L'histoire de Jésus

7 clés pour décoder la Passion

En l’an 30, à Rome, personne ne peut imaginer qu’un sombre règlement de compte entre religieux, dans la lointaine province de Judée, va changer le sort du monde. Les témoignages s'accumulent pourtant très rapidement. Ils vont perpétuer les faits et gestes de Jésus, en particulier la Passion, qui reste le moment de sa vie le plus connu. 

L'exégèse des textes ainsi que les recherches historiques et archéologiques dévoilent désormais les différences entre les récits évangéliques, ainsi que le rôle joué par les différents acteurs de la passion de Jésus Christ.

Jean-Yves Riou
Revue Codex, 2000 ans d'aventure chrétienne, printemps 2017, #3.
Jésus : ce que savent historiens et archéologues

Codex, 2000 ans d'aventure chrétienneCet article est tiré du dossier « Jésus, la Passion au regard de l’histoire et de l'archéologie », Codex #03, printemps 2017, 176 pages, 15 euros.

Richement illustré, le magazine présente aussi un cahier pédagogique sur Les hommes de la Renaissance, une visite en images des Citadelles du Danube, des articles d'actualité dont une critique du dernier livre de Michel Onfray, Décadence etc. Notons aussi Jeanne d'Arc en bande dessinée. 

Codex est disponible en kiosque, en librairie et sur internet. Un régal pour les yeux et l'esprit (feuilleter le magazine).

1 ★ Un fait divers aux confins de l’Empire ★ 

Comme l’écrit l’historien américain John P. Meier, Jésus est un juif marginal dans une province marginale de l’Empire. Son arrestation, son procès et sa mort sur la croix (que nous appelons la Passion) restent, à l’échelle de l’Antiquité, un fait divers. Le plus étonnant, donc, est que nous possédions autant d’informations sur cette affaire. Selon Charles Perrot, le récit de la Passion est l’un « des rares documents de l’Antiquité rapportant un récit historique détaillé et chronologiquement disposé sur quelques heures. »

Buste de l'empereur romain Tibère, Musée archéologique régionale de Palerme.Nous connaissons le lieu, les protagonistes et le mobile (les récits évangéliques répondent à l’acte d’accusation). Des sources extérieures confirment les sources chrétiennes. Ainsi Flavius Josèphe écrit dans son livre Les Antiquités juives : « En ces temps-là paraît Jésus, un homme sage […] Et quand Pilate, sur la dénonciation des premiers parmi nous le condamna à la croix […] ». L’historien romain Tacite écrit dans les Annales : « Ce nom (chrétiens) leur vient de Christ, que sous le principat de Tibère, le procurateur Ponce Pilate avait livré au supplice. »

On pourrait objecter que Josèphe et Tacite ne font rien d’autre que reproduire ce que les chrétiens disaient du fondateur de leur religion, mais, à leur époque, certaines de ces données sont encore vérifiables. Josèphe écrit soixante ans après les faits et Tacite moins de cent. La polémique antichrétienne n’est pas en reste.

Celse, philosophe du IIe siècle, écrit : « On sait comment il (Jésus) a fini, la défection des siens, la condamnation, les sévices, les outrages et les douleurs de son supplice. Ce sont là des faits avérés qu’on ne saurait déguiser […] » On peut lire encore dans le Talmud de Babylone : « La veille de la Pâque on pendit Jésus le Nazaréen. »

La Palestine au temps de Jésus : en vert la zone occupée par Rome, en bleu, la zone «libre» du roi Hérode Antipas (Codex)

2 ★ La victime : un prophète charismatique itinérant ★ 

La victime de ce fait divers se nomme Jésus. Son nom est un diminutif et une forme abrégée de Yehôsâa‘ (Josué), le héros biblique, successeur de Moïse, qui fit entrer le peuple d’Israël dans la Terre promise. Ce nom est d’usage tellement courant en Palestine que, pour identifier le Jésus dont on parle, il est nécessaire de préciser son origine géographique, Nazareth, un village rural de Basse-Galilée.

Politiquement et économiquement stable pendant toute la vie de Jésus la région est administrée par le tétrarque Antipas, fils d’Hérode le Grand, et vassal de Rome. La vie religieuse d’un juif galiléen est structurée par de grands repères : la circoncision, les grands pèlerinages, dont celui à Jérusalem.

Il s’agit d’une religiosité populaire et rurale assez éloignée des débats « techniques » qui agitent sadducéens, pharisiens ou esséniens en Judée. Mais la foi galiléenne est très vivante. Elle est même le cœur d’une forte identité qui se sent concurrencée par la proximité de villes culturellement hellénisées, comme Sepphoris ou Tibériade, la nouvelle capitale.

Jésus quitte son métier d’artisan du bois pour suivre le mouvement baptiste de Jean (ce fait est débattu) et commence sa vie publique vers environ 28 de notre ère. En l’an 15 de Tibère selon le synchronisme de Luc. Jésus de Nazareth a laissé un souvenir fort à ses contemporains. On note une convergence forte des sources extérieures et des évangiles sur l’image qui restait du Jésus historique : c’était un maître, un rabbi, un sage ou un sophiste, comme disent les Grecs ; c’était aussi un thaumaturge.

Des choix originaux, comme l’abandon de son statut d’artisan ou le célibat, ont pu heurter les juifs pieux. Il est certain aussi qu’un Juif de Galilée, parlant avec autorité de la Loi et du Temple, ne pouvait qu’entrer en conflit violent avec les représentants de l’ordre établi.

Maquette de Jérusalem au Ier siècle, Musée d'Israël. Au premier plan, la ville basse; au second plan, la forteresse d'Antonia (à gauche) et le Temple (à droite).

3 ★ Les protagonistes du drame sont réunis à Jérusalem ★ 

Ce sont la Pâque juive et les sacrifices du Temple qui rassemblent à Jérusalem tous les protagonistes du drame. Les pèlerins de Palestine mais, aussi, de la diaspora rejoignent la ville sainte. Pour la Pâque, la population de Jérusalem explose. Même si les chiffres continuent d’être discutés, on estime que la population, habituellement autour de quarante mille habitants, double voire triple.

Les risques d’agitation et d’émeutes sont réels. Flavius Josèphe, dans les Antiquités juives, rapporte au moins deux incidents graves ayant marqué les fêtes de la Pâque, provoquant la mort de milliers de personnes. C’est la raison pour laquelle Ponce Pilate, le gouverneur romain de la Judée, qui réside habituellement sur la côte, à Césarée, la capitale administrative, a fait le déplacement. (...)

Publié ou mis à jour le : 2018-11-27 10:50:14

Voir les 9 commentaires sur cet article

davar (14-12-2017 10:55:28)

Touttankarton, apprenez à faire des cadeaux corrects, à tout le moins vérifiés. Christ vient de χριστός / christós, traduction grecque du terme hébreu mashia'... Lire la suite

Orlando (03-07-2017 11:27:35)

En l'état de nos connaissances historiques et linguistiques, ce texte me paraît tout à fait pertinent. Je pense que la comparution devant le Sanhédrin réuni de manière clandestine me paraît aut... Lire la suite

Razouguet (24-05-2017 20:31:34)

'Il semble que cette troupe ait eu besoin d’aide pour le localiser et l’arrêter discrètement, à une période où la ville sainte est envahie par des pèlerins du monde entier.'Du calme... Il fa... Lire la suite

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