Algérie

La guerre d'indépendance

Occupée par la France en 1830, l'Algérie devient en 1954 le théâtre de la plus douloureuse guerre de décolonisation qu'ait connue la France et même l'ensemble des pays européens. C'est le résultat des maladresses gouvernementales, de l'égoïsme obtus des colons européens et des querelles fratricides entre indépendantistes musulmans (note).

André Larané
Patrouille en Algérie en 1957, près d'Orléansville
Le bilan humain de la guerre d'Algérie

De 1954 à 1962, la guerre non déclarée d'Algérie va mobiliser pas moins de deux millions de jeunes Français du contingent, appelés pour deux ans ou parfois davantage. Les affrontements proprement dits entre l'armée française et l'Armée de libération nationale (ALN) débutent après les massacres de Philippeville (août 1955) et se terminent presque complètement cinq ans plus tard avec le « plan Challe ».
Les pertes du côté français sont bien répertoriées : 27 500 militaires tués et un millier de disparus, 2 800 civils tués et 800 disparus. Elles sont beaucoup plus incertaines du côté des ruraux musulmans et des indépendantistes. L'analyse des recensements permet de les situer entre 250 000 et 300 000, soit près de 3% des 9 millions de musulmans (1962). Ajoutons-y 8 000 villages incendiés, un million d'hectares de forêts incendiées et 2,1 millions de musulmans déportés dans des camps de regroupement. La propagande officielle du gouvernement algérien évoque un million, voire 1,5 million de morts. Il s'agit de billevesées sans fondement, que l'on pourrait qualifier de « négationnistes » tant elles heurtent l'intelligence et le bon sens (note).
Ajoutons à cela les règlements de comptes entre factions indépendantistes (FLN et MNA) en France comme en Algérie, les attentats du FLN contre la population civile et les violences postérieures à l'indépendance, en particulier le massacre des harkis (15 000 à 50 000 victimes). On évalue aussi à 1 600 le nombre d'Européen(ne)s enlevés après les accords de cessez-le-feu sans que l'on retrouve leurs traces.

Guerre fratricide chez les indépendantistes

Les trois « départements français en Algérie française » (Alger, Oran et Constantine) ainsi que les Territoires du Sud (Sahara) ont fait l'objet d'un recensement le 31 octobre 1954, à la veille de la guerre. La population totale est alors estimée à 9 370 000 individus dont environ 8 500 000 « Musulmans » (non compris 300 000 immigrés en métropole) et 1 052 400 « Européens ». Ces derniers incluent 130 000 israélites environ comme le chanteur Enrico Macias (juifs sépharades naturalisés par le décret Crémieux), des réfugiés d'Alsace-Lorraine, des immigrants maltais, italiens espagnols comme la mère d'Albert Camus, enfin des Français venus de métropole. 

Les musulmans habitent à 80% dans le bled (la campagne) ou le djébel (la montagne). Les Européens sont pour la plupart établis dans les villes mais, parmi elles, seule Oran est à majorité européenne. Ces Européens occupent des emplois généralement modestes, avec des salaires et des revenus nettement inférieurs à ceux de la métropole. 50 000 environ sont par ailleurs établis comme cultivateurs, en particulier dans la fertile Mitidja, l'arrière-pays algérois. Ils font vivre 14 500 exploitations, dont 120 possèdent plus de 200 hectares mais 7000 en ont moins de dix.

Les six fondateurs du FLN en 1954 de gauche à droite :  Rabah Bitat, Mostefa Ben Boulaïd, Didouche Mourad et Mohamed Boudiaf. Assis : Krim Belkacem et Larbi Ben M'hidi.Encouragés par la défaite française en Indochine, une poignée d'indépendantistes algériens forment au printemps 1954 un Comité révolutionnaire d'union et d'action (CRUA). Ils ont nom Rabah Bitat, Mostefa Ben Boulaïd, Didouche Mourad, Mohammed Boudiaf, Krim Belkacem et Larbi Ben M'Hidi.

Le 23 octobre 1954, à Alger, ils prennent le nom de Front de Libération Nationale (FLN) [ne pas confondre avec le FNL vietnamien, créé en 1960]. Partisans de l'action armée, à l'opposé du MTLD de Messali Hadj, qu'ils jugent trop modérés, ils fixent au 1er novembre 1954 le début de l'insurrection. Une trentaine d'attentats plus ou moins désordonnés ont lieu en ce jour de la « Toussaint rouge » : récoltes incendiées, gendarmerie bombardée... On compte sept victimes, toutes musulmanes sauf un instituteur venu de métropole.

