De 1947 à nos jours

L'Inde sous tension

L'Inde a donné naissance à l'hindouisme, première religion du pays et troisième religion mondiale derrière le christianisme et l'islam, avec près d'un milliard de fidèles, ainsi qu'au bouddhisme. Elle a par ailleurs accueilli le christianisme par le biais des évangélisateurs Saint Thomas et plus tard Saint François Xavier.

Mais dans le monde entier, le monument qui incarne le mieux la splendeur de l'Inde est sans aucun doute le Taj Mahal, cette « larme sur la joue du temps », selon les mots du poète Tagore. Ce mausolée musulman construit par l'empereur moghol Shah Jahan, inconsolable à la mort de son épouse, témoigne de la place de l'islam dans l'histoire moderne du sous-continent indien.

Mosaïque de religions et de langues, l'Union indienne compte également une grande diversité d'ethnies, dont certaines expriment des volontés séparatistes, notamment dans l'extrême nord-est du pays, près du Myanmar.

Bordée à l'est par le Pakistan, auquel elle dispute le Cachemire et au nord par le Tibet chinois, elle ne manque assurément pas de motifs de tensions et c'est miracle qu'elle ait préservé dans ces conditions la paix civile et des institutions parlementaires.

L'Union indienne au XXIe siècle

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L'État principal issu du British Raj (empire britannique des Indes) s'appelle Union indienne ou République de l'Inde. C'est aujourd'hui une république fédérale de 28 États, 7 territoires et 18 langues officielles, associée au Commonwealth, dernier vestige de l'empire britannique...

Le pouvoir central, installé à Delhi, tout au nord du pays, dispose du monopole de décision sur les sujets de politique étrangère, défense, monnaie, communications et impôts sur les sociétés, tandis que les États fédérés légifèrent sur certaines questions relevant de l'éducation, de la santé ou des relations sociales. Chacun de ces États dispose d'un parlement et d'un gouvernement qui lui est propre.

Le Parlement national - Lok Sabha signifie « la maison du peuple » - comporte 545 sièges, dont environ 130 réservés aux dalits (intouchables ou parias) et populations tribales. Il n'existe en revanche pas de politique de discrimination positive à l'égard des femmes à l'échelle nationale, mais seulement pour les élections locales.

Tout Indien de plus de 18 ans peut voter pour renouveler le Lok Sabha, tous les cinq ans, ce qui fait un total d'un peu plus de 700 millions d'électeurs ! En raison de la taille du pays et du nombre élevé de citoyens, les élections sont étalées sur plusieurs semaines (5 phases distinctes).

Le réveil démographique

Vers 1600, le sous-continent indien était peuplé de 100 à 125 millions d'habitants et, vers 1900, sous la domination britannique, de près de 300 millions d'habitants (nettement moins que la Chine ou l'Europe !). Il souffrait alors de divers maux : malnutrition, famines, épidémies (« grippe espagnole »), à l'origine d'une stagnation démographique. Le taux de mortalité, de l'ordre de 47 pour mille, était à peine inférieur au taux de natalité.

Le décollage démographique des Indes britanniques (le « Grand Divide ») survient en 1921 avec l'importation de méthodes modernes d'agriculture et la disparition des famines. Le mouvement politique en faveur de l'indépendance s'en trouve renforcé d'autant.

Lorsqu'en 1947, le pandit (« savant ») Nehru prend les commandes de l'Union indienne, les trois-quarts des 353 millions d'Indiens vivent encore sous le seuil de pauvreté, l'espérance de vie est de 32 ans et 84% de la population adulte est analphabète. Le pays dépend par ailleurs de l'étranger pour son alimentation...

En ce début du XXIe siècle, l'Inde compte trois fois plus d'habitants qu'en 1947 (1,2 milliard d'habitants d'après le recensement de 2011). Sa croissance démographique diminue de façon très inégale selon les États (on compte en moyenne 2 enfants par femme au Sud et plus de 3 au Nord). 

En 2011, les hindous sont 966 millions et représentent 79% de la population (84% en 1951) ; les musulmans sont 172 millions et représentent 14% de la population (9% en 1951).

La population indienne pourrait se stabiliser aux environs de 1,7 milliard d'habitants vers 2060 avec des densités moyennes supérieures à 1000 hab/km2 dans les États de la vallée du Gange, de Delhi à Calcutta (source : INED).

