouse du poète satirique Scarron, infirme et valétudinaire, qui a le mérite de l'initier à la vie mondaine et de développer ses aptitudes à la conversation de salon.

Elle va dès lors suivre un destin exceptionnel, devenant en 1669 la préceptrice des bâtards royaux nés de la marquise de Montespan.

Cinq ans plus tard, en récompense de ses services, Françoise d'Aubigné est faite marquise de Maintenon (petite ville entre Chartres et Versailles).

Louis XIV apprécie sa conversation et sans doute aussi ses charmes féminins. Après la disgrâce de la Montespan et la mort de la reine Marie-Thérèse, l'enfant de la prison de Niort devient l'épouse morganatique du roi (sans droit à la succession) par un mariage resté secret.

Louis XIV approche alors de la cinquantaine et les grandes années de son règne sont derrière lui. Il s'apprête à révoquer l'Édit de tolérance de Nantes sous la pression de l'opinion populaire et, sous l'impulsion du belliqueux Louvois, il va s'engager dans des guerres risquées et cruelles qui vont gravement ternir les dernières décennies de son règne.

C'est en 1686, l'année qui suit la révocation de l'Édit de Nantes, que Madame de Maintenon fonde l'institution de Saint-Cyr pour éduquer les jeunes filles de la noblesse pauvre et forger l'élite de l'avenir.

Très vite, sa piété catholique et ses bons sentiments vont virer à la bigoterie. Et usant de son influence sur le Roi vieillissant, elle va mettre un terme aux grandes fêtes et à l'atmosphère joyeuse qui ont fait les beaux jours de Versailles.

Tout cela est parfaitement ressenti à travers le film de Patricia Mazuy, quoiqu'avec excès en ce qui concerne le personnage de Madame de Maintenon... En effet, on peut seulement regretter le choix d'Isabelle Huppert pour jouer Madame de Maintenon. L'actrice présente la marquise comme une personne acariâtre et histérique, ce qu'elle n'était assurément pas. De ce point de vue, peut-être Isabelle Huppert eut-elle plus à son affaire pour incarner Madame de Montespan. En ce qui concerne Madame de Maintenon, on eut préféré un jeu qui associe autorité, spiritualité et douceur.

Cela mis à part, le film mérite d'être vu en famille (commentaire spontané de ma fille, 11 ans, à la fin de la séance : « Le film est trop bien »).

André Larané
Publié ou mis à jour le : 2023-04-04 17:55:58

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