Au Caire, Ahmed Ben Bella, un indépendantiste en rupture avec le MTLD de Messali Hadj, prend peu après la direction du FLN. Les messalistes se rassemblent quant à eux au sein d'un nouveau parti, le Mouvement National Algérien (MNA).

FLN et MNA vont dès lors se disputer à couteaux tirés les faveurs des travailleurs algériens en métropole (300 000 à 400 000). C'est grâce aux cotisations de ces travailleurs, prélevées le soir, dans les cafés où ils se retrouvent, que ces partis financent leurs activités et leur armement. Leur conflit fratricide va faire 4 000 morts. Il atteindra son paroxysme le 28 mai 1957 avec le massacre de 315 villageois favorables au MNA.

Pour le reste, dans son combat contre la puissance coloniale, le FLN va éviter les batailles rangées et s'en tenir à des massacres de civils, comme à la « Toussaint rouge ». Les victimes sont essentiellement des notables musulmans favorables à la France, torturés, mutilés et assassinés avec un raffinement de cruauté.

La Une du France-Soir le 2 novembre 1954. En agrandissement, la Une de l'Echo d'Alger le 7 novembre 1954.

Une « guerre sans nom »

Sur le moment, la « Toussaint rouge » (1er novembre 1954) passe inaperçue dans l'opinion française et les autorités tardent à réagir. Le 25 janvier 1955, le président du Conseil Pierre Mendès France nomme au gouvernement général de l'Algérie l'ethnologue Jacques Soustelle (44 ans), homme de gauche, pacifiste, résistant et gaulliste de la première heure. Il est accueilli fraîchement par les Européens mais très vite se rallie à la thèse radicale de l'intégration. Contre les riches colons et les indépendantistes musulmans, il prône l'octroi de la nationalité française pleine et entière à tous les habitants des trois départements.

Les pouvoirs publics prennent en main la population musulmane des douars (villages) grâce à des mesures sociales et au regroupement des populations en des lieux prétendument sûrs (à la fin de la guerre, 1 250 000 paysans auront été ainsi déplacés). Ces tâches de terrain à caractère humanitaire sont confiées aux Sections Administratives Spéciales (SAS), animées par des officiers aguerris et de bonne volonté.

Les « fellagha » (coupeurs de route) du FLN ripostent en multipliant les meurtres de notables musulmans favorables à la présence française. Mais n'arrivant pas à retourner la population musulmane en leur faveur, ils changent de tactique et s'en prennent aux Européens. Ce sont les massacres de Philippeville (20 août 1955), véritable tournant de la guerre.

Une SAS (sections administrative spécialisée) , ancienne ferme fortifiée : un des trois postes de garde au fond ; l'ancien château d'eau avait été transformé en douche pour les enfants de l'école. Les SAS ont été créées le 26 septembre 1955 par le gouverneur général de l'Algérie, Jacques Soustelle.

Les musulmans basculent dans le camp de la rébellion

En avril et mai 1955, l'extension de la rébellion conduit le gouvernement à rappeler partiellement les classes 1951 à 1954. Le service militaire est allongé de dix-huit à vingt-sept mois. Dès le 23 août 1955,  le gouvernement décide le rappel du demi-contingent libéré en avril et le maintien sous les drapeaux du premier contingent de 1954. 

Les effectifs engagés passent de 200 000 en début d'année 1955 à 400 000 en juillet dont une moitié de musulmans algériens (harkis, tirailleurs...). Les « opérations de maintien de l'ordre » (on ne parle pas de guerre, s'agissant d'un conflit sur le territoire national) ne sont plus le seul fait des engagés (militaires professionnels), comme en Indochine, mais aussi des conscrits et même des réservistes. Mais la brutalité de la répression fait basculer dans le camp de la rébellion de plus en plus de musulmans.

Dans le bled, face à des combattants insaisissables et infiltrés dans la population, les officiers français oublient les servitudes militaires et le code de l'honneur. Leurs hommes violentent les villageois et parfois violent leurs filles. Ils pratiquent la torture afin d'extorquer des aveux aux suspects soupçonnés de préparer des attentats. Ils pratiquent aussi les exécutions sommaires de suspects, ce que l'on appelle la « corvée de bois » : lesdits suspects sont amenés à l'écart, attachés à un arbre et abattus ; ensuite, on enlève les liens et l'on prévient les gendarmes pour le procès-verbal : « Abattus au cours d'une tentative d'évasion ».

Les maquisards, qui étaient à peine un demi-millier à la « Toussaint rouge » sont désormais plus de quinze mille. Le FLN décide de s'en prendre aux villes mêmes, où vivent la plupart des pieds-noirs. Quelques dizaines d'Européens trouvent la mort dans les embuscades, ce qui ouvre le cycle des représailles aveugles.