40% des habitants vivent encore sous le seuil de pauvreté et 25% des adultes sont considérés comme analphabètes (là aussi avec de grandes différences entre le Sud et le Nord). L'espérance de vie dépasse désormais 62 ans, le pays est devenu autosuffisant sur le plan alimentaire et l'on voit émerger une classe moyenne significative.

Le réveil politique

Au moment de l'indépendance, les militants nationalistes indiens se répartissent peu ou prou entre deux mouvances. Il y a les « universalistes » version Gandhi. Pour ce dernier, est Indien tout habitant de la péninsule, dans le respect de son identité religieuse. Le drapeau choisi par le Mahatma est le reflet de cette conception, avec trois bandes égales : une verte pour les musulmans, une blanche pour les chrétiens, une orange pour les hindous.

Il y a également les « socialistes et laïcs » version Nehru. Pour le Pandit, tous les habitants de la péninsule sont indiens, abstraction faite de leur identité religieuse et de leur langue. Il existe aussi un nationalisme proprement hindou, né dans les années 1920 et qui s'est renforcé après la tragique partition des Indes. C'est un représentant de cette mouvance minoritaire mais très active qui assassine Gandhi le 30 janvier 1948, lui reprochant de brader aux impies le pays des hindous, l'Hindoustan, et de faire trop de concessions aux minorités.

Une démocratie flexible et compatissante

En conformité avec la pensée du Mahatma, la Constitution de 1950, la plus longue du monde, reconnaît toutes les langues (pas moins de 22 langues officielles) et toutes les religions du pays. Elle n'impose pas un état civil uniforme et autorise chaque communauté à appliquer son droit coutumier en ce qui concerne la famille (mariage, répudiation et divorce, adoption, héritage). Aussi les musulmans de l'Union indienne vivent-ils depuis lors sous le régime de la loi islamique (la charia) !

Grâce à l'intervention pathétique de Gandhi, peu avant sa mort, l'Assemblée constituante rejette la demande des nationalistes hindous de faire de l'hindi la langue nationale, ce que les Dravidiens du Sud, qui parlent des langues sans aucun rapport avec l'hindi, auraient ressenti comme une humiliation (le vote est acquis à une voix près !). Sagement, elle maintient l'anglais comme seule langue officielle de l'Union.

Nehru, Premier ministre jusqu'à sa mort, le 27 mai 1964, n'en reste pas là et pour dégoupiller les séparatismes régionaux, il développe le fédéralisme. En 1952, la mort d'un séparatiste tamoul, suite à une grève de la faim, sonne comme un avertissement. Dès l'année suivante, Nehru commence de redécouper les grands États issus de l'indépendance, de façon à ce qu'ils coïncident au mieux avec les frontières linguistiques. Ainsi le Kerala et le Tamil Nadu font-ils désormais chambre à part... Ce mouvement s'est poursuivi jusqu'en 2000, année au cours de laquelle ont été créés trois nouveaux États. L'Union indienne compte aujourd'hui 28 États et 7 territoires établis sur des bases essentiellement linguistiques (avec 18 langues officiellement reconnues par la Constitution et des milliers de dialectes).

Notons aussi que l'Union indienne a abordé de front le problème des intouchables ou hors-caste (eux-mêmes s'appellent Dalit, d'un mot hindi qui veut dire « opprimé »). Elle a appliqué à leur égard une politique de discrimination positive sans équivalent dans le monde, avec des quotas stricts dans les écoles et les administrations (et non pas seulement des recommandations ou des objectifs). La discrimination positive a été inventée en 1896, autrement dit à l'époque coloniale, par les missionnaires et administrateurs britanniques : ils ont ouvert des écoles réservées aux Dalits et montré qu'ils étaient tout autant capables d'élévation intellectuelle que les brahmanes (représentants de la caste supérieure).

La discrimination positive n'a pas résolu les problèmes sociaux des Dalits (15% de la population totale) mais elle a abouti à la création d'une élite d'intouchables et même d'un influent parti Dalit, le BSP (une femme de ce parti gouverne depuis 2007 le plus grand État de l'Inde, l'Uttar Pradesh, et pourrait jouer un rôle primordial dans les élections générales du 12 avril 2009).

Les concessions linguistiques, coutumières, sociales et religieuses ont permis à la démocratie indienne de « digérer » les revendications séparatistes et communautaristes et de se renforcer en déjouant tous les pronostics. Ainsi, en octobre 1962, le pays a-t-il supporté sans broncher une guerre désastreuse contre la Chine de Mao, motivée par des revendications frontalières.

