Le 4 janvier 1894 prend forme l'alliance franco-russe.
Une convention militaire secrète est signée entre le gouvernement républicain de la France, sous la présidence de Sadi Carnot, et le gouvernement autocratique du tsar Alexandre III, qui a pris le contrepied de la politique libérale et réformatrice de son prédécesseur, Alexandre II.
Isolement diplomatique
L'alliance franco-russe est le mariage de la carpe et du lapin. Mais elle a les faveurs de l'opinion publique qui cultive avec passion sa haine de l'Allemagne ainsi que de l'Angleterre.
Elle met fin à l'isolement diplomatique de la France, consécutif à sa défaite de 1870 face à l'Allemagne.
Le chancelier allemand Bismarck avait échafaudé en effet dès 1873 une Entente des Trois-Empereurs ( Allemagne, Autriche-Hongrie, Russie).
Il avait réussi à la maintenir malgré les rivalités austro-russes dans les Balkans, qui s'étaient manifestées avec éclat au congrès de Berlin, et avait pu la renouveler en 1881.
L'année suivante, en 1882, il avait qui plus est formé une Triple-Alliance ou Triplice avec l'Autriche-Hongrie et l'Italie.
Le chancelier ne s'en tient pas là. Pour circonvenir toute alliance de revers entre la Russie et la République française, il conclut même en juin 1887 une entente secrète avec le tsar Alexandre III, à l'insu de l'empereur François-Joseph Ier.
C'est un traité de contre-assurance par lequel la Russie s'engage à rester neutre dans le cas d'une guerre d'agression de la France contre l'Allemagne ; en échange, celle-ci laisse les mains libres au tsar dans les Balkans !
Dès la démission du chancelier, le 20 mars 1890, et son remplacement par Leo von Caprivi, Guillaume II décide de ne pas renouveler ce traité qui va à l'encontre des intérêts de son plus proche allié, l'empereur d'Autriche.
Alliance contre nature
À Paris comme à Saint-Pétersbourg, l'alliance franco-russe apparaît nécessaire après que l'empereur allemand Guillaume II a rompu avec la subtile diplomatie de Bismarck et resserré ses liens avec l'Autriche-Hongrie.
Le renouvellement anticipé de la Triplice (Berlin, Vienne, Rome) en mai 1891 précipite les choses. L'alliance franco-russe est préparée par la visite d'une escadre française à Cronstadt, le 25 juillet 1891, puis celle d'une escadre russe à Toulon, en octobre 1893.
Un projet de convention militaire prévoit que chaque partie portera secours à l'autre en cas d'agression : si la France est attaquée par l'Allemagne, la Russie s'engage à l'aider en mettant en ligne 700 000 à 800 000 hommes ; réciproquement, si la Russie est attaquée par l'Allemagne, la France lui apporterait l'aide de 1 300 000 hommes ; enfin, la mobilisation de tout ou partie des forces de la Triplice entraînerait ipso facto la mobilisation générale en France et en Russie !
Il est entériné par le tsar Alexandre III le 27 décembre 1893, enfin par le président de la République française Sadi Carnot le 4 janvier 1894 (l'un et l'autre disparaîtront dans l'année).
Cette alliance franco-russe, à laquelle se rallie - à reculons - le Royaume-Uni, apparaît comme la première d'une longue suite d'initiatives qui, mises bout à bout, vont conduire l'Europe sur le chemin de la guerre...
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franbaty (08-01-2014 18:11:06)
"Article très intéressant. La responsabilité de Poincaré est cependant limitée et est à partager grandement avec celle de Guillaume II et de la haute hiérarchie militaire allemande. D'au... Lire la suite
Jean-Luc FERLANDE (07-01-2014 12:19:09)
Bonjour, J'apprécie la qualité de vos articles mais suis surpris parfois par certaines de vos interprétations. Ce n'est pas la France qui a déclaré la guerre à l'Allemagne en 1914 mais l'inve... Lire la suite
Jean-Luc FERLANDE (07-01-2014 12:17:39)
Bonjour, J'apprécie la qualité de vos articles mais suis surpris parfois par certaines de vos interprétations. Ce n'est pas la France qui a déclaré la guerre à l'Allemagne en 1914 mais l'invers... Lire la suite