Casbah d'Alger : les ruines de la maison où ont péri Ali la Pointe, Hassiba Ben Bouali, Petit Omar et Mohamed Bouhmidi dans la Casbah d'Alger, au 5 rue des Abdérame, dynamitée par les parachutistes du 1er REP, le 8 octobre 1957 qui marqua la fin de la bataille d'Alger

Un gouvernement déboussolé

Le 31 janvier 1956, le socialiste Guy Mollet accède à la présidence du Conseil. Maladroit, il annonce des réformes de structure et rappelle Jacques Soustelle, jugé trop complaisant à l'égard des colons. Mais quand lui-même se rend à Alger, le 6 février 1956, il est conspué par la population. C'est la « journée des tomates ». Guy Mollet revient alors à une politique de répression. Le garde des sceaux François Mitterrand couvre l'envoi à la guillotine de pas moins de 45 militants et suspects FLN en quelques mois ( 491 ).

L'attentat du Milk Bar le 30 septembre 1956.Le 10 août 1956, un groupe de pieds-noirs, parmi lesquels un policier, déposent une bombe dans la Casbah d'Alger. On compte 70 morts de tous âges. La réplique ne se fait pas attendre. Le 30 septembre 1956, deux bombes déposées par des jeunes femmes musulmanes explosent à Alger, l'une au Milk Bar de la place Bugeaud, l'autre à la Cafétéria, rue Michelet.

Poursuivant par la malchance, Guy Mollet doit aussi assumer le 22 octobre 1956, l'interception d'un avion civil transportant des dirigeants du FLN parmi les plus conciliants, dont Ahmed Ben Bella. Désespérant d'en finir avec les attentats aveugles, il confie le 7 janvier 1957 au général Jacques Massu les pleins pouvoirs de police sur le Grand Alger (800 000 habitants dont une moitié de musulmans).

Les parachutistes ne vont pas faire dans la dentelle. Ils multiplient les arrestations et pratiquent les exécutions sommaires et la torture de sorte qu'au bout de neuf mois, ils peuvent se flatter d'avoir mis un terme à la vague d'attentats aveugles et gagné la « bataille d'Alger ». Mais ce faisant, ils n'ont en rien gagné la guerre d'Algérie.

Entretemps, le 13 juin 1957, à Paris, Guy Mollet a dû quitter la présidence du Conseil. Pris dans la tempête et dépourvu de perspective, le régime navigue dès lors à vue...

Lassitude de l'opinion publique métropolitaine

Le 8 février 1958, l'aviation française, lancée à la poursuite de fellaghas algériens, bombarde le village tunisien de Sakhiet. L'attaque fait 70 morts dans la population civile. En guise de représailles, le président tunisien Habib Bourguiba bloque la base française de Bizerte et en appelle à l'ONU.

Félix Gaillard, un radical de 39 ans arrivé à la présidence du Conseil le 6 novembre 1957, suggère de faire appel à une mission de bons offices anglo-américaine. L'Assemblée désavoue son initiative et le renverse le 15 avril 1958. Pierre Pflimlin, député MRP (chrétien-démocrate) de Strasbourg, est pressenti pour le remplacer. Mais il est soupçonné de vouloir négocier un cessez-le-feu avec le FLN, ce qui mettrait fin ipso facto à la guerre mais aussi à la présence française en Algérie !

Dans ce contexte troublé, les cercles politiques algérois sont remués par les gaullistes, en particulier le sénateur Michel Debré, qui publie Le Courrier de la colère, et surtout l'ancien gouverneur Jacques Soustelle, resté très populaire en Algérie. Ils s'efforcent de convaincre l'opinion que le général de Gaulle est la personnalité la mieux placée pour maintenir les trois départements algériens au sein de la République.

Les gaullistes reçoivent le soutien occulte de Léon Delbecque, un ancien officier qui va mettre en place des réseaux de « pieds-noirs » (dico) pour préparer le retour au pouvoir du Général. Dès février 1958, il rencontre le général Raoul Salan, qui commande les troupes en Algérie, et tente de le convaincre du bien-fondé de la solution gaullienne.