Voter sans lire

L'Inde ne compte qu'à peine plus de 60% de citoyens sachant lire et écrire. Pour les femmes, le taux d'alphabétisation tombe à 48%. Néanmoins, les illettrés ne sont pas exclus du système électoral. Ils peuvent voter grâce à un système de symboles attribués aux partis en lice. Ainsi, le parti du Congrès est représenté par une main ouverte, le BJP (nationalistes hindous) par une fleur de lotus, d'autres partis par un paysan labourant son champ, une femme tournant un rouet, une vache et un veau, ou les incontournables faucille et marteau pour le parti communiste.

Contrairement à de nombreux pays occidentaux, l'Inde est une démocratie dans laquelle les plus pauvres participent massivement aux votes. Toutefois, le système des « banques de vote », achetées par des politiciens véreux auprès de gangs mafieux, se perpétue dans de nombreuses circonscriptions, aussi bien des villages reculés que des bidonvilles des grandes métropoles. Par le biais de l'intimidation et de la corruption, certains candidats s'assurent ainsi des taux de 90 ou 100% des votes dans leur circonscription. En outre, la caste reste un déterminant majeur du vote et certains partis considèrent donc certaines sections de la population comme d'emblée acquises à leur cause.

Marche désordonnée vers le progrès

Quand Nehru meurt, le 27 mai 1964, son parti, le Congrès, se trouve tiraillé entre différents clans. En août 1965 éclate une deuxième guerre entre l'Inde et le Pakistan, autour de la question non résolue du Cachemire, un État rattaché à l'Inde en dépit de sa population, majoritairement musulmane. Le conflit se solde par un cessez-le-feu.

La fille de Nehru, Indira Gandhi (48 ans, veuve de Feroze Gandhi, sans lien de parenté avec le Mahatma) accède au pouvoir en janvier 1966. Autoritaire, elle mène le pays et son parti à la baguette. Évincée en mars 1977, elle provoque une scission au sein du Congrès en créant le Congrès-Indira (ou Congrès-I) et remporte avec éclat les élections suivantes. De nouveau Premier ministre le 10 janvier 1980, elle manifeste un intérêt inédit pour les questions religieuses et, rompant avec le laïcisme de son père, joue les communautés les unes contre les autres.

Après son assassinat, le 31 octobre 1984, par ses propres gardes du corps, des Sikhs, son fils Rajiv lui succède. Sous son gouvernement survient un premier grave incident communautaire : suite à une affaire de répudiation portée devant la Cour Suprême, celle-ci confirme le droit de la musulmane répudiée à une pension alimentaire et déplore que les musulmans indiens conservent la charia. Les mollahs (religieux musulmans) protestent aussitôt avec vigueur et, pour les calmer et conserver leurs suffrages, Rajiv Gandhi suggère de garantir constitutionnellement leur droit spécifique de la famille.

Les nationalistes hindous, pour le coup, trouvent qu'on en fait trop pour les minorités et se révoltent à leur tour. Ils relancent l'affaire d'Ayodhya, le lieu de naissance présumé du dieu Rama sur lequel le conquérant Babour chah a construit une mosquée en 1528. Des fanatiques hindous détruisent la mosquée en décembre 1992.

Au cours des années suivantes, des émeutes et de vértitables pogroms anti-musulmans font plusieurs milliers de morts, avec la bénédiction de certains hommes poliiques, membres du parti nationaliste hindou. Rajiv Gandhi, chassé du pouvoir par une coalition extérieure au Congrès, est assassiné par une terroriste tamoul qui lui reprochait son intervention dans la guerre civile du Sri Lanka.

Le péril vert

Bien que peuplée à 80% d'hindous (recensement de 2001), l'Inde abrite la troisième plus grande communauté musulmane du monde, forte d'environ 150 millions d'individus (13,4% de la population) après l'Indonésie et le Pakistan voisin. Avec les communautés du Pakistan et du Bangladesh, les musulmans représentent aujourd'hui près d'un tiers de la population du territoire de l'ancien Raj britannique, contre environ 20% au début du XXe siècle. Une proportion amenée à continuer à augmenter en raison des plus forts taux de fécondité de la communauté musulmane que de la communauté hindoue, elle-même plus féconde que les communautés chrétiennes (2% de la population) et les Sikhs (environ 1%).

