23 janvier 1579

Les Provinces-Unies forment l'Union d'Utrecht

Par l'Union d'Utrecht du 23 janvier 1579, sept provinces à majorité protestante du nord des Pays-Bas se constituent en confédération sous le nom de « Provinces-Unies » (elles forment aujourd'hui les Pays-Bas).

Les dix provinces du sud, à majorité catholique, restent fidèles à leur souverain, le roi d'Espagne, et conservent le nom de Pays-Bas espagnols (elles forment aujourd'hui la Belgique).

Episode iconoclaste en 1566 : calvinistes détruisant les ornements d'une église-temple (gravure de Franz Hogenberg pour un livre d'histoire de 1588)

Affrontement entre « gueux » et Espagnols

De Groningue, au nord, à Cambrai, au sud, les Dix-Sept Provinces appartenaient un siècle plus tôt au duc de Bourgogne Charles le Téméraire.

Par le hasard des successions et des mariages, elles échoient à l'empereur d'Allemagne Maximilien Ier de Habsbourg, puis à son successeur Charles Quint, enfin au fils de celui-ci, le roi d'Espagne Philippe II. Philippe II les administre par l'entremise de sa demi-soeur Marguerite de Parme et d'un groupe de fonctionnaires bourguignons aux ordres du cardinal de Granvelle.

À la fin du XVIe siècle, on est en pleines guerres de religion. Catholiques et protestants s'affrontent aux Pays-Bas comme ailleurs en Europe.

Guillaume de Nassau, jeune noble catholique d'origine allemande, élevé à la cour de Charles Quint, reçoit de Philippe II la charge de « Stathouder » (gouverneur, ou chef, en néerlandais) de la riche province de Hollande. Lui-même a hérité de la principauté d'Orange, au sud de la France, d'où la couleur de ses armoiries... qui est aussi celle de l'équipe de football néerlandaise actuelle !

À l'unisson des nobles hollandais qui craignent d'être dépouillés au profit de gouverneurs espagnols, il dénonce les persécutions contre les protestants calvinistes et obtient la mise en congé du cardinal de Granvelle.

En 1565, les nobles publient à Breda un « compromis des Nobles » par lequel ils exigent la fin de l'Inquisition et la convocation d'états généraux. Ils se rendent en délégation à Bruxelles pour remettre leur texte à Marguerite de Parme, gouverneur général des Pays-Bas. Celle-ci, qui les voit arriver de son balcon de l'hôtel de ville, glisse à l'un de ses conseillers : « Mais que me veulent donc ces gueux ? » L'expression fait florès et les protestataires, quoique nobles, s'énorgueillissent de cette appellation de « gueux », allant jusqu'à adopter pour insignes l'écuelle et la besace.

Philippe II, en qualité de chef de la Contre-Réforme catholique, est désireux de remettre de l'ordre dans ses provinces rebelles. En août 1567, il nomme un nouveau gouverneur des Pays-Bas en la personne du duc d'Albe, à la sinistre réputation. Celui-ci arrive à Bruxelles avec le titre de vice-roi et les pleins pouvoirs. Il occupe le pays avec 60 000 hommes : Espagnols, Napolitains, Allemands.

La répression ne se fait pas attendre. Elle est dirigée par le Conseil des troubles, que les habitants surnomment le Conseil du sang (« Bloedraat ») en référence aux 8 000 exécutions dont il se rendra responsable. L'indignation culmine lorsqu'après une agression perpétrée par les calvinistes contre des lieux catholiques, deux chefs des gueux, les comtes d'Egmont et de Hornes son jugés et condamnés à mort. Les deux nobles sont décapités à Bruxelles le 5 juin 1568.

L'Union d'Utrecht, Joseph Denis Odevaere, entre 1815 et 1830, Amsterdam, Rijksmuseum.

Vers une « Guerre de Quatre-Vingts ans »

L'exécution des deux nobles marque le début d'une longue guerre d'indépendance. Guillaume d'Orange, dit « le Taciturne », arrive à s'enfuir en Allemagne. Il se convertit au calvinisme et revient en mars 1572 aux Pays-Bas avec une petite armée de 20 000 hommes et des marins, les « gueux de la mer ». Il devient le chef de l'insurrection avec le titre de Stathouder.