Le 26 avril 1958, une manifestation organisée à Alger par Delbecque réclame rien moins que la formation d'un « gouvernement de Salut public ». Le 10 mai 1958, Alain de Sérigny, directeur de l'Écho d'Alger, publie un éditorial où il en appelle à de Gaulle : « Je vous en conjure, parlez, parlez vite, mon général... » Le 13 mai 1958, jour de l'investiture de Pierre Pflimlin, Léon Delbecque organise à Alger une manifestation devant le monument aux morts. Puis la foule investit le Gouvernement général. C'est la rupture avec Paris. Le surlendemain 15 mai, au balcon du Gouvernement général, le général Salan lance à la foule : « Vive de Gaulle ! » Celui-ci, de sa retraite de Colombey-les-deux Églises, fait savoir qu'il se tient prêt à « assumer les pouvoirs de la République ». Il est bientôt investi de la présidence du Conseil, à charge pour lui de mettre un terme à la guerre d'Algérie... et à la IVe République.

Le 4 juin, devant la foule rassemblée sur le Forum d'Alger, il proclame une formule fameuse : « Je vous ai compris. Je sais ce qui s'est passé ici. Je vois ce que vous avez voulu faire. Je vois que la route que vous avez ouverte en Algérie, c'est celle de la rénovation... » Formule savamment dosée qui lui vaut l'adhésion des foules algéroises sans le moindre engagement à leur égard !

Le 6 juin 1958, à Mostaganem, le général en rajoute en lançant à la fin d'un discours : « Vive l'Algérie française ». Le même jour, à Oran, de Gaulle certifie que l'Algérie est « terre française aujourd'hui et pour toujours ». Il instaure un nouveau régime, la Ve République

Sans attendre, le 23 octobre 1958, le général de Gaulle propose la « paix des Braves » au FLN mais celui-ci rejette l'offre. De Gaulle en revient alors à la solution militaire. Le 12 décembre 1958, il désigne le général Maurice Challe à la tête des forces stationnées en Algérie, en remplacement de Raoul Salan. Au cours d'une série d'opérations qualifiées de « rouleau compresseur », Challe arrive en neuf mois à annihiler presque complètement la capacité de nuisance des indépendantistes, à Alger comme dans le djebel (la montagne). Les combattants des wilayas désertent et se rendent en masse aux autorités cependant que les militaires reprennent la maîtrise du terrain (25 000 tués indépendantistes, soit la moitié des effectifs de l'ALN). 

Les chefs du FLN réfugiés à l'étranger n'en poursuivent pas moins leurs actions, sur le plan politique plus que militaire. Houari Boumedienne, chef de l'armée des frontières stationnée en Tunisie et au Maroc, se tient à l'affût.

Désespérant de trouver des interlocuteurs modérés au sein du FLN et sans avoir pu obtenir une quelconque concession de celui-ci, le président de la République promet alors, le 16 septembre 1959, un référendum sur l'autodétermination. Le 8 janvier 1961, 75% des Français approuvent la politique du général de Gaulle. Ils répondent Oui à la question qui leur est soumise : « Approuvez-vous le projet de loi soumis au peuple français par le président de la République et concernant l'autodétermination des populations algériennes et l'organisation des pouvoirs publics en Algérie avant l'autodétermination ? »

Mais si l'opinion métropolitaine approuve très largement la politique de De Gaulle, il n'en va pas de même des combattants des deux camps, tant les indépendantistes que les partisans de l'« Algérie française ». Désireux de forcer son avantage, le FLN organise à Paris une manifestation nocturne qui tourne au drame le 17 octobre 1961.  Dans le même temps, des extrémistes de l'autre camp constituent une Organisation de l'Armée Secrète (OAS) en vue de combattre par le terrorisme les officiels français accusés de négocier l'abandon de l'Algérie avec le FLN. Leurs attentats suscitent compréhension chez les pieds-noirs et répulsion chez les métropolitains. Ils sont combattus par les auxiliaires du pouvoir, les « barbouzes ». Place de la Bastille (Paris), une manifestation contre l'OAS tourne au drame suite à l'écrasement de la foule contre les grilles du métro Charonne

Le cessez-le-feu, officialisé le 19 mars 1962, est suivi une semaine plus tard d'une manifestation désespérée et sanglante des Algérois. Le 15 avril, le Chanzy débarque à Marseille un premier contingent de « rapatriés » en provenance d'Oran. Sur place, dans cette grande ville à majorité européenne, l'OAS, bien que décapitée par le pouvoir gaulliste, multiplie les attentats contre les musulmans. La tension monte à son comble et, le jour même de l'indépendance, le 5 juillet 1962, la population européenne d'Oran est victime d'un massacre. L'immense majorité du million d'Européens établis en Algérie se résigne à l'exil en métropole (« la valise ou le cercueil »), mettant fin à 130 ans d'Histoire.