Ce différentiel démographique, ainsi que le souligne le chercheur Christophe Jaffrelot, directeur du CERI (Sciences Po Paris), n'est pas dû à des atavismes culturels ou religieux mais tout simplement au fait que les musulmans sont en moyenne moins éduqués et plus pauvres que les hindous (on n'observe pas de différence à niveaux d'éducation et de revenu identiques). Il n'empêche que les nationalistes hindous assoient leur discours alarmiste sur ce déséquilibre démographique qui n'est, en définitive, que la conséquence de l'ostracisme à l'égard de cette minorité.

Pendant toute l'ère Nehru (de l'indépendance à l'assassinat d'Indira Gandhi, en 1984, l'Inde a connu une croissance économique médiocre. Le revenu moyen par habitant n'a crû pendant ces trois décennies que d'environ 0,7% par an. C'est mieux que dans la période coloniale, durant laquelle le niveau de vie a tout simplement régressé, du fait des obstacles mis par les Anglais au développement de l'industrie locale, mais nettement moins bien qu'en Extrême-Orient.

Ces piètres performances tiennent à la croissance démographique rapide ainsi qu'au poids de la bureaucratie, à la corruption et aux règlements tatillons propres à décourager les investisseurs.

D'un autre côté, en intervenant énergiquement en faveur de l'éducation, de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique, l'État socialiste de Nehru a jeté les bases de l'Inde moderne.

C'est ainsi que dès les années 1980, grâce aux efforts éducatifs, le taux de croissance économique s'est élevé jusqu'à 5 ou 6% par an cependant que commençait à décliner l'indice de fécondité.

En 1991, le gouvernement prend acte de l'effondrement de l'Union soviétique, alliée privilégiée de l'Inde, et de son idéologie socialiste : le ministre des Finances Manmohan Singh (Premier ministre de 2004 à 2014) desserre les carcans réglementaires et les protections douanières qui bridaient l'activité économique. Les entreprises s'engagent derechef dans la mondialisation des échanges.

Le retour des guerres de religion

La frénésie économique ne gêne cependant en rien les menées subversives. Une nuit de 1992, les nationalistes hindous rasent la mosquée d'Ayodhya. Cette mosquée avait été construite au XVIe siècle sur le site considéré par les hindous comme le lieu de naissance du dieu Ram. 

En 1998, le parti nationaliste BJP accède au pouvoir, en partie grâce au soutien et à l'argent de la riche diaspora établie aux États-Unis. Les tensions avec les musulmans s'exaspèrent au point de provoquer plus d'un millier de morts en 2002 au Gujarat, un État alors gouverné par le chef du BJP, Norendra Modi (il sera Premier ministre de l'Inde en 2014). Les musulmans (10% de la population en 1947, 13% au début du XXIe siècle) supportent de plus en plus mal leur marginalisation et leur appauvrissement. En leur sein se développent des mouvements extrémistes en liaison avec leurs homologues pakistanais.

Résultat de cette dérive, les attentats revendiqués par des mouvements islamistes se sont multipliés, de Jaïpur au Rajasthan, à Ahmedabad et Bombay (Mumbai en langue hindi) où, en novembre 2008, il ont causé près de 200 morts dans l'attaque de deux hôtels de luxe. Comme si cela ne suffisait pas, des chrétiens convertis de fraîche date ont été par ailleurs massacrés par des hindous extrémistes dans l'est du pays.

Au total, entre 2002 et 2007, cinq mille personnes ont été tuées dans des attentats selon les chiffres du ministère de l'Intérieur. Des chiffres qui font de l'Inde le deuxième pays au monde le plus touché par le terrorisme pour cette période, derrière l'Irak ! L'Inde, qui avait pourtant donné au monde l'image d'un pays capable de choisir un président et un Premier ministre issus de minorités religieuses (le musulman Abdul Kalam de 2002 à 2007 et le sikh Manmohan Singh jusqu'en 2014), est rattrapée par le fondamentalisme.

Les élections législatives du printemps 2014 se soldent par la victoire triomphale du BJP. Son chef, le charismatique Narendra Modi (64 ans en 2014), accède le 19 mai 2014 à la tête du gouvernement indien. Issu d'un milieu modeste, ce nationaliste a dirigé l'État du Gujarat à partir de 2001 et n'a, semble-t-il, rien fait pour prévenir les massacres de musulmans de l'année suivante. On lui sait gré toutefois d'avoir modernisé et dynamisé cet État qui vit naître Gandhi.

