Chiang Kaï-shek

Alain Rioux (Payot, 656 pages, 30 €,  2016)

Chiang Kaï-shek (1887-1975), qui a perdu la Chine au profit de Mao, reste mal connu. Il souffre d’une légende noire qui remonte pour les Français au portrait qu'en dresse André Malraux dans La condition humaine.

Par la suite, l’attention s’est évidemment focalisée sur la Chine communiste, tandis que la figure de Chiang a été quelque peu négligée, sauf à Taïwan, où il s’est réfugié en 1949, et où il a longtemps fait l’objet d’un véritable culte. Or, même sur l'île, les choses sont en train de changer.

À Taïwan, au fur et à mesure de la démocratisation de l’île depuis les années 1980, la mémoire de Chiang Kaï-shek est de plus en plus contestée, et a tendance à s’effacer. Sa biographie a été relue de manière plus critique par les nombreux chercheurs formés à l’école américaine (le journal intime du dirigeant, très détaillé, est désormais en dépôt à la Hoover Library de Stanford).

C’est paradoxalement dans une Chine continentale en train de s’ouvrir au capitalisme tout en affirmant un nationalisme très fort que l’on est en train de redécouvrir la figure d’un personnage qualifié de patriote, malgré ses insuffisances.

L’ouvrage d’Alain Roux permet au lecteur francophone de suivre les méandres de l’histoire chinoise de 1911 à 1949, avec un prolongement sur Taïwan depuis 1949. L'historien utilise la bibliographie la plus récente, y compris l’ouvrage du diplomate américain Jay Taylor, dont il tempère l’optimisme.

Le tableau d’ensemble reste relativement négatif : Chiang Kaï-shek apparaît comme un personnage velléitaire, autoritaire, trop archaïque pour être à la mesure des défis de son temps, même s'il est aussi celui qui a su ne pas céder à l’agression japonaise. Il apparaît comme l’homme des rendez-vous manqués et comme celui qui, à la différence de Mao, n’a pas pris sur lui de forcer l’Histoire chinoise, au risque de dizaines de millions de morts.

Voir : Un chef hésitant et dépourvu de projet

Publié ou mis à jour le : 10/01/2017 16:55:51