« Adieu mon pays »

Chanteur français né à Constantine en 1938, Enrico Macias quitte l’Algérie en 1961 et devient rapidement le représentant de la condition pied-noire en France.
Extrait de « Adieu mon pays » (1962) :
« J’ai quitté mon pays
J’ai quitté ma maison
Ma vie, ma triste vie
Se traîne sans raison
J’ai quitté mon soleil
J’ai quitté ma mer bleue
Leurs souvenirs se réveillent
Bien après mon adieu
Soleil ! Soleil de mon pays perdu
Des villes blanches que j’aimais
Des filles que j’ai jadis connues
(…) Mais du bord du bateau
Qui m’éloignait du quai
Une chaîne dans l’eau
A claqué comme un fouet. »

Séquelles de la décolonisation

L'indépendance accordée à l'Algérie est la dernière étape de la liquidation de l'empire colonial français, si l'on met à part quelques îles et la Guyane (les « confettis de l'empire »). En moins de dix ans, de 1954 à 1962, la France s'est séparée de l'Indochine, de l'Afrique noire et de l'Afrique du Nord, colonisées de haute lutte sous la IIIe République (note).

Meurtrie par sa défaite de 1940 et le sentiment d'un irrésistible déclin, elle n'a émancipé ses colonies d'outre-mer que sous l'effet de la contrainte et, concernant l'Algérie, dans la douleur (le contraste est frappant avec le Royaume-Uni qui n'a connu de guerre coloniale qu'en Irlande et s'est volontairement détaché de ses colonies d'outre-mer dès le début du XXe siècle).

Libérée du fardeau des colonies et dynamisée par l'arrivée des pieds-noirs, la France va connaître un regain économique et social dans les années 1960. Mais sa vie politique va longtemps rester marquée par les séquelles de la décolonisation. Notamment à travers les guerres larvées entre anciens de l'OAS (Organisation de l'Armée Secrète) et des réseaux secrets de contre-espionnage. Ces réseaux, caricaturés sous le terme de barbouzes, sont restés très actifs dans la décennie suivante. Ainsi le SAC (Service d'Action Civique) dont certains dirigeants, comme Charles Pasqua, ont poursuivi après la guerre une carrière éminente.

Notons que la rumination de la guerre d'Algérie, plus d'un demi-siècle après les faits, tant en Algérie qu'en France, est sans équivalent dans l'Histoire et dans le monde. A contrario, l'Inde, qui sait gré aux Britanniques de lui avoir donné son unité et une langue de communication, semble avoir oublié les aspects cruels de la colonisation. Et le Vietnam, résolument tourné vers l'avenir, se soucie comme d'une guigne de ses guerres passées avec les Français et les Américains !

L'historien Marc Ferro, qui a enseigné en Algérie au temps de la colonisation, s'en étonne dans ses mémoires : « Dans le passé, au temps colonial, on n’a jamais rien caché des atrocités de la conquête et cela ne choquait personne, pas plus les métropolitains que les indigènes. Ces derniers ne se souciaient pas du passé mais de l’avenir, le leur ! »

Bibliographie

La guerre d'Algérie a suscité une bibliographie très abondante, avec beaucoup d'ouvrages militants, notamment quand il s'est agi de dénoncer la torture (Henri Alleg, La Question, 1958).

Sur les grandes étapes de la guerre d'Algérie et surtout sur la manière dont elle s'est déroulée sur le terrain, je ne saurais trop recommander le livre de Patrick Rotman : L'ennemi intime (266 pages, 19 euros, Seuil, 2002).

Personne n'a mieux raconté la tragédie de la torture, des attentats, des exécutions sommaires, l'incompréhension montante entre les communautés et l'échec final, pitoyable et encore douloureux.


Publié ou mis à jour le : 2023-09-19 21:36:05

Voir les 9 commentaires sur cet article

Claude Edouard (28-01-2024 11:14:06)

Référence: ancien combattant d'Algérie appelé. Un peu d'accord avec Mrs et Maïs. Je n'aime pas trop Stora. Je note que vous avez bien parlé de Mollet et surtout de Mitterrand, celui qui nous a e... Lire la suite

Mrs (14-02-2021 11:15:05)

J’attendais d’Herodote un peu plus d’impartialité : une guerre qui se termine par «  le triomphe du FLN », c’est faux et partisan... les »Européens » ( même ceux qui sont nès et v... Lire la suite

Jean Paul MAÏS (14-02-2021 10:07:00)

Mais quand se débarrassera-t-on de cette confusion entre Algériens et Musulmans ? Les soldats français ne sont jamais présentés comme "catholiques", alors ?Herodote.net répond :Pendant la guerre... Lire la suite

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