La démocratie et le fédéralisme se sont renforcés au fil des décennies cependant que s'est atténuée l'injustice faite aux intouchables. Toutefois pèse plus que jamais le risque d'une guerre de religion dont feraient les frais les musulmans et les chrétiens. On ne voit pour l'heure aucun dirigeant indien assez lucide, charismatique et courageux pour apaiser les esprits avec, pourquoi pas ? une politique de discrimination positive en faveur de la minorité islamique comme celle qui a été menée avec les Dalits, ainsi que le suggère Christophe Jaffrelot.

Deux partis principaux... et une multitude d'autres

Vétéran des partis politiques indiens, fondé en 1885, le parti du Congrès a exercé le pouvoir à l'échelle fédérale, sans discontinuer, de 1947 à 1977, puis de 1980 à 1984 sous la direction de Nehru, de sa fille Indira Gandhi, enfin de 1984 à 1989, de 1991 à 1996 et depuis 2004. Son image de parti de l'indépendance et de défenseur d'un État séculier, laissant une place à toutes les communautés religieuses, lui a valu la sympathie et la fidélité de nombreux électeurs indiens. Mais l'épuisement de la famille Nehru-Gandhi et l'absence de leader charismatique après le vieux Singh (81 ans en 2014) inspirent les plus grandes craintes quant à son avenir immédiat, après sa sévère défaite aux législatives du printemps 2014 (44 sièges sur 543).   

Le BJP (Bharatiya Janata Party, « Parti du peuple indien » - nationalistes hindous) est devenu sans contestation possible la première force politique au printemps 2014, avec 282 sièges au Parlement sur 543. Défenseur de « l'Hindutva », ou identité hindoue, il a été souvent accusé d'attiser les tensions communautaires, entre hindous et musulmans ou hindous et chrétiens. On lui reproche notamment d'avoir contribué à la campagne qui a conduit à la destruction de la mosquée d'Ayodhya en 1992 et encouragé les massacres du Gujarat en 2002. Parti des castes supérieures et des commerçants, plus libéral économiquement que le Congrès, le BJP a du mal à se débarrasser de son image de parti de la « hindi belt », au nord du pays.

L'Inde compte également un Parti Communiste encore puissant dans les États du Bengale Occidental (Calcutta) et du Kerala, tout au sud. En outre, de très nombreux partis n'existent que dans un ou quelques États de la fédération, tout en prétendant participer à des coalitions à l'échelle nationale. C'est le cas du BSP, parti qui représente les dalits (intouchables ou Haridjans) de l'Uttar Pradesh, mais attire également les votes de musulmans et paradoxalement de brahmanes, la caste la plus élevée de l'hindouisme. L'Uttar Pradesh est l'État le plus peuplé de la fédération (et aussi un des plus pauvres) et envoie 80 députés au parlement de Delhi. Le sud du pays compte quant à lui plusieurs partis qui se réclament de l'identité dravidienne (cette population à peau noire a précédé dans la péninsule les Indo-Européens ou Aryens du nord).

Bimaru, le cauchemar de l'Inde

C'est un lieu commun de caractériser l'Inde comme un pays de contrastes, aux religions, aux langues, aux races et aux climats d'une infinie variété. Du point de vue socioculturel, les différences sont énormes entre le sud de culture dravidienne, relativement paisible, aux taux de fécondité faibles et d'alphabétisation élevés, et un nord indo-européen où s'accumulent les retards de développement et se cristallisent la majorité des tensions intercommunautaires.

Faiblement industrialisés, les États du sud affichent des PIB/habitant inférieurs à la moyenne nationale mais leur niveau de développement humain est quant à lui nettement supérieur. Ainsi, le Kerala (30 millions d'habitants) ignore l'analphabétisme et son indice de fécondité a rejoint les seuils occidentaux (1,8 enfant par femme en 2001). Le Tamil Nadu voisin suit le même chemin. À l'opposé, quatre États du nord, qui regroupent 40% de la population, concentrent tous les maux du sous-développement : analphabétisme, infériorité statutaire de la femme, mortalité infantile, très forte croissance démographique, absence de politique sanitaire.

Ces États sont rassemblés sous l'anagramme Bimaru, d'un mot hindi qui signifie « maladie » et les désigne tous les quatre : Bihar, Madhya Pradesh, Rajasthan, Uttar Pradesh.

Les experts estiment que la stabilisation démographique de l'Inde interviendra beaucoup plus tard que celle de la Chine, prévue pour 2030. D'ici là, le fossé devrait continuer à se creuser entre le sud et le nord. À suivre.

Publié ou mis à jour le : 2021-06-22 16:05:32

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