« La fin de l’Antiquité ne vit pas le déversement massif d’une horde de barbares chevelus au sein d’un empire aux mœurs policées », écrit Sylvie Joye dans L’Europe barbare. « La plupart des chercheurs ne considèrent plus qu’un grand nombre d’individus aurait pénétré subitement dans l’ancien empire, que ce soit de façon belliqueuse ou non. » Depuis longtemps, des particuliers ou de petits groupes venus de l’extérieur s’étaient installés, et en partie romanisés. On estime qu’ils auraient représenté 5% de la population.
À partir de la fin du IVe siècle, un changement d’échelle intervient avec l’arrivée de « super-groupes ». Difficile d’avancer des chiffres. Bruno Dumézil rappelle que le groupe des Vandales, l’un des rares pour lequel nous possédions quelques données, aurait compté 80 000 individus, dont 15 à 20 000 guerriers. Au même moment, l’Empire compte sans doute plus de cinquante millions d’habitants. Peut-on parler de « grandes invasions » pour cette époque ?
L’expression n’est pas neutre. Elle a été forgée au XIXe siècle dans des pays latins qui correspondent à l’ancien Empire romain (la France, l’Italie, l’Espagne). En face, les Allemands, qui se considèrent comme les descendants des « Germains », préféraient parler de Völkerwanderungen, la migration des peuples. Tout est une question de point de vue ! Aujourd’hui, les historiens évitent d’utiliser ces termes pour souligner l’originalité et la complexité du phénomène.
Les barbares n’avaient probablement aucune intention de détruire l’Empire romain. Ils voulaient profiter des avantages d’un espace riche et paisible, ce qui ne les empêche pas de semer parfois la violence, notamment au Ve siècle. Ces minorités ont engendré d’importantes transformations culturelles et politiques quand elles ont pris le pouvoir sur la population, du fait de la dissolution de l’autorité impériale.
Cet article est tiré du dossier « les Barbares - Des grandes invasions au baptême de Clovis », Codex #13, octobre 2019, 15 euros.
Toujours richement illustré, le magazine consacre cet automne un cahier pédagogique à l'enseignement de la guerre d'Algérie et publie une passionnante interview de Bruno Béthouart à l'occasion du centenaire de la CFTC : « les mineurs de la CFTC ont sauvé la liberté syndicale »....
Codex est disponible en kiosque, en librairie et sur internet. Un régal pour les yeux et l'esprit (feuilleter le magazine).
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Aucune réaction disponible