19 mars 1687

Mort tragique de Cavelier de la Salle

Le 19 mars 1687, René-Robert Cavelier de La Salle, est tué par un de ses compagnons au terme d'une expédition dans la région du Mississippi.

Cinq ans plus tôt, le 9 avril 1682, il avait pris possession de cet immense territoire au coeur de l'Amérique du nord et l'avait baptisé Louisiane. De retour en France, il avait aussitôt manifesté le désir de repartir en exploration...

Mésentente

Après beaucoup d'hésitations, le roi Louis XIV confie à Cavelier de la Salle une nouvelle mission : fonder un établissement aux bouches du Mississippi.

La Salle quitte La Rochelle le 1er août 1684 avec quatre vaisseaux, le Joly, une frégate de 36 canons, et trois barques de transport, la Belle, l'Aimable et le Saint-François. La flotille est placée sous les ordres du capitaine de Beaujeu. Elle compte 288 personnes, dont une centaine de soldats, six religieux, une douzaine de femmes, quelques enfants et deux neveux de l'explorateur.

René Robert Cavelier de la Salle (gravure du XVIIe siècle)La flotille entre dans le Golfe du Mexique 58 jours plus tard et relâche à Saint-Domingue où le Saint-François est pris par des flibustiers.

Cavelier de la Salle repart vers son objectif mais, suite à une erreur sur la longitude, il dépasse le delta du Mississippi sans le savoir.

C'est ainsi qu'il touche terre début janvier 1685 dans une baie de la côte du Texas moderne qu'il appelle baie Saint-Bernard, devenue depuis la baie Matagorda, située entre les villes modernes de Corpus Christi et de Houston, à environ 150 km au nord-est de la première et 200 km au sud-ouest de la seconde.

Mais au sein de l'expédition, l'atmosphère s'alourdit. Le capitaine de Beaujeu ne supporte plus la brutalité de La Salle.

Après deux mois de recherche d'un site d'installation, il débarque l'explorateur, les membres de son expédition et tout leur équipement, ne leur laissant qu'un petit navire, La Belle ; le deuxième, l'Aimable, s'est échoué quelques jours auparavant. Lui-même rentre en France le 12 mars avec le troisième bateau, le Joly.

Expédition de Robert Cavelier de La Salle à la Louisiane en 1684 (Théodore Gudin, 1844, musée de Versailles)

Abandon

Cavelier de la Salle, demeure sur place avec environ 180 personnes, diminuées par la maladie et le découragement. Il fait construire un camp et lance ensuite la construction d'un fort. Il explore la côte avec la Belle et une trentaine d'hommes, toujours en quête de l'embouchure du Mississippi, tandis que son fidèle Joutel commande le fort Saint-Louis avec une colonie réduite à 34 hommes, femmes et enfants.

La Salle passe encore plus d'une année à chercher le Mississippi tout en voyant sa colonie fondre à vue d'oeil, du fait des conditions de vie insalubres et des escarmouches indiennes.

Enfin, la Belle s'étant échouée dans la baie de Matagorda, il décide d'aller chercher du secours en Nouvelle-France, au nord du continent nord-américain ! Il part avec plusieurs compagnons mais, exténués et fatigués des errances de leur chef et de ses exigences, ceux-ci l'attirent dans une embuscade et le tuent le 19 mars 1687. Les survivants, au nombre de sept, achèvent l'impossible voyage à pied jusqu'au fort Saint-Louis des Illinois et rejoignent la civilisation.

Oubli

L'expédition de La Salle ayant échoué, Louis XIV et son entourage ne s'occupent désormais plus que des guerres européennes et la Louisiane sort de leur esprit.

Entretemps, la petite colonie de fort Saint-Louis du Texas a survécu jusque vers le milieu de l'hiver 1688-89. Elle a été en définitive attaquée par des Indiens Karankawa qui ont massacré les survivants sauf cinq enfants, qui furent emmenés par les femmes de la tribu.

En mars 1689, venu de la Nouvelle-Espagne, le général et gouverneur Alonso de León découvre les ruines du fort Saint-Louis et constate le massacre. Il revient l'année suivante pour brûler les bâtiments encore debout et enterrer les huit canons de fer qu'il trouve dans le fort. Il apprend la présence de Français dans des tribus indiennes de la région et les retrouve. Il s'agit de deux des meurtriers de La Salle. Emmenés à Mexico, ils finiront en prison.

Des enfants sont également récupérés et emmenés à Mexico. Trois deviendront soldats dans l'armée espagnole et seront capturés par un navire français peu après. Deux d'entre eux deviendront interprètes au service des expéditions du Français-Canadien Pierre Le Moyne d'Iberville, le fondateur de la Louisiane. C'est par eux que l'on apprendra comment a fini le fort Saint-Louis.

Dès lors, la présence française dans les abords de ce qui deviendra le Texas moderne sera assurée par les passages successifs de hardis explorateurs et négociants, dont le plus célèbre fut un autre Français-Canadien, Louis Juchereau de Saint-Denis.

Les Français présents au Texas

Le site de l'expédition de La Salle est tombé dans l'oubli, restant seul marqué sur les cartes françaises comme « lieu de l'établissement de M. de La Salle ».

Mais en 1978, l'archéologue J. Barto Arnold III (Texas Historical Commission) se mit à la recherche de l'épave de la Belle. Il la découvrit en juillet 1995, gisant dans 12 pieds d'eau boueuse, près de la Baie Matagorda, avec un détecteur de résonance qui localisa ce qui se révéla être un canon de bronze donné à La Salle pour son expédition par le Comte de Vermandois, Amiral de France, identifié grâce aux inscriptions gravées sur le dessus et toujours enfermé dans les flancs de la Belle.

Ce fut le début de la résurrection du site des exploits malheureux de La Salle et le départ d'un engouement des Américains pour les premiers colons européens établis sur la côte du Texas. Un fond a été réuni grâce à de nombreux donateurs. Il a permis d'aménager un coffre autour du site pour le mettre à sec et excaver les restes du navire.

En octobre 1996, on a aussi découvert le site présumé du fort Saint-Louis et exhumé les huit canons enterrés par Alonso de León en 1690. En février 1998, nouvelle émotion avec la découverte d'une épave que l'on croit être celle de l'Aimable, mais un démenti fut publié en août 1998. Il s'agissait de l'une des 38 épaves historiques de la baie Matagorda. Les recherches se poursuivent et l'État du Texas prend en main avec les collectivités locales concernées l'exploitation des reliques sous formes d'expositions dans divers endroits.

On estime qu'il faudra encore près de dix ans pour la mise en oeuvre de cet important site à des fins éducatives et touristiques, avec un budget de 2 millions de dollars.

Bibliographie

Les détails cités dans ce texte sur l'expédition de La Salle et le destin de la petite colonie peuvent être retrouvés dans l'ouvrage de Robert S. Weddle, The French Thorn - Rival explorers in the Spanish Sea, 1682-1762, Texas A and M University Press, College Station, 1991, 435 pages.

Camille Vignolle
Publié ou mis à jour le : 2020-12-19 16:06:30
Yves Petit (21-03-2021 21:03:14)

Il n'est pas nécessaire de dire Français-Canadiens ou Canadiens-Français quand on parle des habitants de la Nouvelle-France ou du Canada du temps de la Salle. Le seul nom de Canadien suffit. En fai... Lire la suite

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