6 avril 1536

Quesada explore la Nouvelle-Grenade

Le 6 avril 1536, le conquistador Gonzalo Jimenez de Quesada quitte Santa Marta, sur la côte atlantique de l'actuelle Colombie. Il gagne l'intérieur avec 600 hommes et une centaine de chevaux. Pendant trois ans, coupé de toutes relations avec ses compatriotes, il va explorer le pays. Il va fonder sa future capitale, Bogotá mais aussi nourrir le mythe de l'Eldorado... et découvrir la pomme de terre.

Fabienne Manière
Malchanceux conquérants

Lorsque les premiers Espagnols accostent sur le rivage de la future Colombie, la plus grande partie du territoire est occupée par des tribus clairsemées d'Amérindiens mais sur les hauts plateaux andins, toutefois, vit un peuple d'une culture relativement avancée, les chibchas.

Le premier Espagnol à toucher le rivage sud-américain, en 1499, est un ancien compagnon de Christophe Colomb, Alonso de Ojeda, accompagné du cartographe basque Juan de la Cosa et du pilote florentin Amerigo Vespucci dont le prénom viendra à désigner le continent ! L'expédition ramène des émeraudes qui font forte impression à la cour des rois d'Espagne. Une deuxième expédition, en 1501, avec le futur découvreur du Pacifique, Vasco Núñez de Balboa, explore le littoral, y compris la superbe rade de Carthagène, la sierra Nevada et l'embouchure du principal fleuve colombien, la Magdalena.

Vers 1530 sont fondés les établissements portuaires de Carthagène (Cartagena) et de Santa Marta. Alonso de Ojeda est nommé gouverneur du nouvel établissement mais la Cour d'Espagne s'en désintéresse, du fait des faibles quantités d'or trouvées sur le territoire.

En 1535, Pedro de Lugo, ancien gouverneur de Ténériffe, est nommé à Santa Marta. Il projette d'explorer l'arrière-pays mais tombe malade. Son fils, chargé de le remplacer, préfère s'enfuir (les poches pleines). Le gouverneur confie alors les rênes de la colonie à son lieutenant Gonzalo Jimenez de Quesada. Celui-ci est un homme de loi d'environ 34 ans venu dans le pays comme magistrat.

Faute de ressources sur place pour entretenir la troupe qui vient d'arriver d'Espagne et des Canaries avec Pedro de Lugo, Quesada ne voit d'autre solution que de partir vers l'intérieur en quête de terres.

Il s'adjoint 900 conquistadores (conquérants en espagnol). 300 d'entre eux embarquent sur cinq brigantins et remontent le fleuve Magdalena. Quesada part de son côté par la voie de terre avec les 600 hommes restants et cent chevaux solidement caparaçonnés. Il prévoit de retrouver la flotille à une quarantaine de lieues en aval. Mais il n'y a personne au rendez-vous, car trois des navires se sont échoués et les autres, drossés par une tempête, ont dû revenir à Santa Marta.

Quesada reçoit un message du gouverneur, au seuil de la mort, qui lui enjoint de poursuivre sa mission... C'est ainsi qu'il gagne les hauts plateaux au prix d'immenses difficultés. Heureusement, les Indiens locaux ne lui opposent guère de résistance.

Il arrive ainsi au coeur de la civilisation chibcha et a la chance de découvrir de l'or et des émeraudes en abondance. Dans une vallée gouvernée par un roi du nom de Bogotá, il fonde en août 1538 une cité appelée Santa Fé de Bogotá et baptise la contrée Nouveau royaume de Grenade (Nouvelle-Grenade) en souvenir de sa ville natale. Autant de noms qui seront consacrés par la postérité !

Fructueuse découverte

Quesada, qui n'a plus avec lui que 166 hommes, s'apprête à repartir pour la côte quand il apprend une nouvelle incroyable : dans cette contrée inconnue, deux autres expéditions espagnoles de même taille sont en voie de le rejoindre. L'une, guidée par Sebastián de Belalcázar, vient du lointain Pérou, que Pizarre a conquis quelques années plus tôt ! Elle a exploré au passage la côte du Pacifique et fondé la cité de Cali (aujourd'hui la troisième ville de Colombie). L'autre vient de la vallée de l'Orénoque. Elle est guidée par Nicolas Federmann, nouveau gouverneur de la colonie du Venezuela. Les trois hommes vont pouvoir ainsi compléter l'exploration des plateaux andins.

Peu organisés, les Chibchas se soumettront sans subir de guerres aussi violentes que les Incas du Pérou et les Aztèques du Mexique. Ils vont aussi révéler aux Espagnols les secrets de leur relatif bien-être : l'extraction de sel à partir de sources salées et surtout la culture d'une curieuse «truffe», pas spécialement savoureuse mais exceptionnellement nutritive et facile à cultiver, la pomme de terre !

Célibataire, Quesada mourra octogénaire, riche et respecté, après avoir encouragé son neveu à partir dans la vallée de l'Amazone, à la découverte du mythique El dorado (ou Eldorado, l'Homme doré).

Eldorado, un mythe devenu universel

Les premiers Espagnols qui mettent le pied en Colombie sont déçus par le peu d'or qu'ils y trouvent. Rien de comparable avec les trésors du Mexique et du Pérou. Mais vers 1530 commence à courir une rumeur selon laquelle il existerait dans certaines régions un chef indien (un cacique) littéralement couvert d'or, el Dorado. Cette rumeur va faire tourner la tête à beaucoup de conquistadors et alimenter longtemps après le mythe d'un pays richissime, Eldorado.

Le cinéaste allemand Werner Herzog en a tiré la matière de son chef-d'oeuvre : Aguirre, la colère de Dieu (1972), avec Klaus Kinski dans le rôle principal. Très certainement le document le plus représentatif de l'ère des conquistadors.

Dans les faits, El dorado a un fond de vérité comme l'atteste une tradition indienne recueillie au XVIIe siècle : il était habituel dans un royaume chibcha des bords du lac de Guatavita, près de Bogotá, que les nouveaux rois ou caciques se mettent nu, s'enduisent le corps de poudre d'or et prennent place dans une barque cérémonielle pour faire une offrande aux dieux... On n'a toutefois encore rien trouvé au fond dudit lac, ni or, ni émeraudes.

Publié ou mis à jour le : 2021-11-03 18:27:55

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