20 juin 1894

Alexandre Yersin isole le bacille de la peste

Le 20 juin 1894, Alexandre Yersin isole à Hongkong le bacille de la peste. Ce médecin militaire d'origine suisse, formé à l'Institut Pasteur, va ensuite employer son énergie et ses compétences au service des Vietnamiens, ce qui lui vaut encore aujourd'hui d'être très populaire dans ce pays...

Gabriel Vital-Durand

class="centre">Cours de microbie technique à l'Institut Pasteur en 1889 ; de gauche à droite : les professeurs Laveran, Roux et Metchnikoff ainsi que le jeune Yersin

Jeune homme anticonformiste

Le jeune homme est né en 1863 dans une famille puritaine de la région de Lausanne. Il s'intéresse très jeune à la flore et à la faune, avant de se déterminer à étudier la médecine, d'abord à Marbourg, puis à Paris.

Engagé comme préparateur par Roux, il effectue à l'Institut Pasteur une thèse sur la tuberculose tout en contribuant à l'isolement de la toxine diphtérique. Faisant preuve d'une indépendance d'esprit singulière pour l'époque, il suit également le cours de bactériologie de Robert Koch, ancien rival de Louis Pasteur, à l'Institut d'hygiène de Berlin.

Épris d'aventure, Alexandre Yersin obtient en 1890 un poste de médecin militaire en Indochine et en profite pour explorer les hauts plateaux de Cochinchine et d'Annam.

En 1894, il se lance dans la plantation d'hévéas. C'est alors qu'une épidémie de peste ravage la Chine méridionale. Le chercheur est aussitôt mandaté par le gouvernement français et l'Institut Pasteur pour enquêter sur les sources du mal.

Alexandre Yersin se rend à Hongkong où l'a précédé une équipe japonaise. Il va communiquer avec eux sur ses travaux mais c'est à lui qu'en définitive reviendra le mérite de la découverte.

Pourvu de moyens dérisoires, Yersin réussit à identifier et isoler en trois semaines le responsable de ce fléau immémorial qui terrorise les hommes de toutes conditions et de tous pays. Il s'agit d'un microbe très résistant qui porte depuis lors le nom de son découvreur : le bacille de Yersin (« Yersinia pestis »).

Il existe à l'état naturel chez certains rongeurs d'Asie et peut être transmis par l'intermédiaire de puces à des rats et, de là, à l'homme... Les puces sont rebutées par l'odeur des moutons et des chevaux, de là le fait que les bergers et les palefreniers n'étaient pas contaminés par la maladie.

Le docteur teste avec succès le bacille sur des cochons d'Inde, dans la paillotte ci-contre.

Revenu à Paris l'année suivante, Alexandre Yersin met au point avec Calmette et Roux un vaccin et un sérum contre la peste. De retour à Canton, il démontre l'efficacité de ces remèdes sur un séminariste promis à la mort.

Un Franco-Suisse aimé des Vietnamiens

Le médecin porte dès lors ses efforts sur le développement des Instituts Pasteur fondés à Hanoi, Saigon, Nha Trang et Dalat (sérums, vaccins, travaux d'hygiène). Il encourage en parallèle l'introduction dans le pays de l'arbre à caoutchouc et de l'arbre à quinine (un médicament destiné à prévenir le paludisme). Il élève aussi des chevaux pour la fabrication du sérum et implante des races de vaches laitières.

Yersin promeut l'extraction industrielle de la quinine et choisit Dalat pour y établir des sanatoria. Ses initiatives lui valent de devenir le premier doyen de la faculté de médecine de Hanoï en 1902, mais il renonce bientôt aux honneurs pour défendre les intérêts du peuple annamite fort méprisé et exploité, vivant au sein de la population dans le village de Soui Dau, près du port de Nha Trang (Annam).

Selon les termes d'une lettre écrite vers 1890 : « demander de l'argent pour soigner un malade, c'est un peu lui dire la bourse ou la vie ! »

Alexandre Yersin meurt en 1943, pendant l'occupation japonaise. C'est à peu près la seule figure de l'époque coloniale qui n'a pas cessé d'être vénérée au Viet-Nam, où toutes les villes ont un lycée à son nom. Paradoxalement, la Suisse et la France (dont il avait adopté la nationalité) l'ont en revanche bien délaissé...

Publié ou mis à jour le : 2020-02-27 16:05:11
BONHOURE (29-03-2020 13:37:25)

Les médecins militaires français eux ne l'ont pas oublié et ont édité un livre sur sa vie, il y a quelques années.

Benoit de BIEN (23-07-2016 14:08:30)

Vraiment Hérodote est un puits ou l'on peut trouver nombre d'informations intéressantes et enrichissantes qui permettent d'augmenter ses connaissances et de favoriser la culture, démarche bien néc... Lire la suite

Jean-Louis (26-06-2016 12:38:42)

Merci pour cet article.J'ajouterais volontiers à la liste des médecins cités plus haut le nom du Hongrois Semmelweis qui a considérablement réduit le risque de fièvre puerpérale en conseillant ... Lire la suite

Margane (19-06-2016 21:03:48)

Comment comprendre que la France(ses dites élites ) ait été aussi souvent ingrates a l'égard de nombre de ses grandes figures et de nombre de petites gens tout aussi méritantes. Est ce l'effet d... Lire la suite

Percy (19-06-2016 12:15:36)

Excellent article ! Une bonne idée d'évoquer les héros de la médecine et tout particulièrement les médecins militaires, Laveran par exemple (paludisme). Penser aussi à Ricketts et Prowazek, mo... Lire la suite

Grangé (03-06-2006 21:58:26)

bravo pour cet article et tous les autres, particulièrement synthétiques, concis et passionnants.
Cependant, il conviendrait de ne pas oublier l'oeuvre anonyme et ô combien humanitaire des médecins militaires qui ont fait reculé de grands fléaux épidémiques d'origine bactérienne ou parasitaire à l'étranger : je ne citerai que Jean GALMOT ( trypanosomiase - maladie du sommeil ) et victor SEGALEN ( peste en asie ).

en vous remerciant et appréciant votre remarquable constance dans l'érudition,

Dr Grangé, médecin militaire de l'école de santé navale de Bordeaux.

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