La situation dégénère avec la libération de Leyde par les « gueux », le 3 octobre 1574, puis le sac d'Anvers par les tercios, le 4 novembre 1576. Ce jour-là, les redoutables soldats espagnols, qui n'ont pas reçu leur solde depuis plusieurs mois, pillent la cité marchande. La « furie d'Anvers » cause plusieurs milliers de morts et précipite la rupture entre les Espagnols et les Néerlandais !

Guillaume reçoit le soutien fervent de l'ensemble des Néerlandais, unis contre l'oppression espagnole. Il obtient des délégués des Dix-Sept Provinces qu'ils signent la Pacification de Gand, le 8 novembre 1576, par laquelle les habitants de la Hollande et de la Zélande obtiennent le droit de pratiquer le calvinisme à leur gré.

Arrive un nouveau gouverneur. Ce n'est autre que le jeune et prestigieux don Juan d'Autriche, demi-frère de Philippe II et héros de la victoire de Lépante sur les Turcs. Il feint de retirer les troupes espagnoles et d'accepter les termes de la Pacification. Là-dessus, il s'empare de Namur. Mais comme les armées de Philippe II sont retenues en France dans d'autres guerres de religion, il lui est impossible de restaurer l'autorité du roi sur la totalité des Pays-Bas.

Arrive un nouveau gouverneur espagnol, Alexandre Farnèse. Faute de soumettre l'ensemble des provinces, il monte habilement les catholiques du sud contre les calvinistes du nord.

Craignant l'hégémonie protestante, les représentants des dix provinces du sud concluent l'Union d' Arras, le 6 janvier 1579, par laquelle ils dénoncent la Pacification de Gand, rejettent l'allégeance à Guillaume d'Orange et réaffirment leur fidélité au roi d'Espagne. La division du pays devient irrémédiable. Il ne reste plus aux Provinces-Unies du nord qu'à confirmer à Utrecht leur propre union autour de la Hollande. C'est chose faite le 23 janvier suivant, avec les états généraux qui rassemblent  les délégués des provinces.

Échec espagnol et triomphe hollandais

Le roi d'Espagne ne se tient pas pour battu. Il bloque le port d'Anvers par un système de sas à l'embouchure de l'Escaut et interdit aux navires hollandais l'accès à Lisbonne. Il espère ainsi ruiner les marchands hollandais et flamands qui tirent leurs revenus de la revente en Europe des marchandises que ramènent les vaisseaux hispaniques du Nouveau Monde et d'Asie. Mauvais calcul...

La furie espagnole à Anvers (H. Leys, musée royal, Bruxelles)

Anvers retombe aux mains des Espagnols en 1585 et la moitié des 50 000 habitants s'enfuient aux Pays-Bas pour rester protestants. Le grand port flamand va dès lors décliner irrémédiablement.

Dans le même temps, Amsterdam, concurrent hollandais d'Anvers, offre l'hospitalité à des centaines de riches et entreprenants marchands juifs ou protestants chassés des pays occupés par les Habsbourg. Ces marchands font cause commune avec leurs homologues hollandais pour développer une flotte de commerce et lancer des expéditions outre-mer, en vue d'attaquer l'Espagne à la source de sa richesse.

C'est le début d'une irrésistible expansion. Fortifiées par leur révolte, les Provinces-Unies vont devenir le premier des États modernes, avec une économie capitaliste et un empire colonial très rentable, avec également un régime républicain oligarchique.

Publié ou mis à jour le : 2022-01-20 14:07:40
arlette (04-03-2015 12:31:21)

il serait souhaitable que les illustations des textes comportent une légende mrrci

Mario d'Isidoro (23-01-2013 11:28:22)

En ce qui concerne Trajan vous avez commis une erreur. Ce n'est pas le premier Cesar- et non empereur car il n'y en a jamais eu a Rome- a succeder a la dynastie claudio-julienne mais Nerva, senateu... Lire la suite

Volpi Rémy (10-08-2010 14:59:17)

Bonjour. Bel article. Petite rectification néanmoins : les dix provinces du sud formaient non seulement la Belgique d’aujourd’hui mais encore l’actuelle Région française du Nord-Pas de Cal... Lire la suite

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