18 novembre 1890

Le « toast d'Alger »

Le 18 novembre 1890, le cardinal Charles Lavigerie, archevêque d'Alger, prend prétexte d'une visite de l'escadre française de la Méditerranée dans sa ville pour lever son verre devant les officiers. Il signifie par là son ralliement à la République laïque et rejoint l'aspiration de la gauche républicaine à « civiliser les races inférieures » (citation)... 

Le cardinal Charles Lavigerie (31 octobre 1825, Bayonne ; 27 novembre 1892, Alger) (Léon Bonnat, 1893, musée de Versailles)

Un ardent partisan de la colonisation

Nommé archevêque d'Alger en 1867, à 42 ans, le cardinal Charles Lavigerie se montre un ardent partisan de la colonisation, dans le désir de christianiser la population. En cela, il s'oppose à l'empereur Napoléon III et aux Bureaux arabes du régime militaire qui prônent plutôt un protectorat respectueux de l'autonomie des indigènes (sénatus-consulte de 1864). Quand les républicains arrivent au pouvoir en 1870, il rédige à leur attention le 1er décembre 1870 des Notes sur l'Algérie que le nouveau régime mettra en oeuvre dans les grandes lignes : « Deux choses manquent (en Algérie) et sont absolument nécessaires :
1°) Des terres pour établir des colons ;
2°) Des colons pour peupler les terres.
Les terres manquent et on ne peut s’en procurer parce que les Arabes qui en sont devenus propriétaires, de simples usufruitiers qu’ils étaient auparavant, et cela en vertu du déplorable sénatus-consulte de 1864, les possèdent en commun et ne peuvent, par conséquent, les aliéner.
Deux remèdes sont possibles à cet état de choses. Le premier est la constitution immédiate de la propriété, au moins par famille, dans les tribus. Le second est l’expropriation moyennant un prix équitable, pour cause d’utilité publique. »
(note).

Le « Ralliement »

En 1890, le prélat jouit en France et dans le monde d'un immense prestige dû à son ouverture d'esprit et à son action missionnaire. Il a fondé les Pères blancs et les Soeurs missionnaires de Notre-Dame d'Afrique. Deux ans plus tôt, il s'est aussi lancé dans une vigoureuse campagne contre l'esclavage...

Le pape Léon XIII souhaite en finir avec les querelles sans fin entre l'Église catholique et les dirigeants laïques de la IIIe République, qui divisent la France et empêchent les catholiques de participer à la vie politique de leur pays. Il fait donc appel au cardinal pour amorcer le Ralliement des catholiques au « gouvernement actuel de leur pays ».

C'est le fameux « toast d'Alger » :
« Quand la volonté d'un peuple s'est légalement affirmée, quand la forme d'un gouvernement n'a rien de contraire aux principes qui seuls peuvent faire vivre les nations chrétiennes et civilisées ; quand, pour tenter d'arracher son pays aux abîmes qui les menacent, il faut l'adhésion à cette forme de gouvernement, le moment vient de déclarer, enfin, l'épreuve faite et de sacrifier tout ce que la conscience et l'honneur ordonnent à chacun de nous de sacrifier pour le salut de la religion et de la patrie. C'est ce que j'enseigne autour de moi. Et ce que je souhaite voir enseigner en France par tout notre clergé et, en parlant ainsi, je suis certain de n'être désavoué par aucune voix autorisée ».

Mais avant que le toast n'ait produit la réconciliation attendue, l'Affaire Dreyfus va raviver la fracture entre militants catholiques et laïcs ! Il faudra encore beaucoup d'années, une quinzaine, avant que les extrémistes des deux camps ne laissent la place à une cohabitation de bon aloi, fondée sur la séparation des Églises et de l'État.

Publié ou mis à jour le : 2022-05-13 09:23:13

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